Dans quelle mesure les différentes générations sont-elles plus ou moins sensibles à la notion de surveillance ? Un regard sur les personnes nées au tournant des années 80 et 90 montre que ces dernières abandonnent probablement plus facilement une part de contrôle sur les données personnelles et n’ont sans doute pas eu totalement conscience de leur grande valeur.
Peut-être qu’à l’approche des Jeux olympiques de Paris, avez-vous vaguement protesté lors de la mise en place d’un fichier vidéo algorithmique ? Et puis avez-vous haussé les épaules : un fichier de plus. Peut-être par résignation ou par habitude ? Comme d’autres, vous avez peut-être aussi renseigné sans trop vous poser de questions votre profil MySpace ou donné votre « ASV » (âge, sexe, ville) sur les chats Caramail au tournant des années 1990-2000 et encore aujourd’hui vous cliquez quotidiennement sur « valider les CGU » (conditions générales d'utilisation) sans les lire ou sur « accepter les cookies » sans savoir précisément ce que c’est.
En effet, peut-être, faites-vous partie de ce nombre important d’individus nés entre 1979 et 1994 et avez-vous saisi au vol le développement de l’informatique et des nouvelles technologies. Et ce, sans forcément vous attarder sur ce que cela impliquait sur le plan de la surveillance des données que vous avez accepté de partager avec le reste du monde…
Pour se convaincre de l’existence de cette habitude rapidement acquise, il suffit d’avoir en tête les grandes dates de l’histoire récente de l’informatique et d’Internet : Apple met en 1983 sur le marché le premier ordinateur utilisant une souris et une interface graphique, c’est le Lisa.
Puis le World Wide Web est inventé par Tim Berners-Lee en 1989, 36 millions d’ordinateurs sont connectés à Internet en 1996, Google est fondé en 1998 et Facebook est lancé en 2004. L’accélération exponentielle d’abord des machines elles-mêmes, puis des réseaux et enfin du partage de données et de la mobilité a suivi de très près les millennials.
La génération précédente, plus âgée, a parfois moins l’habitude de ces outils ou s’est battue contre certaines dérives initiales, notamment sécuritaires. La suivante, qui a été plongée immédiatement dans un monde déjà régi par l’omniprésence d’Internet et des réseaux, en connaît plus spontanément les risques (même si elle n’est pas nécessairement plus prudente).
Probablement du fait de ce contexte, la génération née entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990 est aussi celle qui est la plus optimiste face au développement des technologies.
Cet état de fait apparaît d’autant plus clairement que la « génération Z », plus jeune, est marquée généralement par une plus grande apathie voire un certain pessimisme notamment quant au devenir des données personnelles.
En effet, aujourd’hui, les plus jeunes, déjà très habitués à l’usage permanent des réseaux sociaux et aux surveillances de toute part, se trouvent très conscients de ses enjeux mais font montre d’une forme de résignation. Celle-ci se traduit notamment par le « privacy paradox » mis en lumière par certains sociologues et qui se traduit par une tendance paradoxale à se réclamer d’une défense de la vie privée tout en exposant très largement celle-ci volontairement par l’utilisation des réseaux sociaux.
A contrario, cette confiance en la technologie se manifeste spécialement par une forme de techno-optimisme, y compris lorsqu’il s’agit de l’usage de données personnelles. Cet état d’esprit se traduit dans de nombreux domaines : lorsqu’il s’agit de l’usage des données de santé par exemple ou plus généralement quant à l’utilisation des technologies pour régler des problèmes sociaux ou humains comme le réchauffement climatique.
Cet optimisme est aussi visible lorsqu’il s’agit d’évoquer les fichiers policiers ou administratifs. S’il n’existe pas de données précises sur l’acceptation des bases de données sécuritaires par chaque tranche d’âge, il n’en demeure pas moins que la génération des 30-45 ans n’est plus celle de l’affaire Safari dont l’éclatement, après la révélation d’un projet de méga-fichier par le ministère de l’Intérieur, a permis la naissance de la CNIL.
Cette génération a, au contraire, été marquée par des événements clés tels que les attentats du 11 septembre 2001 ou la crise économique de 2009.
Ces événements, et plus généralement le climat dans lequel cette génération a grandi et vit aujourd’hui, la conduisent à être, d’après les études d’opinion récentes, plus sensible aux questions de sécurité que d’autres. Elle entretient ainsi un rapport différent à la sécurité, moins encline à subir des contrôles d’identité répétés (qui sont bien plus fréquents chez les plus jeunes) mais plus inquiète pour l’avenir et plus sensible aux arguments sécuritaires.
Cet état d’esprit favorise en conséquence une plus grande acceptation encore des fichiers et aux dispositifs de sécurité qui sont perçus comme des outils nécessaires à l’adaptation aux nouvelles formes de délinquance et de criminalité, par exemple à l’occasion de l’organisation des futurs Jeux olympiques et paralympiques en France ou rendus utiles pour permettre la gestion d’une pandémie comme celle du Covid-19.
Les deux phénomènes – optimisme face au développement des technologies et sensibilité à la question sécuritaire – sont d’autant plus inextricables qu’il existe un lien important entre usages individuels et commerciaux des technologies d’une part et usages technosécuritaires d’autre part. En effet, les expériences en apparence inoffensives de l’utilisation récréative ou domestique des technologies de surveillance (caméras de surveillance, objets connectés, etc.) favorisent l’acceptabilité voire l’accoutumance à ces outils qui renforcent le sentiment de confort tant personnel que sécuritaire.
La génération des trentenaires et quadra actuelle, très habituée au développement des technologies dans tous les cadres (individuels, familiaux, professionnels, collectifs, etc.) et encore très empreinte du techno-optimisme de l’explosion des possibilités offertes par ces outils depuis les années 1990 est ainsi plus encline encore que d’autres à accepter leur présence dans un contexte de surveillance de masse.
Cet état d’esprit favorise en conséquence une plus grande acceptation encore des fichiers et aux dispositifs de sécurité qui sont perçus comme des outils nécessaires à l’adaptation aux nouvelles formes de délinquance et de criminalité. Maxim Hopman/Unsplash, CC BY-NC-ND
La pénétration très importante de ces dispositifs dans notre quotidien est telle que le recours aux technologies même les plus débattues comme l’intelligence artificielle peut sembler à certains comme le cours normal du progrès technique. Comme pour toutes les autres générations, l’habituation est d’autant plus importante que l’effet cliquet conduit à ne jamais – ou presque – remettre en cause des dispositifs adoptés.
Partant, la génération des 30-45 ans, sans doute bien davantage que celle qui la précède (encore marquée par certains excès ou trop peu familiarisée à ces questions) que celle qui la suit (davantage pessimiste) développe une forte acceptabilité des dispositifs de surveillance de tous horizons. En cela, elle abandonne aussi probablement une part de contrôle sur les données personnelles dont beaucoup n’ont sans doute pas totalement conscience de la grande valeur.
Au contraire, les réglementations (à l’image du Règlement général sur la protection des données adopté en 2016 et appliqué en 2018) tentant de limiter ces phénomènes sont parfois perçues comme une source d’agacement au quotidien voire comme un frein à l’innovation.
Sur le plan sécuritaire, l’acceptabilité de ces fichages, perçus comme nécessaires pour assurer la sécurité et la gestion efficace de la société, pose la question de la confiance accordée aux institutions. Or, là encore, il semble que la génération étudiée soit moins à même de présenter une défiance importante envers la sphère politique comme le fait la plus jeune génération.
Demeurent très probablement encore d’autres facteurs explicatifs qu’il reste à explorer au regard d’une génération dont l’état d’esprit relativement aux données personnelles est d’autant plus essentiel que cette génération est en partie celle qui construit le droit applicable aujourd’hui et demain en ces matières.
A partir de mai 2022, les voitures neuves devront être équipées d'une boîte noire enregistrant les paramètres de conduite. Les données collectées seront anonymes mais pourront servir à la police en cas d'accident.
"Big Brother is watching your car !" Non, il ne s'agit pas de la suite automobile de 1984 de Georges Orwell mais bien d'une nouvelle loi européenne visant à rendre obligatoire de nombreux équipements sur les voitures neuves dès mai 2022 (mai 2024 pour les véhicules neufs homologués avant juillet 2022.). Parmi eux, la tant décriée boîte noire, autrement dit un enregistreur de données capable de récolter les paramètres de conduite.
Voté en 2019 par les élus européens et le Conseil européen des ministres, ce règlement précise que le boîtier enregistrera par tranches de cinq secondes, avant et après un accident, de nombreuses données telles que la vitesse, l'accélération, le freinage, l'angle du volant, le port de la ceinture, la force de la collision ou encore les coordonnées GPS de l'accident. En revanche, contrairement aux boîtes noires installées dans les avions, les conversations dans l'habitacle ne seront pas enregistrées et les données resteront anonymes.
Un éthylomètre antidémarrage
Pour éviter le piratage, l'enregistreur sera positionné à un endroit inaccessible pour le propriétaire et il sera impossible de le désactiver. D'autres équipements seront également rendus obligatoires comme un détecteur de somnolence ou un limiteur de vitesse intelligent capable de lire les panneaux.
Enfin, les voitures devront pouvoir faciliter l'installation d'un éthylomètre antidémarrage ainsi qu'un système de surveillance de la pression des pneumatiques. Bref, autant de nouvelles technologies qui risquent de faire grimper encore plus la facture.
Désactivation à distance des abonnements de transport, géolocalisation des citoyens et suppression de l’accès aux comptes bancaires : pour le quotidien Le Temps, les propositions avancées dans le rapport d’un groupe de sénateurs constitueraient une sérieuse violation des libertés des citoyens.
“En France, la tentation de créer une société sous surveillance” : voilà le titre d’un article du Temps. Le journal suisse s’intéresse au rapport présenté le 3 juin par trois sénateurs de droite, membres de la délégation à la prospective, et qui porte une série de recommandations pour faire face à une future crise majeure du même ordre que la crise sanitaire. Mais son contenu est “très surprenant”.
En l’espèce, les rapporteurs René-Paul Savary, Véronique Guillotin et Christine Lavarde veulent recourir de façon plus intensive aux outils numériques, avec notamment la mise en place d’une plateforme de crise offrant un panel d’outils aux autorités. Parmi ceux-ci, la possibilité de recouper les données disponibles sur diverses applications – de TousAntiCovid à celle de la SNCF en passant par Waze –, la désactivation des titres de transport ou des comptes bancaires des personnes violant une éventuelle quarantaine, ou encore l’utilisation d’outils de rappel à l’ordre comme l’envoi de SMS. Ce qui, comme l’observe le journal, “implique que les citoyens soient alors géolocalisés en permanence”.
“Les élus suggèrent de créer une véritable société de surveillance en cas de nouvelle crise majeure, en contrôlant de très près les agissements des citoyens et en restreignant sensiblement leurs libertés individuelles”, juge le quotidien suisse.
Le titre s’étonne également du fait que ce rapport soit passé relativement inaperçu. “Ce n’est ni une loi, ni même un projet de loi, tout juste un rapport. […] Mais parmi les plus grands médias français, seuls un site web et Public Sénat en ont parlé.” Le sujet pourrait en tout cas s’avérer brûlant : “Les complotistes vont adorer, les défenseurs des libertés individuelles beaucoup moins”, résume Le Temps.
L’inévitable débat sur la reconnaissance faciale arrive enfin en France, et le gouvernement esquisse sa réponse. Dans un entretien paru dans Le Monde du 15 octobre, le secrétaire d’État au numérique Cédric O, ancien cadre du groupe Safran, a notamment estimé qu’« expérimenter » la reconnaissance faciale était « nécessaire pour que nos industriels progressent ».
Mais cette prise de parole au plus haut niveau politique n’est que la partie émergée de l’iceberg. Car depuis des mois, notes et rapports officiels se succèdent pour souligner le défi que constitue l’« acceptabilité sociale » de ces technologies. Pour leurs auteurs, l’objectif est clair : désarmer les résistances à ces nouvelles modalités d’authentification et d’identification biométriques dont la prolifération est jugée inéluctable, et permettre à des industriels français comme Thales ou Idemia [une entreprise de sécurité numérique] de se positionner face à la concurrence chinoise, américaine ou israélienne.
L’enjeu est d’autant plus pressant que, contrairement à ce que laisse entendre Cédric O, les dispositifs de reconnaissance faciale sont déjà en place sur le territoire français. Depuis plusieurs années, des entreprises développent et testent ces technologies grâce à l’accompagnement de L’État et l’argent du contribuable. Le tout sans réel encadrement ni transparence.
La campagne participative de recherche-action Technopolice.fr, lancée début septembre par des associations de défense des libertés, a commencé à documenter les projets lancés au niveau national et local – à Paris, Nice, Marseille, Toulouse, Valenciennes et Metz notamment. Outre la reconnaissance faciale, d’autres applications greffées aux flux de vidéosurveillance et fondées elles aussi sur des techniques d’« intelligence artificielle » font également l’objet d’expérimentations, comme l’analyse des émotions ou la détection de « comportements suspects ».
Alors, face aux oppositions portées sur le terrain et jusque devant les tribunaux par les collectifs mobilisés contre ces déploiements, les représentants de l’Etat et les industriels font front commun. Leur but n’est pas tant d’expérimenter que de tenter de « rassurer » l’opinion publique, le temps d’œuvrer à la banalisation de ces technologies et de mettre la population devant le fait accompli.
Les garanties mises en avant dans la communication gouvernementale – instance de supervision sous l’égide de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), pseudo-consultation et adoption future de règles juridiques qui dessineraient un modèle « acceptable » de reconnaissance faciale « à la française » – sont tout bonnement illusoires. L’histoire récente l’illustre amplement. La loi « informatique et libertés », adoptée en 1978 en réaction aux premiers scandales liés au fichage d’Etat, n’a de toute évidence pas permis, comme c’était pourtant son objectif, de juguler l’avènement d’une société de surveillance.
Pire, dans ce domaine, la CNIL a vu ses pouvoirs systématiquement rognés depuis quinze ans, donnant le change à des présidents successifs ayant souvent contribué à cette impuissance. Quant à l’exemple des fichiers de police, il suffirait à démontrer que, même une fois inscrites dans la loi, les dispositions destinées à protéger les droits fondamentaux sont systématiquement contournées.
Or ces technologies biométriques augurent un changement de paradigme dans l’histoire de la surveillance. A terme, elles reviennent à instaurer un contrôle d’identité permanent et généralisé, exigeant de chaque personne qu’elle se promène en arborant une carte d’identité infalsifiable, qui pourra être lue sans qu’elle ne le sache par n’importe quel agent de police. L’histoire devrait nous servir de leçon : si nos grands-mères et nos grands-pères avaient dû vivre au début des années 1940 dans un monde saturé de tels dispositifs, ils n’auraient pas pu tisser des réseaux clandestins capables de résister au régime nazi.
En dépit de leurs effets politiques délétères, ces coûteuses machines seront incapables d’apporter la sécurité vantée par leurs promoteurs. Les milliards d’euros dépensés depuis plus de vingt ans au nom du « solutionnisme technologique » en vogue dans les milieux de la sécurité devraient là encore nous en convaincre : la technologie s’est avérée inopérante pour enrayer les formes de violence qui traversent nos sociétés. Sous couvert d’efficacité et de commodité, elle conduit à déshumaniser encore davantage les rapports sociaux, tout en éludant les questions politiques fondamentales qui sous-tendent des phénomènes tels que la criminalité.
C’est pourquoi, contre cette offensive concertée de L’État et des industriels qui, à tout prix, cherchent à imposer la reconnaissance faciale, nous devons dire notre refus. Aux États-Unis, après les mobilisations citoyennes, plusieurs municipalités, ainsi que l’Etat de Californie, ont commencé à en proscrire les usages policiers.
A notre tour, nous appelons à l’interdiction de la reconnaissance faciale.
Est-on tous surveillés ? Le gouvernement veut mettre en place deux mesures qui vont dans ce sens. Le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, aimerait bien que le fisc puisse surveiller les réseaux sociaux pour scruter votre train de vie. Quant au secrétaire d’État au numérique, Cédric O, il voudrait faciliter les expérimentations de reconnaissance faciale pour la vidéo-surveillance.
L’État s’immisce un peu trop dans nos vies privées. Quand on vous dit que Google lit vos mails, pour y détecter vos envies d’achats ou de voyages, que Facebook stocke tous vos échanges à jamais, est-ce plus choquant que lorsqu’on vous dit que l’État français veut aller espionner vos activités sur les réseaux sociaux et qu’il veut surveiller vos allers et venues partout ?
Dire les choses comme ça peut apparaître comme caricatural, totalement exagéré, mais rien de ce qui vient d'être décrit n’est aujourd’hui de la science-fiction. Que veut exactement autoriser le gouvernement ?
Industrialiser des contrôles fiscaux d'un nouveau genre
Concrètement, si vous postez des selfies au bord d’une piscine dans une grande villa alors que vous gagnez 1.000 euros par mois, c’est suspect. Avec des capacités de calculs toujours plus grandes et l’intelligence artificielle, on peut industrialiser ces contrôles fiscaux d’un nouveau genre. Ce n’est plus votre voisin qui vous dénonce, c’est vous-même, avec votre propre vie numérique.
Le gouvernement voudrait aussi expérimenter une autre technologie en plein boom : la reconnaissance faciale. Pour s’identifier dans des démarches administratives, il suffit d’enregistrer votre visage. Comme toutes les innovations ça doit vous simplifier la vie sauf que derrière ça ouvre des questions vertigineuses notamment la possibilité d’une surveillance généralisée, à portée de technologie.
Le gouvernement voudrait aussi ouvrir un peu plus les expérimentations de reconnaissance faciale dans la vidéo surveillance. Si on possède votre profil, on peut vous identifier dans une foule ou dans les transports. Dans une ville comme Nice, qui détient le record de caméra au mètre carré, tous vos mouvements pourront être suivis en temps réel et enregistrés. Que vous soyez d’accord ou pas, honnête ou pas.
La première raison est économique et stratégique. Nous avons des champions de la reconnaissance faciale comme Idemia, leader mondial de la biométrie inconnu du grand public, ou le groupe Thales. Leurs concurrents sont des entreprises chinoises. Cet argument de la compétitivité de nos entreprises est toujours un peu bizarre. Nos derniers champions de l’espionnage de masse ont vendu à des pays comme la Libye ou l’Égypte des moyens de surveillance pour traquer leurs opposants politiques. C’est une drôle de compétitivité.
La deuxième raison qui pousse le gouvernement à vouloir autoriser la reconnaissance faciale c’est la pression de la police et de la gendarmerie, qui rêvent à voix haute "d’un contrôle d’identité permanent et général." Circulez, on vous surveille sans rien vous demander.
On ne passe pas d’une société de liberté à une société totalitaire forcément du jour au lendemain. Mais dans l’époque un peu agitée dans laquelle nous sommes, il faut faire attention et toujours penser à après-demain. Si on se rapproche d’un régime illibéral, comme on dit aujourd’hui, entre les mains de qui aurons-nous mis demain tous ces outils de fichage généralisé ultra puissants ? Le gouvernement a compris qu’il fallait en débattre. Est-ce pour limiter ces technologies ou les rendre acceptables ? C’est déjà un premier débat.
1984 Derrière Winston, la voix du télécran continuait à débiter des renseignements sur la fonte et sur le dépassement des prévisions pour le neuvième plan triennal. Le télécran recevait et transmettait simultanément. Il captait tous les sons émis par Winston au-dessus d’un chuchotement très bas. De plus, tant que Winston demeurait dans le champ de vision de la plaque de métal, il pouvait être vu aussi bien qu’entendu. Naturellement, il n’y avait pas moyen de savoir si, à un moment donné, on était surveillé. Combien de fois, et suivant quel plan, la Police de la Pensée se branchait-elle sur une ligne individuelle quelconque, personne ne pouvait le savoir. On pouvait même imaginer qu’elle surveillait tout le monde, constamment. Mais de toute façon, elle pouvait mettre une prise sur votre ligne chaque fois qu’elle le désirait. On devait vivre, on vivait, car l’habitude devient instinct, en admettant que tout son émis était entendu et que, sauf dans l’obscurité, tout mouvement était perçu .
2020 - Le dernier comptage effectué en 2012 par la CNIL (Commission nationale informatique et libertés) faisait état de 935 000 caméras de surveillance installées sur notre territoire. Le nombre doit maintenant dépasser allègrement le million. Où sont-elles ? Partout ! Aux guichets de banque, dans les bureaux de tabac, les parkings, les couloirs de métro et même sur les lieux de travail. Avant un nouveau comptage, la dynamique ne n’infléchit pas sur le territoire : En 2018, 23 nouvelles caméras de vidéosurveillance ont été installées à Tours, le nombre de caméras dans cette ville ayant quadruplé en quatre ans. À Béziers, la mairie à fait savoir, dans un communiqué en janvier 2019, que la ville allait doubler le nombre de caméras de vidéosurveillance d’ici deux ans, passant de 90 début 2019, à 200 fin 2020, appuyant cette volonté d’un tweet et de mots dont je vous laisse juge.
Dès 2011, la Cour des comptes s’agaçait de l’absence d’évaluation de l’efficacité de cette approche sur la voie publique : « Les différentes études conduites à l’étranger, notamment au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Australie ne démontrent pas globalement l’efficacité de la vidéosurveillance de la voie publique », s’inquiétait-elle même dans son rapport. Le flot d’images qu’elles diffusent est humainement impossible à regarder ! Et l’analyse automatique reste expérimentale.
En 2010, Laurent Mucchielli, directeur de recherche au CNRS, répondait lors d’une audition publique à un questionnement de la mairie de Toulouse qui souhaitait savoir si la vidéosurveillance était un bon moyen pour lutter contre les problèmes de délinquance et d’incivilités. En s’appuyant sur les recherches internationales et sur des évaluations locales réalisées en France des rapports publics, six constats ont été formulés :
1 - La vidéosurveillance de voie publique est une technologie qui présente à l’heure actuelle un faible intérêt comme outil de lutte contre la délinquance, tant en termes préventifs que répressifs.
2 - Elle se heurte à des limites inhérentes à la réalité délinquante, ainsi qu’à des limites en termes de coût financier, de carence doctrinale et de déficit chronique de coordination des différentes catégories d’agents publics (voire privés) concernés.
3 - Son principal impact est sans doute symbolique : la vidéosurveillance peut rassurer certaines personnes plus sujettes que d’autres au sentiment d’insécurité (commerçants du centre-ville, personnes âgées, etc.), elle peut aussi servir à des élus à afficher une politique de sécurité.
4 - Son coût est tel qu’il oblige fatalement à abandonner d’autres dépenses et à renoncer à d’autres types d’embauche d’agents contribuant à la tranquillité publique.
5 - La pression que l’État exerce actuellement sur les collectivités territoriales par le biais de l’incitation financière ainsi que par la mobilisation des préfets et des fonctionnaires de police et de gendarmerie a nécessairement d’autres raisons que la recherche d’une meilleure efficacité de la politique de sécurité. Le contexte de désengagement de l’État et de réduction des fonctionnaires en fait partie. La volonté d’affichage d’une politique permettant de masquer la persistance du haut niveau des problèmes de délinquance me semble également une hypothèse légitime. Les liens avec le monde de la sécurité privée seraient à explorer.
6 - Le pays européen le plus vidéosurveillé – le Royaume-Uni – est en train de faire machine arrière en parvenant à peu près aux mêmes constats. C’est ce qu’ont déclaré à plusieurs reprises ces dernières années les policiers londoniens et c’est ce qu’a entériné récemment le nouveau premier ministre Boris Johnson. En conclusion, un chercheur indépendant ne peut que mettre en garde les élus contre ce « mirage technologique » et rappeler qu’il existe bien d’autres façons d’essayer de réduire le niveau de délinquance dont souffrent l’ensemble de nos concitoyens.
Et Laurent Mucchielli de conclure :
« Un chercheur indépendant ne peut que mettre en garde les élus contre ce « mirage technologique » et rappeler qu’il existe bien d’autres façons d’essayer de réduire le niveau de délinquance dont souffrent l’ensemble de nos concitoyens. »
En 2018, le sociologue évoquait à nouveau dans son ouvrage, Vous êtes filmés ! Enquête sur le bluff de… la vidéosurveillance un gaspillage de l’argent public déniant toutes les recherches et études sérieuses. « Depuis plus de vingt ans, le monde scientifique, par la voix de chercheurs français et étrangers, ne cesse de juger, chiffres à l’appui, l’impact très limité de la vidéosurveillance sur l’insécurité ! »
À l’approche de 2020 la poursuite de la fuite en avant de certaines municipalités, démontre que la science à peu d’effet, sur des postures électoralistes.
Pour contre-argumenter, les fervents adeptes de l’utilisation de caméras évoquent le fait que le manque d’efficience régulièrement pointée – hier comme aujourd’hui – est, entre autres, lié au fait que cette dernière gagnerait en efficacité si elle était couplée à de la reconnaissance faciale. C’est désormais chose faite en France, mais pour l’instant de façon parcimonieuse. Pour rappel, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a autorisé la reconnaissance faciale avant d’embarquer dans l’Eurostar à la gare du Nord. Dans la même dynamique « pour fluidifier (Ndla : argument mis en avant) les contrôles aux frontières », des sas à reconnaissance faciale sont opérationnels depuis juillet 2018 dans les aéroports parisiens.
Pour autant, la CNIL n’est pas favorable à la généralisation de la reconnaissance faciale dans tous les lieux publics :
« Si cette technologie n’en est qu’à ses balbutiements, il importe de comprendre que son caractère intrusif est croissant puisque la liberté d’aller et venir anonymement pourrait être remise en cause. »
Les similitudes et analogies entre l’ouvrage « 1984 » et notre société contemporaine pourraient se multiplier. Mais je doute que le lecteur lise une chronique de 300 pages.
L’entretien de la peur fait recette pour la surveillance dans une époque où, tant pour le politique que pour certains secteurs d’activités liés à la protection des personnes : ici pour légitimer des lois controversées, là pour multiplier les offres de produits sécurisants le citoyen chez lui. Si nous pouvons pointer des arguments fallacieux niant les conclusions d’experts sur des dérives d’usages à fin électoraliste, nous ne pouvons pourtant pas nier la recrudescence des cambriolages. Depuis le 1er janvier dernier (Ndla 2019), les cambriolages en France ont augmenté de 1,15 %, passant ainsi de 114 917 à 116 237 faits qui ont été dénoncés auprès des autorités.
Dans ce contexte, le marché de la vidéosurveillance (partie intégrante du domaine de la sécurité) se porte bien. Comme le souligne une étude de MSI publiée en mai 2019, cette croissance – même si elle se ralentie du fait du non renouvellement d’usagers déjà équipés – est « favorisée par le maintien d’un sentiment d’insécurité important, mais également par la diminution de la réticence à l’installation de caméras tant dans l’espace public que privé ».
En 2020, « 1984 » n’a pas perdu son statut de chef d’œuvre. Celui de dystopie est devenu plus discutable. La dystopie est presque devenue réalité, mais une dystopie… dysfonctionnelle : problématique de tri des données récoltées, de l’efficacité des outils de surveillance… avec la complicité des citoyens (par exemple, le développement de la possibilité de vendre ses données personnelles). Pour combien de temps le sera-t-elle encore (dysfonctionnelle) ? Je l’ignore. De là ou George Orwell observe Londres, la ville où il est décédé le 21 janvier 1950 et qui compte aujourd’hui plusieurs centaines de milliers de caméras, ce dernier doit songer aux vers d’Alfred de Musset (La Coupe et les lèvres, 1831) :
Je hais comme la mort l’état de plagiaire ;
Mon verre n’est pas grand, mais je bois dans mon verre
C’est bien peu, je le sais, que d’être homme de bien,
Mais toujours est-il vrai que je n’exhume rien. »
SECURITE La Quadrature du Net, la Ligue des droits de l’Homme, CGT Educ’Action des Alpes-Maritimes et la Fédération des conseils de parents d’élèves s’associent. Le mouvement entend « résister à la surveillance totale de nos villes et de nos vies ».
Dans une petite salle sans fenêtre du centre-ville de Nice, ça cause « big data », « smart-city » et « intelligence artificielle ». Des mots qui, accolés aux questions de sécurité, inquiètent les responsables de la Quadrature du Net, de la Ligue des droits de l'Homme, de la FCPE 06 et de la CGT 06. Ces quatre organisations lancent « Technopolice », une campagne « contre la surveillance technologique de l’espace urbain à des fins policières ». Le mouvement entend « résister à la surveillance totale de nos villes et de nos vies ».
Si le collectif Technopolice a choisi Nice pour lancer sa campagne, ce n’est pas vraiment un hasard. C’est ici que la reconnaissance faciale a été expérimentée lors du carnaval et qu’un lycée va tester les portiques intelligents. C’est aussi dans la capitale azuréenne que la détection des émotions dans le tram est en projet et que le programme Safe-city met en relation toutes ces données.
« On a constaté un développement de ces dispositifs de surveillance sans vraiment de contrôle, sans aucun débat public, sans réflexion sur les droits fondamentaux, explique Martin Drago de la Quadrature du Net. Les questions de libertés ne sont pas assez abordées. Or, on ne va pas sortir manifester dans la rue de la même façon si on sait qu’on va être identifié. La notion de consentement, la finalité du traitement de nos données, l’anonymisation des données personnelles sont des questions importantes. »
Contactée, la ville de Nice n’a pas souhaité réagir.
« Il y a toujours ce flou »
Ces quatre associations s’étaient déjà réunies. C’était en février pour une procédure commune. Ensemble, ils ont saisi le tribunal administratif pour s'opposer à l’expérimentation de la reconnaissance faciale dans les lycées de la région Sud.
Désormais rassemblées en collectif, elles ont créé un site web avec un forum, une base de données documentaires et une plateforme afin de coordonner les recherches et les actions autour de la « surveillance technologique ». « On dénonce l’opacité de ces projets. Qu’est-ce que ça va donner ? Quand ça va commencer ? On ne comprend pas, affirme Martin Drago. Il y a toujours ce flou où c’est à nous d’aller creuser pour savoir ce qui va se passer. » Technopolice a déjà tracté devant le lycée Ampère de Marseille, toujours au sujet des portiques de sécurité.
Le collectif s’inquiète de la confidentialité et de la marchandisation des données. « On est convaincus que les enfants sont de futurs citoyens, pointe Laetitia Siccardi de la FCPE 06. La question des libertés fondamentales n’est pas à mettre de côté. Il faut que nos enfants soient conscients qu’ils ont des libertés et que c’est précieux. »
Microsoft clarifie l'écoute humaine d'enregistrements audio de Cortana et pour Skype avec son service de traduction. Une clarification mais pas d'interruption.
Comme Amazon, Apple, Google et plus récemment Facebook, Microsoft a aussi été épinglé pour des écoutes par des sous-traitants humains d'enregistrements audio de Cortana ou encore avec le service de traduction de Skype.
Il est surtout reproché à toutes ces entreprises technologiques le fait qu'elles n'ont pas spécifié de manière claire que des humains pouvaient ainsi être à l'écoute.
Afin de contribuer à l'amélioration de systèmes d'intelligence artificielle, une collecte et l'utilisation de certaines données vocales n'étaient pas cachées, et avec une possibilité de contrôle de l'utilisateur. Sauf qu'il n'était pas fait mention de manière explicite du recours à des sous-traitants à oreille humaine.
Chacun à leur manière, Amazon, Apple, Google et Facebook ont déjà réagi à la suite des révélations. Des justifications, mais aussi une mise en pause de ce " système d'écoute " pour Apple, Google et Facebook, tandis qu'Amazon propose de nouvelles options et améliore son information sur le sujet.
Microsoft ne fait pas de pause, mais a mis à jour sa politique en matière de confidentialité afin de la clarifier. Que ce soit pour Cortana ou pour le service de traduction sur Skype, on peut désormais lire une même tournure de phrase. C'est le deuxième paragraphe ci-dessous qui est nouveau :
" Lorsque vous parlez à Cortana ou à d'autres applications utilisant des services vocaux Microsoft, Microsoft enregistre une copie de vos enregistrements vocaux (à savoir, vos données vocales) pour aider nos moteurs de reconnaissance à mieux vous comprendre et optimiser votre expérience avec d"autres services de reconnaissance vocale personnalisés qui vous aideront à trouver ce que vous recherchez.
Cela peut inclure la transcription des enregistrements audio par des employés et fournisseurs Microsoft, sous réserve des procédures conçues pour hiérarchiser la confidentialité des utilisateurs, y compris les étapes de désidentification des données, nécessitant des contrats de non-divulgation avec les fournisseurs et leurs employés, et demandant aux fournisseurs de respecter les strictes normes de confidentialité définies dans la législation européenne et ailleurs. "
Microsoft propose un outil pour le contrôle de la confidentialité. À Motherboard, un porte-parole du groupe de Redmond a indiqué : " Nous avons mis à jour notre déclaration de confidentialité et nos foires aux questions (FAQ) sur nos produits afin de les rendre plus claires. Nous continuerons d'examiner d'autres mesures que nous pourrions prendre. "
Un décret du gouvernement a officialisé le développement d’une application mobile d’authentification d’identité. Baptisée «AliceM», elle fait appel à un dispositif de reconnaissance faciale. Certaines associations s’inquiètent.
Tous les jours ou presque, des articles sont publiés sur les abus liés à la reconnaissance faciale. Aux États-Unis, elle aide la police à surveiller la frontière mexicaine alors qu’en Chine, elle permet au pouvoir en place de surveiller sa population. En France, le gouvernement souhaite se servir de cette technologie via une application mobile pour authentifier l’identité des citoyens. L’utilisation d’un tel dispositif, très décrié, provoque déjà des levées de boucliers.
● Qu’est-ce que l’AliceM?
AliceM est une application mobile, pour le moment uniquement disponible sur Android. Acronyme d’«Authentification en ligne certifiée sur mobile», elle est actuellement en phase de test. Bientôt, elle permettra de s’identifier grâce à son smartphone pour accéder depuis son mobile aux sites de certains services publics regroupés dans le portail d’accès FranceConnect comme celui des impôts ou celui de l’Assurance maladie.
Cela fait plusieurs années que le ministère de l’Intérieur, à l’origine du projet, travaille sur AliceM et d’autres produits similaires, sans grand succès. En 2012, la création d’une base de données biométriques avec l’appui de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) avait été avortée par le Conseil Constitutionnel qui avait jugé le projet anticonstitutionnel. En septembre 2017, l’actuel locataire de la place Beauvau, Christophe Castaner, évoquait dans une feuille de route sa volonté de «se positionner comme maître d’œuvre de l’élaboration de solutions d’identité numérique», note Le Monde. Le ministre a par ailleurs fait savoir cette année qu’il souhaitait que tous les Français puissent prouver leur identité en ligne d’ici 2020, notamment par AliceM qu’il qualifie dans un rapport sur la cybermenace d’«un des prémices d’une politique publique de l’identité numérique». AliceM a finalement été mis en place via un décret publié le 13 mai dernier. Son principe est simple: elle demande à ses utilisateurs de prouver leur identité en prenant en photo leur passeport ou titre de séjour biométrique mais aussi, via un «système de reconnaissance faciale statique (via une photo) et dynamique (via une vidéo où il faut faire des gestes et des mouvements de tête)».
● Pourquoi ce projet inquiète certaines associations?
Le 15 juillet dernier, ce décret publié le 13 mai dernier a été contesté par une association de défense des libertés numériques, La Quadrature du Net. Cette dernière a déposé un recours au Conseil d’État pour le faire annuler. Elle s’insurge contre le fait que l’utilisateur n’ait pas la liberté de choisir de passer outre le dispositif de reconnaissance faciale pour avoir accès à plusieurs services publics dématérialisés via AliceM. L’association reproche à l’État de ne pas respecter le RGPD (Règlement général sur la protection des données personnelles). Lequel stipule que quand il s’agit d’utilisation de données personnelles, «le consentement ne devrait pas être considéré comme ayant été donné librement si la personne concernée ne dispose pas d’une véritable liberté de choix». La Quadrature du Net s’appuie aussi sur un avis de la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) rendu le 18 octobre dernier sur le projet du gouvernement. «Le gouvernement ne propose pas, en l’occurrence, d’alternative à la reconnaissance faciale pour créer une identité numérique (...) Au regard de ces principes, le consentement ne peut être regardé comme libre et comme étant par suite susceptible de lever l’interdiction posée par le RGPD» explique-t-elle.
La Commission propose de mettre en place des solutions alternatives à la reconnaissance faciale pour garantir un consentement libre comme un face-à-face en préfecture ou un appel vidéo avec un agent de l’ANTS. Des solutions qui n’ont pas été retenues par le gouvernement dans son décret. «Le plus inquiétant dans cette procédure, c’est que nous constatons une perte de pouvoir de la CNIL. Si même le gouvernement ne l’écoute plus, qui va le faire?» s’interroge Martin Drago, juriste au sein de la Quadrature du Net, contacté par Le Figaro. «Proposer des alternatives, c’est le minimum» explique-t-il. L’expert regrette l’absence de prise de conscience de l’opinion et des pouvoirs publics sur le sujet de la reconnaissance faciale alors que déjà plusieurs villes, notamment aux États-Unis, ont décidé de bannir cette technologie.
Imagine you are shopping in your favorite grocery store. As you approach the dairy aisle, you are sent a push notification in your phone: “10 percent off your favorite yogurt! Click here to redeem your coupon.” You considered buying yogurt on your last trip to the store, but you decided against it. How did your phone know?
Your smartphone was tracking you. The grocery store got your location data and paid a shadowy group of marketers to use that information to target you with ads. Recent reports have noted how companies use data gathered from cell towers, ambient Wi-Fi, and GPS. But the location data industry has a much more precise, and unobtrusive, tool: Bluetooth beacons.
These beacons are small, inobtrusive electronic devices that are hidden throughout the grocery store; an app on your phone that communicates with them informed the company not only that you had entered the building, but that you had lingered for two minutes in front of the low-fat Chobanis.
Most location services use cell towers and GPS, but these technologies have limitations. Cell towers have wide coverage, but low location accuracy: An advertiser can think you are in Walgreens, but you’re actually in McDonald’s next door. GPS, by contrast, can be accurate to a radius of around five meters (16 feet), but it does not work well indoors.
Bluetooth beacons, however, can track your location accurately from a range of inches to about 50 meters. They use little energy, and they work well indoors. That has made them popular among companies that want precise tracking inside a store.
Most people aren’t aware they are being watched with beacons, but the “beacosystem” tracks millions of people every day. Beacons are placed at airports, malls, subways, buses, taxis, sporting arenas, gyms, hotels, hospitals, music festivals, cinemas and museums, and even on billboards.
In order to track you or trigger an action like a coupon or message to your phone, companies need you to install an app on your phone that will recognize the beacon in the store. Retailers (like Target and Walmart) that use Bluetooth beacons typically build tracking into their own apps. But retailers want to make sure most of their customers can be tracked — not just the ones that download their own particular app.
So a hidden industry of third-party location-marketing firms has proliferated in response. These companies take their beacon tracking code and bundle it into a toolkit developers can use.
The makers of many popular apps, such as those for news or weather updates, insert these toolkits into their apps. They might be paid by the beacon companies or receive other benefits, like detailed reports on their users.
Location data companies often collect additional data provided by apps. A location company called Pulsate, for example, encourages app developers to pass them customer email addresses and names.
Companies like Reveal Mobile collect data from software development kits inside hundreds of frequently used apps. In the United States, another company, inMarket, covers 38 percent of millennial moms and about one-quarter of all smartphones, and tracks 50 million people each month. Other players have similar reach.
Location data companies have other disturbing tricks up their sleeve. For example, inMarket developed “mindset targeting” techniques that predict when individuals are most receptive to ads. These techniques are based on statistical probabilities calculated through millions of observations of human behavior. Brands like Hellman’s, Heineken and Hillshire Farms have used these technologies to drive product campaigns.
What is an S.D.K.? A Software Development Kit is code that's inserted into an app and enables certain features, like activating your phone's Bluetooth sensor. Location data companies create S.D.K.s and developers insert them into their apps, creating a conduit for recording and storing your movement data.
Location marketing aims to understand “online-offline attribution.” If a Starbucks coffee ad is sent to your email, for example, marketers want to know if you actually went there and bought a coffee. The only way to know is to monitor your online and offline habits at all times.
Beacons are also being used for smart cities initiatives. The location company Gimbal provided beacons for LinkNYC kiosks that provoked privacy concerns about tracking passers-by. Beacon initiatives have been started in other cities, including Amsterdam (in partnership with Google), London and Norwich.
Familiar tech giants are also players in the beacosystem. In 2015, Facebook began shipping free Facebook Bluetooth beacons to businesses for location marketing inside the Facebook app. Leaked documents show that Facebook worried that users would “freak out” and spread “negative memes” about the program. The company recently removed the Facebook Bluetooth beacons section from their website.
Not to be left out, in 2017, Google introduced Project Beacon and began sending beacons to businesses for use with Google Ads services. Google uses the beacons to send the businesses’ visitors notifications that ask them to leave photos and reviews, among other features. And last year, investigators at Quartz found that Google Android can track you using Bluetooth beacons even when you turn Bluetooth off in your phone.
For years, Apple and Google have allowed companies to bury surveillance features inside the apps offered in their app stores. And both companies conduct their own beacon surveillance through iOS and Android.
It should not be lost on the public that Apple created the first Bluetooth system of commercial surveillance. Apple’s chief executive, Tim Cook, recently wagged his finger at the “data-industrial complex.” Unlike other tech giants that monetize surveillance, Apple relies upon hardware sales, he said. But Mr. Cook knew what Apple was creating with iBeacon in 2013. Apple’s own website explains to developers how they can use iBeacon to micro-target consumers in stores.
Companies collecting micro-location data defend the practice by arguing that users can opt out of location services. They maintain that consumers embrace targeted ads because they’re more relevant. Industry players further claim that data is anonymized through techniques that mask the identification of users. Your data may be stored as “ID-67aGb9ac72r” instead of “Jane Doe.” Yet studies have shown that it is relatively easy to deanonymize mobility data. Moreover, the process of “informed consent” fails to protect user privacy. As The Times noted in an investigation into smartphone location tracking, “The explanations people see when prompted to give permission are often incomplete or misleading.”
For informed consent using beacons, you have to first know that the beacons exist. Then, you have to know which places use them, but venues and stores don’t put up signs or inform their customers. You can download an app like Beacon Scanner and scan for beacons when you enter a store. But even if you detect the beacons, you don’t know who is collecting the data. Let’s say you visit Target; it might be collecting data from you, but it might rent its beacons out to other businesses, allowing them to monitor your location. Moreover, some beacons are not secured, so third parties can “piggyback” off public beacons and use them to collect your location. There is no way to know if a store has secured its beacons.
Apple and Google could be tracking you through iOS and Android, but they don’t make their Bluetooth beacon collection methods transparent. There is no easy way to determine which apps on your phone have the beacon location tracking built in.
Even if you did know which companies have access to your beacon data, there’s no way to know what kind of data is collected through the app. It could be your micro-location, dwell time or foot traffic, but it can also include data from the app, such as your name, and your app data can be combined with other data sets compiled about you by data brokers. There is simply no transparency.
To protect yourself from beacons in the short term, you can delete any apps that may be spying on you — including apps from retailers — and shut off location services and Bluetooth where they are not needed. You can also follow The Times’s guide on how to stop apps from tracking your location. For Android users, the F-Droid app store hosts free and open- source apps that do not spy on users with hidden trackers.
Most of our concerns about privacy are tied to the online world, and can feel theoretical at times. But there is nothing theoretical about Bluetooth beacon technology that follows you into retail stores (and other venues) and tracks your movement down to the meter.
Michael Kwet is a visiting fellow at the Information Society Project at Yale Law School, and host of the Tech Empire podcast.
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Ce ne sont là que quelques-uns des moyens ingénieux par lesquels la police de la sûreté de l’Etat – mieux connue sous le nom de Stasi – espionna des individus entre 1950 et 1990, dont beaucoup sont maintenant exposés au musée de la Stasi à Berlin.
À l’heure actuelle, la police allemande – à l’instar de nombreuses forces de l’ordre – souhaite non seulement avoir accès à des données téléphoniques, mais également à des informations recueillies par des assistants numériques tels que Google Home et Amazon Echo.
L'Allemagne prévoit de discuter de cette question la semaine prochaine lors d'une réunion des ministres de l'intérieur. Mardi, un porte-parole du ministère de l'Intérieur a abordé la question lors d'une conférence de presse: "Pour lutter efficacement contre la criminalité, il est très important que les autorités fédérales et des États aient accès aux données collectées par ces appareils".
Cela a déclenché des sonneries d'alarme pour ceux qui surveillent les droits à la vie privée numérique.
"Ils savent que c'est anticonstitutionnel, ce qu'ils vont faire et je suppose que les autorités de protection des données s'impliquent", a déclaré Jeanette Hofmann, professeure de politique Internet à la Freie Universität Berlin et experte de recherche sur Internet et Internet à la société allemande du Bundestag. ,
Le problème du cartel de Tech est ouvert depuis des années
"La maison est toujours considérée comme un lieu sacré par rapport à ce qui se passe en public, la possibilité que tout ce que vous faites à la maison soit surveillé et que les données ne soient mises à la disposition des autorités répressives que sur décision de justice, est assez effrayant. "
L’Allemagne n’est certainement pas le seul pays à s’occuper de la question de la délimitation de la confidentialité des données numériques. Cependant, en raison de son histoire, l'Allemagne est particulièrement sensible au droit à la vie privée et a adopté certaines des lois les plus strictes au monde en matière de protection de la vie privée.
Sven Herpig, expert en cybersécurité, a déclaré que la politique allemande prenait traditionnellement en charge le cryptage pour cette raison.
"La politique que nous avons au cours des 20 dernières années dit:" Nous ne compromettons pas le cryptage, nous ne l'affaiblissons pas, nous ne faisons pas de backdoors, les forces de l'ordre doivent trouver un autre moyen d'accéder aux données ", a-t-il déclaré.
"Vous devez regarder l'expérience historique de la surveillance NS, puis nous avons une longue histoire contre la surveillance gouvernementale."
Toutefois, avec les assistants numériques tels que Google Home ou Amazon Echo, de nombreuses données collectées ne sont pas stockées en Allemagne, mais à l'étranger, notamment aux États-Unis. Jeudi, l'Union de sécurité de la Commission européenne s'est réunie pour évaluer les propositions permettant à tout membre, y compris l'Allemagne, d'accéder aux preuves numériques recueillies dans un autre pays.
"Trop longtemps, les criminels et les terroristes abusent de la technologie moderne pour commettre leurs crimes", a déclaré Julian King, commissaire de l'Union pour la sécurité, dans un communiqué. "En établissant des normes internationales pour l'accès aux preuves électroniques, nous franchissons un pas supplémentaire vers la fermeture de la zone dans laquelle ils exercent leurs activités en garantissant que les services répressifs puissent plus efficacement enquêter sur eux et les poursuivre, tout en respectant pleinement les droits fondamentaux. ".
Preuve numérique comme preuve pénale
Selon la Commission européenne, environ 85% des enquêtes pénales nécessitent des preuves numériques et dans 2/3 de ces cas, les preuves doivent être obtenues auprès de fournisseurs de services externes, en particulier aux États-Unis.
Cependant, les groupes allemands de défense des droits numériques ont critiqué les propositions de l'UE en soulignant que les lois strictes en matière de protection des données en Allemagne peuvent être mises à mal et ont soutenu que les propositions actuelles ne tiennent pas compte du fait qu'un crime dans un pays est nécessairement un crime dans un autre est vu.
Le nouveau plan de Facebook ne protège pas votre vie privée et la FTC ne
"Un tel régime n'aurait de sens que s'il existait un consensus au sein de l'UE ou au niveau international sur ce qui constitue un crime et que les mêmes garanties procédurales s'appliquent", a déclaré Elisabeth Niekrenz de Digital Society, un organisme de surveillance des droits numériques. "Si l'avortement est une infraction pénale dans un État et pas dans un autre, les fournisseurs de services de cet État ne devraient pas être contraints de prouver de tels événements."
Expériences de surveillance personnelle
Les Allemands savent par expérience à quel point la surveillance de masse peut être mal utilisée. Aujourd'hui, un citoyen allemand peut voir dans ses archives personnelles dans les archives de la Stasi les informations que la police a recueillies sur lui et sa famille, et utiliser ces informations pour harceler les dissidents et contrôler les simples citoyens.
Pour les appareils numériques, toutefois, ce sont les entreprises privées qui réduisent les données collectées grâce à cette surveillance dans le monde entier. Maintenant, prévient le professeur Hofmann, les gouvernements dans le contexte des enquêtes pénales veulent également avoir accès à cette richesse de données. Il incombe donc aux activistes des droits numériques de défendre leur cas devant les tribunaux.
L'agence nationale de sécurité arrête son programme de surveillance
"C’est un problème international. Nous sommes scandalisés d’avoir entendu nos conversations privées chez nous, mais le gouvernement dit qu’il en fera de même", a déclaré Hofmann.
"Nous avons privatisé de nombreuses infrastructures et transféré le pouvoir décisionnel aux marchés. Ainsi, dans le passé, lorsque les citoyens estimaient que le marché abusait de ces pouvoirs, ils pouvaient se tourner vers les gouvernements et exiger une réglementation, mais le système judiciaire reste la seule alternative C'est un gros problème pour toute démocratie. "
Le décret du fichier des Titres éléctroniques sécurisés (TES), ayant fait l'objet de nombreuses requêtes en annulation auprès du Conseil d'Etat depuis sa parution fin 2016, a été validé par ce dernier le 18 octobre. Regroupant les informations de plus de 66 millions de Français et à l'époque pointé du doigt par la CNIL, le secrétariat d'Etat au Numérique ou encore l'ANSSI, ce fichier ne constitue pas une « atteinte disproportionnée » à la vie privée selon le Palais Royal.
Le Conseil d’État n’a eu cure de toutes les requêtes adressées contre le décret « autorisant la création d'un traitement de données à caractère personnel relatif aux passeports et aux cartes nationales d'identité ». L’institution a rejeté ces demandes d’annulation de la base de données des Titres électroniques sécurisés (TES) juge, dans un arrêt, que sa création ne constitue pas une « atteinte disproportionnée » à la vie privée.
Lancée officiellement début novembre 2016 suite à ce fameux décret pris le 28 octobre précédent, la base visant à centraliser les données personnelles des 66,6 millions de Français (identité, couleur des yeux, domicile, photographie ou encore empreintes digitales) en a fait bondir plus d’un. Mis en œuvre sous le mandat de François Hollande, TES devait apporter des « simplifications administratives » selon le ministre de l'Intérieur de l’époque, Bernard Cazeneuve.
Un décret passé en douce
A l’époque, même la Secrétaire au Numérique, Axelle Lemaire, était montée au créneau, ainsi que le Conseil national du Numérique qui, en dehors de critiquer le fait que le décret ait été pris en plein week-end de la Toussaint, alertait sur de potentiels problèmes de sécurité. L’Anssi et la Dinsic avaient également fait part de leur inquiétude à ce sujet en janvier 2017 dans un rapport adressé à Bruno Leroux, remplaçant de M. Cazeneuve à l’Intérieur.
Ces vives réactions n’avaient pas empêché le lancement de la base de données, en test dans un premier temps en Bretagne et dans les Yvelines, puis dans tout l’Hexagone fin mars 2017. Bien que les Français ne peuvent en principe pas s’opposer à la conservation de leurs données dans cette base, un décret paru en mai 2017 les autorise néanmoins à pouvoir refuser la numérisation et l'enregistrement de leurs empreintes digitales dans TES lors de la création d’une carte d’identité... Au moins une information qui ne sera pas à la merci des pirates.
La Loi de Renseignements et le Fichier TES sont passés par là et je sens que ça ne tourne plus rond. Tous les appareils de contrôle, légaux ou non, se multiplient partout sur la planète, je n’aime pas l’idée. Les états ont grignoté l’espace et reprennent la main à pas feutrés. On bannit pour une origine ou pour une opinion, sans subtilité. Dans certains pays, et pas des dictatures, on vous demande d’ouvrir votre Facebook ou même de donner vos mots de passe. J’ai en magasin quelques anecdotes à ce sujet qui font peur. Je n’ai pas envie, jamais, de justifier des opinions et des propos à qui que ce soit, ici ou ailleurs. Alors je le fais une bonne fois pour toutes aujourd’hui et je dis adieu à 31 500 tweets.
Les temps ont changé depuis juillet 2007, date à laquelle je me suis lancé sur Twitter. 31 500 tweets plus tard, quiconque voudrait me faire dire un truc pourrait le faire sans difficulté. C’est la guerre des mots et des GIFs, la bataille du temps qui ne passe plus. Ce que vous dites un jour est gravé pour toujours, vos propos s’empilent et s’empalent sur le mur de l’actu chaude sans aucune exigence de vérité. Ce qui est dit est dit, cochon qui s’en dédit, peu importe le sens, le contexte, le droit à la connerie, au changement d’opinion ou à cette sublime contradiction qui fait de nous ce que nous sommes. Certes, personne ne me cherche de poux aujourd’hui, mais dans six mois, deux ans ou même dix? Et vous?
Je n’ai plus confiance
Ni dans les techno-corporations dirigées par des solutionnistes aux ambitions floues, illégitimes et hors contrôle. Ni dans les états qui, profitant de nos peurs, placent leurs mouchards dans nos réseaux. La ficelle est fine pour l’instant, mais elle grossit. Je ne crois pas à la neutralité de ceux qui nous observent. Il y a derrière chaque action une intention, et je ne sais rien des intentions de nos dirigeants actuels et futurs. Nous avons offert sur un plateau aux prochains gouvernants les outils de notre soumission et ça me tend. Je ne crois pas non plus à l’inviolabilité des serveurs. D’ailleurs, je sais bien que quelque part sur cette planète mes Tweets sont gravés et dupliqués, pour toujours.
Parano? Pfff… Plus envie d’argumenter, faites comme vous le sentez.
Les règles du jeu ont changé. Loin de moi l’idée de supprimer mon compte, mais le temps de l’innocence est révolu.
PS: à la demande générale. Pour sauvegarder ses tweets, vous pouvez le faire sur Twitter, dans paramètres, et vous téléchargez un fichier. Pour supprimer vos Tweets en masse il y a, entre autres, l’appli payante DLTTR. Vous pouvez choisir de supprimer les tweets de l’heure, du jour, du mois, de l’année ou tous vos tweets. Cela m’a pris 16 minutes pour 31 500 tweets.