Le canton inhabité d’Entremont, de forme rectangulaire, se situe dans la réserve faunique La Vérendrye, en Abitibi-Témiscamingue, un peu au nord du lac Cocôwan, une des composantes du réservoir Dozoi, et à environ 20 km à l’est de la baie Kawastaguta du Grand lac Victoria. Son territoire, au relief plutôt accidenté, contient bon nombre de petits plans d’eau, dont le lac Tesserie. Il est également irrigué par deux rivières importantes, la Canimiti et la Chochoucouane, qui créent un confluent au centre du territoire. Depuis le 20 décembre 1955, il porte le nom d’un gentilhomme normand, Philippe Moius d’Entremont, dont les origines se trouveraient toutefois en Savoie. Les titres de noblesse de la famille d’Entremont, ayant émigré en Normandie au XVIe siècle, remonteraient, selon certains, au XIe siècle. D’autres affirment cependant que c’est Louis XIV (1638-1715) qui fit de Philippe Mius le sieur d’Entremont. Quoi qu’il en soit, il existe aujourd’hui en France deux communes appelées Entremont, et toutes deux se trouvent dans l’ancienne province de Savoie, définitivement incorporée à la France en 1860 ; les deux tiennent leur nom de leur situation géographique entre de hautes montagnes. L’une d’entre elles, à 791 m d’altitude au cœur des Alpe françaises, s’étend sur le Borne, dans le département de la Haute-Savoie, à quelque 25 km au nord-est d’Annecy, et à environ 40 km au sud-est de Genève, en Suisse. Les touristes y découvriront notamment les ruines d’un monastère du XIIe siècle, érigé en Abbaye en 1154 mais supprimé en 1772, ainsi qu’une église, construite également au XIIe siècle, mais profondément modifiée jusqu’au XIXe siècle.
L’autre commune, Entremont-le-Vieux, sise à 840 mètres d’altitude, se situe sur le Cozon, dans la partie ouest de la Savoie, à une quinzaine de kilomètres au sud de Chambéry, préfecture de département. Là, on peut y voir les ruines d’un château. Le sieur d’Entremont naquit vers 1609, probablement à Cherbourg, en Normandie. En 1650 ou 1651, il fut amené en Acadie par son ami, le nouveau gouverneur Charles de Saint-Étienne de La Tour, comme lieutenant-major et commandant des troupes du roi. Deux ou trois ans plus tard, Entremont reçut, en récompense pour ses services, le fief Pobomcoup (aujourd’hui Pubnico, en Nouvelle-Écosse) à titre de baronnie.
Il assuma plusieurs fonctions dans la colonie, devenant même, vers 1670, procureur du roi, puis il s’occupa du développement des terres qui lui avaient été attribuées. Il mourut en Acadie au début du XVIIIe siècle. Sa descendance demeure nombreuse en Nouvelle-Écosse, et tout particulièrement, à Pubnico.
Au Québec, en plus d’un canton, le toponyme Entremont désigne un lac, situé précisément dans le canton d’Entremont, sur le cours de la rivière Canimiti, et des voies de circulation, à Sainte-Foy, Saint-Marc-des-Carrières et Amos.
Proclamé en 1966, le canton d’Entremont est situé au nord du réservoir Dozois, dans la réserve faunique La Vérendrye. Ce canton de présente comme un ensemble hydrographique compliqué où l’on distingue à peine la rivière Chochoucouane et la rivière Canimiti, au sein de très nombreuses étendues d’eau. Son relief, accidenté et brisé, varie entre 350 et 537 mètres d’altitude. En dénommant ainsi cette unité géographique en 1955, on a voulu honorer la mémoire du Normand Philippe Mius ou Muis (né vers 1609 et mort vers 1700). En 1650 ou 1651, il est amené en Acadie par le nouveau gouverneur Charles de Saint-Étienne de La Tour comme lieutenant-major et commandant des troupes du roi. Deux ou trois ans plus tard, il reçoit en récompense le fief Pobomcoup (Pubnico, Nouvelle-Écosse), à titre de baronnie, et y construit son château. Cette baronnie est demeurée un bien familial jusqu’à la dispersion des Acadiens, en 1755. Les descendants qui portent ce nom d’Entremont sont encore nombreux.
Noms et lieux du Québec, ouvrage de la Commission de toponymie paru en 1994 et 1996 sous la forme d’un dictionnaire illustré imprimé, et sous celle d’un cédérom réalisé par la société Micro-Intel, en 1997, à partir de ce dictionnaire.
(Source : La France et le Québec. Des noms de lieux en partage. Commission de toponymie du Québec, les Publications du Québec, l’Association française pour l’information géographique, 1999).
Ingénieur de formation, Jean-Yves Vanier a travaillé des dizaines d'années dans la pétrochimie, à Edmonton, dans l'Ouest canadien. Ce Québécois d'origine a finalement décidé de tout lâcher pour se lancer dans la généalogie, sa passion, et il fait désormais pousser les branches généalogiques de sa famille, comme de celles de ses clients.
Au premier étage de la Cité Francophone d'Edmonton, une petite porte discrète se cache au bout d'un couloir. Un écriteau indique : « Société généalogique du Nord-Ouest ». Trois ordinateurs, deux grandes tables et des étagères garnies de bouquins remplissent les lieux. Il n'y a pas foule : trois bénévoles passionnés discutent autour d'une table, deux femmes et un homme.
Michèle Fortin, Doriane Vincent et Jean-Yves Vanier pourraient presque dire qu'ils sont de la même famille, car ils ont tous de la famille originaire du Québec. « On se trouve des ancêtres communs entre francophones, facilement. Au Québec, l'endogamie était très importante, à l'origine, il n'y avait que quelques milliers de colons en Nouvelle-France ! En cadeau à mes parents, je leur ai même trouvé un cousin à la 11e génération », s'amuse le généalogiste, 52 ans, de long cheveux gris encadrant des petites lunettes rectangulaires.
Michèle renchérit avec un grand sourire : « On a même des vedettes dans nos arbres généalogiques ! Moi, je suis une cousine très lointaine avec Céline Dion – comme beaucoup de monde, et j'ai même le Premier ministre Justin Trudeau, à quatre générations, ce n'est pas si loin. »
Contrairement à beaucoup de généalogistes, Jean-Yves n'a pas découvert ses origines grâce à sa famille. Originaire de Gatineau, ville limitrophe d'Ottawa, dans l'Est canadien, il suit des études d'ingénierie, en français puis en anglais, et obtient un poste dans la pétrochimie, à Edmonton, en Alberta. « J'avais fait un stage avec une compagnie et ils m'ont offert un poste en 1995. J'étais le premier de la famille sur plusieurs générations à partir pour l'ouest », décrit le généalogiste. Une dizaine d'années plus tard, sa mère reçoit, à la maison familiale de Gatineau, une lettre qu'elle lui transfère. « C'était une lettre qui disait : je suis généalogiste, je m'appelle Noël Vanier de Laval, et si vous me donnez l'information de votre famille immédiate, je vous envoie votre arbre généalogique », se rappelle Jean-Yves.
Curieux, il accepte, transmet des informations sur sa famille et reçoit quelques semaines plus tard une enveloppe bien plus épaisse. Là, Jean-Yves est impressionné : « C'étaient de très grandes feuilles. J'étale tout ça par terre, et ça me donne un arbre avec ma famille, de mon nom, jusqu'au premier Guillaume Vanier, originaire d'Honfleur, arrivé en 1665. J'ai appris que j'étais cousin avec le gouverneur général Georges Vanier, par exemple ! »
Pour remercier ses proches qui l'ont aidé, Jean-Yves décide en 2006 de créer un site internet avec un objectif : retracer l'intégralité de ses ancêtres. « Aujourd'hui, il est énorme, à l'époque, c'était tout petit. Google l'a référencé, puis un autre généalogiste, Vanier m'a contacté pour me dire que je pouvais ajouter une autre branche à son arbre, et encore un autre. C'est devenu un site familial de toute l'Amérique du Nord. » Pendant un temps, quatre Vanier, généalogistes amateurs ou professionnels, travaillent ensemble. Aujourd'hui, l'arbre numérique compte des milliers d'ancêtres.
Mais Jean-Yves ne s'arrête pas là, il commence à sérieusement se plonger dans le domaine et poursuit des recherches en amateur. Après 25 ans dans la pétrochimie, il craque : « J'ai fait un burn-out et je me suis dit que je devais m'arrêter. J'avais accumulé assez d'argent, et mon épouse, qui travaillait encore, m'a rappelé qu'elle avait eu cinq ans de congés pour faire des études, et que je pouvais le faire à mon tour. » La pandémie de coronavirus le lance définitivement. Il devient professionnel en se formant en ligne, obtient des diplômes en généalogie. « Je suis plus heureux, moins stressé. La rémunération est moins bonne, mais c'est un travail très valorisant : je rends les gens heureux. Avant, tu sais, je fabriquais du plastique », souffle le professionnel.
Depuis trois ans, il a lancé son entreprise, Vos Aïeux. Ce qu'il aime, c'est la diversité des histoires. Les Québécois, souvent, veulent connaître leurs origines en France, qui remontent pour certains au XVIe siècle. Les Acadiens, une population qui a été déportée après la conquête anglaise, veulent plutôt savoir ce qu'ont vécu leurs ancêtres à cette époque. Certaines trajectoires le touchent beaucoup : « J'avais notamment retracé l'histoire de deux Acadiens déportés en France, à Saint-Malo, et qui étaient morts, l'une durant la traversée et l'autre peu de temps après, laissant derrière eux des orphelins. »
Certaines recherches, les plus simples et directes, ne lui prennent que quelques heures, qu'il facture moins de cent dollars canadiens, une soixantaine d'euros. D'autres en revanche… « Un monsieur m'a engagé pour plusieurs années. Il veut tout savoir, toutes les histoires de tous ses ancêtres. Il doit bien dépenser près de 20 000 dollars ! Il dit que c'est un legs pour ses enfants, il veut même que je lui écrive un livre avec toutes les anecdotes que j'aurais trouvées », décrit Jean-Yves, encore étonné.
En tout cas, Jean-Yves Vanier n'est pas près de se lasser. Chaque présentation, qu'il fait devant des familles qui l'ont engagé, lui rappelle pourquoi il a choisi ce métier : « Les gens adorent ça. Quand je fais mes présentations, tout le monde est heureux, ils sont émerveillés par leurs propres histoires, qu'ils ne connaissaient pas. »
La flotte de 1670 à destination de Québec est composée de quatre navires : trois de La Rochelle (La Nouvelle-France, La Sainte-Hélène et Le Saint-Pierre) et un de Dieppe (Le Saint-Jean-Baptiste).
Le navire La Nouvelle-France (250 tx) est la propriété du marchand rochelais Pierre Gaigneur qu’il a acquit, le 5 avril 1667[1], avec quatorze pièces de canon, des marchands Gédéon Bion, Daniel Brians et Paul Bion en compagnie pour la somme de 15 700lt.
TROIS-RIVIÈRES — Vous vous intéressez à vos ancêtres? Vous vous passionnez peut-être d’histoire ou de sociologie? Vous êtes enseignant et vous cherchez de nouveaux moyens de mettre un peu de piquant dans vos cours? Des chercheurs de l’UQTR, de l’UQAC, de l’Université de Montréal et de l’Université Laval viennent de mettre en ligne un nouveau portail, dont une partie est accessible au grand public et l’autre, réservée exclusivement aux scientifiques, qui permet d’en apprendre plus que jamais sur les générations passées du Québec.
Appelé Infrastructure intégrée des microdonnées historiques de la population du Québec (XVIIe - XXe siècles) ou IMPQ, ce nouveau portail regroupe des ensembles de données issues du dépouillement des recensements nominatifs canadiens et des registres d’état civil du Québec. [L’adresse pour le trouver est]( https://impq.cieq.ca).
Ce qu’il y a de différent, par rapport aux simples données généalogiques, c’est que ce portail fait converger une foule de données extrêmement intéressantes, que ce soit pour les chercheurs, amateurs ou professionnels, en histoire, en sociologie et autres domaines connexes.
On trouve en effet bien plus que le nom des parents, époux, enfants, frères, sœurs, cousins et cousines, mais également leur lieu de naissance, le métier que la personne pratiquait, son salaire, les études qu’elle a faites, à quel âge elle allait à l’école, la ou les langues qu’elle parlait, si elle avait des domestiques à son service de même que le nom de ces derniers, les endroits où elle a habité de même que sa religion.
Comme le fait valoir Claude Bellavance professeur en études québécoises à l’UQTR et membre régulier du Centre interuniversitaire d’études québécoises (CIEQ), qui a contribué à ce projet, la base de données ne fait pas état seulement de personnes ou familles illustres, mais de tout le monde qui a été recensé.
« D’après des collègues, au Canada anglais, à peu près rien n’existe de ce genre-là »
— Claude Bellavance
«Si vous prenez les anciens journaux, la littérature et autres sources, généralement, ce sont les gens connus dont on parle», souligne-t-il. Cette fois-ci, on pourra s’intéresser aux gens en général. «C’est d’aller chercher l’histoire de tout le monde à partir du petit peu de traces laissées par les gens ordinaires. Peu de sources permettent cela», explique le chercheur qui entend s’intéresser également aux anciens rôles d’évaluation.
Il faut vraiment visionner la vidéo de neuf minutes, sur la page d’accueil, afin d’apprendre à naviguer sur le portail et en tirer le meilleur profit.
Le portail donne accès, en tout, à quelque 12 millions de mentions d’individus enregistrés entre 1621 et 1914.
«On compte quelque 300 millions de liens familiaux», précise le professeur Bellavance. Un jumelage des recensements du Canada permet de suivre les personnes durant cette période. Les internautes qui désirent s’inscrire peuvent importer des fichiers Excel et émettre des commentaires aux administrateurs du portail.
La section réservée aux scientifiques donne également accès aux données de l’état civil qui, elles, ne sont pas publiques en ligne. C’est l’équipe de l’IMPQ qui évaluera à qui cet accès peut être accordé.
Les données accessibles sur ce portail couvrent les villes de Québec et Trois-Rivières ainsi que le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Gaspésie et la Côte-Nord. Le portail contient plus de 180 000 fiches de ménages de recensement.
Le projet de l’UQTR est déjà reconnu au niveau international, indique le professeur Bellavance. «D’après des collègues, au Canada anglais, à peu près rien n’existe de ce genre-là», dit-il.
Dans ce projet qui implique plusieurs universités, l’UQTR a pris la responsabilité de la section recensement. Les mariages ont été faits par Chicoutimi à l’aide du projet BALSAC pour tout le Québec depuis le XVIIe siècle.
Notons que le portail ne tient pas encore compte des gens de la région de Shawinigan. Une partie de la Rive-Sud, au Centre-du-Québec (Victoriaville et Drummondville, Saint-Grégoire, Pierreville, Warwick), sera faite et à Trois-Rivières, le territoire couvert va de Baie-Jolie à Cap-de-la-Madeleine.
«Pour les Trifluviens, c’est drôlement intéressant parce qu’on a entré toutes les familles, tous les individus qui ont vécu à Trois-Rivières depuis 1851 jusqu’à 1911» (jusqu’en 1921 dès 2019), précise le professeur Bellavance.
Une ruelle de la commune de Longueil dans le Pays de Caux (580 hab) dont est originaire Charles Le Moyne qui a donné le nom à la commune homonyme de Longueuil au Québec (240 000 hab).
Avec l’avènement d’Internet, la recherche généalogique est devenue plus accessible et se démocratise de plus en plus. Preuve en est avec le développement récent de sites dédiés à la généalogie (Ancestry, Geneanet, MyHeritage, etc.). Au Québec, elle connaît un véritable engouement et la création d’émissions télévisées qui mettent en scène des personnalités québécoises en quête de leurs origines en est le meilleur exemple. D’ailleurs, l’affirmation de l’identité québécoise (où le français est la seule langue officielle) au sein d’un Canada majoritairement anglophone n’est sûrement pas étrangère à cette activité.
Depuis quelques années, on constate en France l’émergence d’un tourisme généalogique québécois. Pourtant, cette nouvelle forme de tourisme reste confidentielle alors que son potentiel de développement économique ne serait pas négligeable à l’échelle locale, notamment pour les territoires ruraux qui ont vu partir bon nombre de pionniers. Alors, le tourisme généalogique peut-il répondre aux enjeux de redynamisation de ces campagnes qui sont de plus en plus vieillissantes et de moins en moins attractives ? Voici quelques éléments d’éclairage avec l’exemple de la région normande où ses nombreux pionniers ont laissé une descendance prolifique au Québec et dont le potentiel touristique généalogique est encore peu exploité par les acteurs territoriaux.
La maison ancestrale de Jean Giguère à Tourouvre-au-Perche (Orne), ancêtre de tous les Giguère d’Amérique du Nord. angelanoelle/Flickr
L’immigration vers la Nouvelle-France : un pan méconnu de l’histoire française
Après la découverte de l’actuel Québec par Jacques Cartier en 1534, le Royaume de France prend possession des lieux et fonde la Nouvelle-France. Après plusieurs tentatives avortées, la campagne de colonisation initiée par Samuel de Champlain en 1608 puis par la Compagnie des Cent-Associés en 1627 – notamment motivée par le commerce de fourrures – est la bonne. Dès lors, plusieurs centaines de pionniers principalement originaires des provinces de Normandie, du Perche (dont son territoire sera intégré en partie à la Normandie en 1789), d’Aunis et de Saintonge (correspondant actuellement à l’ex région Poitou-Charentes) partent défricher ce nouveau territoire dans l’espoir d’une vie meilleure.
Plaque honorifique en l’honneur des ancêtres Hamel du Québec et d’Amérique du Nord dans l’église Saint-Jacques de Dieppe (Seine-Maritime). Philippe Aubry/Flickr
Par la suite, plus de 800 femmes appelées « Filles du Roy » sont envoyées en Nouvelle-France pour se marier et fonder une famille avec les hommes sur place. Elles proviennent généralement d’orphelinats ou d’hôpitaux des villes de Dieppe, La Rochelle, Paris ou Rouen et sont âgées de 15 à 30 ans. La population de la Nouvelle-France doublera rapidement après l’arrivée de ces jeunes femmes et une nouvelle vague de nouveaux migrants de moindre importance viendra par la suite s’y installer au XVIIIe siècle. Par conséquent, il est fortement probable aujourd’hui qu’un québécois d’origine « canadien-français » ait plusieurs ancêtres parmi ces pionniers du XVIIe et XVIIIe siècles.
Plus de deux millions de Québécois porteraient un nom de famille hérité d’un ancêtre normand
Parmi les dix noms de famille les plus portés actuellement au Québec, quatre d’entre eux proviennent exclusivement d’ancêtres originaires de l’actuelle Normandie (Tremblay, Gagnon, Côté et Gagné) et cinq d’entre eux en contiennent partiellement (Roy, Gauthier, Morin, Lavoie et Fortin). Citons le plus prolifique d’entre eux, Pierre Tremblay, originaire de Randonnai (Orne) et dont son nom est désormais porté par plus de 80 000 québécois avec une descendance estimée à 150 000 personnes en Amérique du Nord. Pour l’anecdote et pour bien mesurer la descendance laissée notamment par les percherons au Québec, le géographe Élisée Reclus disait de la commune de Tourouvre (Orne) qu’elle fut « le lieu d’Europe qui a contribué, pour la plus grande part, au peuplement du Nouveau Monde ». Pas étonnant que cette commune accueille depuis 2006 le Musée de l’émigration française au Canada.
Distribution des immigrants (masculin et féminin) en Nouvelle-France par province d’origine. (Charbonneau et Guillemette, 1994)
La Normandie et l’ancienne province du Perche ont fourni 843 des 3303 individus partis peupler la Nouvelle-France (voire carte ci-dessus), soit environ un quart du contingent français. Mais d’après mes estimations personnelles à partir de diverses sources d’informations (sites généalogiques, bases de données publiques, etc.), environ un tiers des Québécois d’origine « canadien-français » porteraient un patronyme hérité d’un ancêtre originaire de Normandie, soit une population estimée de 2 à 2,5 millions de personnes. Si l’on rajoute les ancêtres féminins, la descendance laissée par les hommes et femmes originaires de Normandie sur la population québécoise est probablement beaucoup plus conséquente.
Source : Reportage du JT de France 2 (25/09/2017) : « Normandie, des Québécois en quête de leurs racines ».
Le tourisme généalogique : un levier de développement local pour les territoires ruraux ?
Le potentiel touristique généalogique est donc bien réel en Normandie si on tient compte du nombre important de Québécois concernés et de leur engouement pour la généalogie. D’ailleurs, j’ai cartographié ce potentiel touristique par commune après avoir identifié l’ensemble des ancêtres normands (masculin et féminin) qui ont laissé une descendance au Québec jusqu’à nos jours (cette recension n’est pas encore totalement exhaustive). En effet, les lieux de mémoire de ces ancêtres se concentrent presque exclusivement dans leur commune d’origine (maison ancestrale, église de baptême et/ou mariage, rue portant son nom, etc.).
Cette géographie communale d’origine de ces ancêtres montre deux choses :
Un potentiel touristique qui est hétérogène géographiquement (les 5 départements normands sont concernés même si celui de l’Eure le semble moins que les autres).
Outre trois villes de taille moyenne ou importante (Rouen, Dieppe et Caen), de nombreuses communes rurales sont concernées par ce potentiel, généralement dans des espaces ruraux peu attractifs économiquement et vieillissants (Perche, Pays de Caux, Pays d’Auge et le sud-Manche).
Cartographie du potentiel touristique généalogique québécois en Normandie. François Raulin (2017)
D’autres sites touristiques régionaux très fréquentés (Le Mont-Saint-Michel, Giverny, le Memorial de Caen, etc.) ainsi que plusieurs lieux ayant un lien avec l’histoire du Québec (Musée de l’émigration française au Canada de Tourouvre, cimetières canadiens de Dieppe et de Bény-sur-Mer, port de Honfleur qui a vu le départ de plusieurs expéditions de Samuel de Champlain, etc.) ont été rajoutés dans cette carte afin de mieux se rendre compte de ce potentiel touristique.
Dès lors, si les acteurs publics et privés du territoire décidaient de capter ce potentiel (élus locaux et entreprises dédiées au tourisme notamment), il est certain que ces territoires ruraux bénéficieront directement de retombées économiques locales (établissements hôteliers, restaurants, etc.). Face aux enjeux (difficiles) de la redynamisation des espaces ruraux, est-ce que cette nouvelle forme de tourisme peut-elle être une réponse (certes modeste) aux territoires concernés ?
Société Généalogique Canadienne-Française