Le musée d'histoire de Nantes a indiqué lundi 12 octobre qu'il reportait une exposition consacrée à l'histoire de Gengis Khan et de l'empire mongol en raison du "durcissement" de "la position du gouvernement chinois à l'encontre de la minorité mongole".
publié le 13/10/2020 à 16:11
Au premier semestre 2021, le Château des ducs de Bretagne, à Nantes, devait accueillir dans ses murs, une "exposition consacrée à l’un des plus grands conquérants de l’Histoire" : le Mongol Gengis Khan, rapporte Ouest-France. Mais s'était sans compter sur une pression inattendue exercée par la Chine, selon le directeur du musée d’Histoire de Nantes, qui a annoncé lundi 12 octobre devoir "reporter" l'évènement.
"Nous sommes aujourd’hui contraints de reporter cette exposition en octobre 2024 en raison du durcissement, cet été, de la position du gouvernement chinois à l’encontre de la minorité mongole", indique Bertrand Guillet dans un communiqué. "Nous avons pris la décision de stopper cette production au nom des valeurs humaines, scientifiques et déontologiques que nous défendons".
Une décision prise après que les autorités chinoises ont exercé différentes pressions. Elles auraient ainsi d'abord exigé de "faire disparaitre de l’exposition des éléments de vocabulaire (les mots Gengis Khan, empire et mongol)", avant de demander un droit de regard sur les contenus eux-mêmes.
"Une annonce de modification du contenu de l’exposition accompagnée d’une demande de contrôle de l’ensemble de nos productions (textes, cartographies, catalogue, communication) ont été formulées", a fait savoir le directeur du musée nantais qui parle de "censure à l’égard du projet initial".
Le "nouveau synopsis proposé, écrit par le bureau du patrimoine de Pékin (...) comporte notamment des éléments de réécriture tendancieux visant à faire disparaître totalement l'histoire et la culture mongole au bénéfice d'un nouveau récit national", précise encore le communiqué.
La Chine compte 1,4 milliard d'habitants et 56 groupes ethniques. Les Hans y sont majoritaires à 92%. Les quelque 6,5 millions de Mongols habitent principalement en Mongolie intérieure, vaste région chinoise constituée de prairies, de déserts et de forêts. Mais en Mongolie voisine, la nouvelle politique linguistique chinoise, qui veut accroître l'enseignement du mandarin au détriment du mongol, provoque un tollé dans l'opinion et suscite de large manifestations.
Le projet, à l'instar de précédentes expositions présentées avec le concours de musées grec, colombien ou suédois ces dernières années, était prévu en partenariat avec le musée de Mongolie Intérieure à Hohhot (Chine). Le musée d'histoire affirme qu'une nouvelle exposition "nourrie de collections européennes et américaines" sera bientôt reconstruite en "conservant le premier synopsis".
L’auteur français du logiciel d’édition de texte Notepad++ a des convictions politiques et les exprime à travers diverses éditions de son outil, ce qui ne plait pas vraiment aux autorités chinoises.
Magie de l’informatique, on peut être français et dissident en Chine. Don Ho, le créateur français de célèbre logiciel d’édition de texte (et de code, surtout) vient d’en faire l’expérience. Le site web de Notepad++ est interdit en Chine depuis lundi, en raison de la publication d’éditions spéciales intitulées « Free Uyghur » et « Stand with Hong Kong ». La contestation, les autorités chinoises n’aiment pas trop beaucoup ça.
Notepad++ est un logiciel gratuit fonctionnant sous Windows et disponible en 90 langues. Jusque là tout va bien, mais l’histoire montre que même un logiciel permettant d’écrire et éditer des lignes de code peut avoir des opinions politiques. En tout cas celles de son auteur. Dans ses avis de publication pour les deux éditions, Don Ho a ouvertement exprimé ses préoccupations concernant les conditions des droits de l’homme, respectivement dans la région autonome du Xinjiang et à Hong Kong.
Selon nos confrères de TechCrunch, l’interdiction de Notepad++ ne s’appliquerait qu’à sa page de téléchargement – qui présente les éditions spéciales et donc susceptibles d’être censurées – lorsqu’on essaie de l’atteindre à partir des navigateurs chinois développés par Tencent (QQ Browser et le navigateur intégré de WeChat), Alibaba (UC Browser), 360 et Sogou. Ces services signalent la page comme contenant des contenus « interdits » par les régulateurs locaux.
La page d’accueil de Notepad++, en revanche, reste accessible, et il est toujours possible de naviguer dans le site complet depuis Chrome et DuckDuckGo en Chine.
Il faut dire qu’en matière de message politique, Don Ho n’en n’est pas à son coup d’essai, puisque déjà en 2014, il avait publié une édition délivrant un message lié aux manifestations pro-démocratiques de Tiananmen. Par ailleurs, plus près de nous, d’autres versions du logiciel affichaient déjà une prise de position politique à la faveur d’évènements marquants en France, tels que les éditions « Je suis Charlie » et « Gilet Jaune ».
Lorsque la version « Free Uyghur » est sortie à la fin de l’année dernière, cela n’avait pas été du goût de certains citoyens chinois, qui avaient montré leur désaccord de façon massive sur le dépôt GitHub de Notepad++.
Une réponse furieuse à la décision chinoise ce vendredi de taxer 75 milliards de dollars d'importations venues des États-Unis.
INTERNATIONAL - Furieux de la contre-attaque de Pékin dans la guerre commerciale qu’il mène depuis plus d’un an, le président américain Donald Trump a opté ce vendredi 23 août pour la surenchère.
La totalité des 550 milliards de dollars de produits chinois importés aux États-Unis seront frappés de taxes douanières encore plus lourdes d’ici la fin de l’année. “Il nous faut rééquilibrer cette relation commerciale très injuste” avec la Chine, a tweeté le président en fin d’après-midi détaillant lui-même les nouveaux tarifs douaniers.
À partir du 1er octobre, 250 milliards de dollars de marchandises importées seront frappées de 30% de taxes punitives contre 25% actuellement. En outre, les 300 milliards de dollars d’importations restantes seront taxées à hauteur de 15% au lieu de 10% à partir du 1er septembre.
...unfair Trading Relationship. China should not have put new Tariffs on 75 BILLION DOLLARS of United States product (politically motivated!). Starting on October 1st, the 250 BILLION DOLLARS of goods and products from China, currently being taxed at 25%, will be taxed at 30%...
— Donald J. Trump (@realDonaldTrump) August 23, 2019
Pour éviter que le consommateur - et électeur - américain ne soit trop pénalisé pour ses achats de la période des fêtes, le président a maintenu le report au 15 décembre de cette mesure pour une liste de produits de grande consommation, notamment électroniques.
La Chine a annoncé ce vendredi son intention d’imposer de nouveaux droits de douane sur 75 milliards de dollars d’importations en provenance des États-Unis, en représailles aux taxes douanières supplémentaires que prévoit d’instaurer prochainement Washington.
Pour le président c’est une “décision politiquement motivée” et peu après l’annonce de Pékin il s’est lancé dans une salve de tweets au ton particulièrement agressif. “Nous n’avons pas besoin de la Chine et, franchement, on se porterait bien mieux sans eux”, a écrit le locataire de la Maison Blanche.
La Fédération américaine des distributeurs a vivement réagi. “Il est impossible de planifier l’avenir dans ce type d’environnement. Il est clair que la stratégie de cette administration ne fonctionne pas”, a-t-elle estimé.
Tempête à Wall Street
Dans sa série de messages, Donald Trump avait aussi “ordonné” aux sociétés américaines “de commencer immédiatement à chercher des alternatives à la Chine, y compris de rapatrier vos sociétés et de fabriquer vos produits aux Etats-Unis”.
C’est ce dernier tweet qui a effrayé investisseurs et entrepreneurs.
Les premiers ont vendu en masse les titres des entreprises qui potentiellement seraient les plus affectées. Exit donc les actions de Caterpillar et ses engins de chantiers, les constructeurs automobiles et ceux de micro-processeurs. Apple a pour sa part vu plus de 44 milliards de dollars de valeur en bourse partir en fumée et le Dow Jones, le principal indice de Wall Street a fini sur sa deuxième plus forte baisse de l’année.
Depuis un an que Donald Trump a déclenché son combat à coups de tarifs douaniers punitifs contre les pratiques commerciales de l’Empire du Milieu qu’il juge “déloyales”, nombre d’entreprises américaines ont cherché des alternatives dans des pays voisins à bas coûts. Mais la transition est difficile, coûteuse, et les infrastructures souvent insuffisantes.
La Chambre de commerce américaine avait elle lancé un appel au calme. “Nous ne voulons pas d’une nouvelle détérioration des relations sino-américaines”, avait-elle expliqué, soulignant que “40 ans de relations commerciales entre nos deux pays ont été pour l’essentiel productives, constructives et mutuellement bénéfiques”.
Donald Trump n’a finalement plus fait allusion à son “ordre”.
Insatisfait des avancées des négociations entre les deux partenaires commerciaux et se jugeant trompé par son homologue Xi Jinping, Donald Trump avait annoncé le 13 août que les 300 milliards de dollars de produits importés de Chine qui avaient jusque-là échappés à l’affrontement seraient également taxés.
C’est à ce nouveau coup qu’a réagi Pékin ce vendredi avec des mesures reflétant les représailles américaines, mais sur seulement 75 milliards de dollars de produits importés des États-Unis. Pour faire bonne mesure, les Chinois ont aussi rétabli une taxe de 25% sur les importations automobiles américaines.
Cette guerre commerciale entre les deux premières économies du monde crée énormément d’incertitude et pèse sur la croissance à un moment où l’Europe est fragilisée par les crises politiques en Italie et au Royaume-Uni et une Allemagne au bord de la récession.
Le président aura sans doute des explications à donner à ses collègues du G7, qu’il doit normalement retrouver ce samedi en France.
Le président de la Banque centrale américaine, Jerome Powell, a fait écho aux inquiétudes pour la croissance mondiale vendredi matin, peu avant l’éruption de tweets de Donald Trump. Il a souligné que si les perspectives économiques américaines restaient favorables, les tensions commerciales semblaient en revanche “jouer un rôle dans le ralentissement mondial et la faiblesse du secteur manufacturier (...) aux États-Unis”. Dans ce contexte, le patron de la Fed a cependant prévenu que la politique monétaire n’avait “pas de mode d’emploi” tout prêt.
Le président, qui, en campagne pour sa réélection, sait que la bonne santé de l’économie en est un ingrédient indispensable, ne cesse d’attaquer la Banque centrale afin qu’elle baisse “fortement” ses taux pour faire de la croissance américaine “une fusée”.
La guerre commerciale s'est intensifiée depuis que Washington a augmenté début mai les droits de douane sur des produits chinois. Elle se double désormais d'une guerre technologique : l'administration Trump a interdit aux sociétés américaines de vendre des technologies à Huawei, numéro deux mondial des smartphones, mettant en péril l'approvisionnement crucial du Chinois en puces électroniques.
Face à Trump, médias officiels et responsables politiques chinois agitent désormais la menace d'une réduction des exportations de terres rares vers les Etats-Unis -- ce qui pourrait priver Washington d'une ressource cruciale pour la haute technologie. Car la Chine assure plus de 90% de la production mondiale de cet ensemble de 17 métaux, indispensables aux technologies de pointe et que l'on retrouve dans les smartphones, les écrans plasma, les véhicules électriques mais aussi dans l'armement.
Il y a tout juste un mois, se tenait discrètement à Washington, une réunion organisée par le Benchmark Mineral Intelligence. Étaient conviés des entreprises minières, des autorités de régulation, des élus du Congrès et du Sénat et des industriels. À l’ordre du jour de cette réunion, un sujet des plus brûlants : l’approvisionnement en matières premières et notamment en terres et minerais rares. Parmi les industriels, Tesla, le premier fabricant américain de véhicules électriques lance un message d’alerte sur le risque de pénurie imminente de minerais pour fabriquer ses batteries et ses voitures.
Il convient de préciser que ces véhicules électriques de dernière génération utilisent deux fois plus de métaux rares qu’une voiture ordinaire à moteur thermique. Pour fabriquer les 130 millions de véhicules électriques programmés d’ici 2030, il faudra trouver trois millions de tonnes de cuivre, plus d’un million de tonnes de nickel et 260 000 tonnes de cobalt. Du côté des industriels du numérique, la situation n’est pas meilleure où les seuls assistants à domicile de Google et Amazon exigent des millions de tonnes de cuivre et autres métaux rares pour leur fabrication.
Autant de minéraux stratégiques, indispensables à tous les équipements électroniques. « Ces minéraux critiques sont souvent ignorés mais sans eux la vie moderne serait impossible », a déclaré Wilbur Ross, le secrétaire américain au Commerce, affirmant que le gouvernement fédéral « prend des mesures sans précédent pour s'assurer que les Etats-Unis ne seront pas coupés de ces matériaux vitaux ». Et le ministre de lister 35 éléments stratégiques dont l'uranium, le titane et les terres rares, pour lesquels les Etats-Unis sont particulièrement dépendants de l'étranger. Pour quatorze des minéraux listés, « les Etats-Unis n'ont aucune production nationale et dépendent complètement des importations », note le rapport du secrétariat d’État au Commerce.
Le problème, c’est que la plupart de ces minerais viennent de Chine. L’empire de Xi Jinping, en délicatesse avec Donald Trump, pour employer un euphémisme, produit l'essentiel des terres rares de la planète, un ensemble de 17 métaux indispensables aux technologies de pointe.
LIRE DANS UP : Terres et métaux rares : l’arme fatale de la Chine dans la guerre économique
Et dans le bras de fer commercial entre la Chine et les États-Unis, Pékin s'est plu à rappeler cette dépendance. Le 22 mai dernier, au moment où Trump alourdissait les sanctions contre le géant chinois Huawei, Xi Jinping est allé tranquillement visiter une usine de traitement de ces métaux stratégiques ; une manière subtile de laisser planer la menace de bloquer les exportations.
Une semaine plus tard, le message était encore plus clair. « Si quelqu'un veut utiliser des produits fabriqués à partir de nos exportations de terres rares pour freiner le développement de la Chine, alors je pense que (...) le peuple chinois sera mécontent », a mis en garde un responsable de la puissante agence de planification économique.
Mardi 4 juin, la menace s'est faite plus précise. La puissante agence de planification économique chinoise a tenu une réunion sur un possible « contrôle des exportations » de terres rares. « Selon les suggestions des spécialistes (...) nous devons renforcer les contrôles à l'exportation et établir un mécanisme de traçabilité et d'examen pour l'ensemble du processus d'exportation des terres rares », a indiqué la NDRC à l'issue de cette réunion.
Que se passerait-il si la Chine menait ses menaces à exécution ? Un précédent existe. Il remonte à 2010 quand, en représailles à un différend territorial, Pékin avait brutalement interrompu ses exportations de terres rares vers le Japon, mettant les entreprises de hautes technologies nippones en grandes difficultés.
Aussi Washington réfléchit à un plan d’action. L’administration Trump compte ainsi accélérer la recherche, le développement et le déploiement de méthodes de recyclage et de réutilisation de ces minéraux stratégiques, trouver des alternatives et aussi diversifier l'approvisionnement et améliorer les processus d'extraction, de séparation et de purification. De fait pour certains des minéraux concernés, les Etats-Unis disposent bien de la matière première mais pas du savoir-faire pour les rendre utilisables par l'industrie.
Washington compte aussi renforcer la coopération et améliorer le commerce international de ces minéraux avec ses alliés. On pense ainsi à la Corée du Sud qui produit 20 à 30 % de certaines des terres rares utilisées dans le monde.
Le plan stratégique prévoit également de faire un recensement précis des ressources naturelles disponibles dans le pays pour pouvoir les exploiter. Mais il compte aussi faire la nomenclature de sources d'approvisionnement moins traditionnelles, comme l'extraction à partir de l'eau de mer ou de déchets du charbon. Et comme elle l'a fait pour d'autres industries, l'administration veut déréguler pour accélérer les choses. Le gouvernement veut enfin s'assurer qu'il disposera de la main-d’œuvre qualifiée nécessaire pour mener à bien son projet et bâtir une base industrielle nationale solide. En aura-t-il le temps ?
La menace sur les terres rares ne concerne pas que les États-Unis. L’Europe aussi est extrêmement dépendante des importations étrangères et principalement chinoises. Le continent se met donc à explorer son potentiel minier. Signe encourageant, la découverte d’importantes ressources de lithium au Portugal et de tungstène en France, en Ariège. Des ressources dont l’extraction posera d’immenses questions environnementales. Signe des temps, lors du premier Conseil de défense écologique, qui s’est tenu à l’Élysée le 23 mai dernier, le ministre de la Transition écologique et solidaire François de Rugy a tracé les grandes lignes d’un projet de réforme du code minier qui devrait être mise en place d’ici la fin de l’année.
Technologie : Avec son climat favorable et ses infrastructures importantes, l'Islande attire toutes les convoitises. Notamment celles de la Chine, qui souhaite y installer des datacenters. Une "Route de la soie polaire" est en construction.
Par Charlie Osborne | Modifié le mercredi 05 juin 2019 à 16:33
La vérité dépasse bien souvent la fiction. Le directeur commercial du spécialiste des datacenters Etix Everywhere Borealis, l'islandais Arni Jensen, pourra en témoigner.
Il y a plusieurs mois, deux ressortissants chinois débarquent sur le tarmac de l'aéroport international de Keflavík, un des voies d'accès vers l'Islande par les airs. Tous deux prétendent être des employés de Huawei en visite dans le pays pour s'informer sur les datacenters locaux et prospecter en vue d'éventuels investissements sur l'île. Les deux hommes rencontrent Arni Jensen et concluent, après avoir passé la journée avec ce dernier, que la pays présente un intérêt certain pour son potentiel en terme de datacenters.
Neuf mois plus tard, sans aucunes nouvelles de ses interlocuteurs, Arni Jensen contacte Huawei pour découvrir que ses deux visiteurs ne figurent pas sur la liste des employés du constructeur chinois, pour lequel ils n'ont jamais travaillé. Au-delà du caractère insolite de cette histoire, dont le fin mot n'a jamais été connu, celle-ci en dit long sur l'importance stratégique prise par les champs de lave et les fjords de l'Islande dans l'industrie de la donnée.
L'Islande, avec son climat propice aux tempêtes de neige, ses heures de clarté qui oscillent entre 24 heures de lumière ou d'obscurité selon la période de l'année, et une population d'environ 450 000 habitants, ne semble pourtant pas nécessairement s'imposer comme un pays où les intérêts commerciaux, qu'ils viennent de Chine ou d'ailleurs, pourraient naturellement prospérer.
Ce pays peu peu peuplé, situé entre les États-Unis et l'Europe, a récemment connu un regain de popularité dans le tourisme, en partie grâce à des accords lancés par des compagnies aériennes qui tentent d'assurer le commerce avec ceux dont la destination finale est les États-Unis.
Cependant, c'est la capacité et l'utilisation d'énergie renouvelable du pays qui ont vu les perspectives de l'Islande en tant qu'hôte des centres de données augmenter - ainsi que son avenir économique potentiellement positif après un effondrement désastreux du système bancaire en 2008. Les opérateurs de centres de données, dont Etix Everywhere Borealis et Verne Global, ont accès à des sources d'énergie renouvelables fournies par des centrales géothermiques et hydroélectriques, ainsi qu'à un approvisionnement en énergie éolienne qui augmente lentement.
Un climat qui fait des jaloux
Mais ce qui rend surtout l'Islande unique, c'est la stabilité de son climat qui s'établit en moyenne à quatre degré Celsius. Un climat favorable à l'industrie des centres de données, qui a connu dans le pays une croissance de plus de 100 % au cours des trois dernières années, contre 10 % au niveau mondial. Une grande partie de cette croissance peut être attribuée à de faibles coûts d'exploitation par rapport aux pays où les températures sont plus chaudes pendant l'année.
Le climat unique de l'Islande contribue en effet à une réduction de puissance estimée à 33% afin de garder un centre de données moyen au frais toute l'année. Ajoutez-y une abondance d'énergie durable et bon marché et vous comprendrez ce qui fait de cette île un véritable eldorado pour le secteur des centres de données et les entreprises souhaitant stocker ou traiter des données.
En outre, l'Islande est maintenant reliée aux États-Unis et à l'Europe par un réseau de câbles sous-marins à fibre optique à faible latence et à large bande passante, et le développement d'un nouveau câble vers le Royaume-Uni est également envisagé dans un futur proche. De quoi aiguisez les appétits des puissances étrangères. Au premier rang desquelles la Chine, qui semble avoir un intérêt économique soutenu dans ce que l'Islande a à offrir et a adopté une approche de l'investissement que Jensen juge "brutalement pragmatique".
La clé de cette stratégie ? La propriété et contrôle de l'infrastructure. "Ils pensent à très long terme, et ils comprennent ce qu'être doté d'une population supérieure à un milliard d'habitants peut conférer en terme de puissance", explique le dirigeant. "La plupart des économies sont basées sur le commerce, la leur est basée sur l'infrastructure. Il est donc logique pour eux d'aller en dehors de la Chine", fait-il également valoir.
Voilà pourquoi la Chine investit massivement dans les centres de données islandais et d'autres entreprises depuis les sept dernières années. En 2017, le "Financial Times" a ainsi rapporté que la Chine avait investi plus de 20 milliards de dollars dans les ports d'outre-mer, y compris ceux liés aux routes maritimes entre la Chine et l'Europe, dont deux ports en Islande. L'Institut de recherche polaire de Chine a entre autres financé un centre dans le pays pour étudier les aurores boréales, et vous pouvez trouver des chercheurs chinois au Conseil de l'Arctique, travaillant dans les pays nordiques avec d'autres ressortissants au nom de la recherche scientifique.
C'est d'ailleurs au sein de ce même Conseil de l'Arctique que le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a mentionné la participation de la Chine comme une " préoccupation ", étant donné l'empreinte accrue du pays dans le Conseil et son bilan environnemental passé. Mais la participation de la Chine a cette institution n'est qu'une facette d'une approche plus large des pays du Nord, comme le suggère David Auerswald pour le site spécialisé War On the Rocks. "D'une part, la Chine s'efforce de participer aux groupes de travail du Conseil de l'Arctique et à la recherche scientifique arctique. D'autre part, elle semble avoir un comportement prédateur pour se procurer un avantage unilatéral", explique en effet ce dernier.
La Chine a présenté sa politique de l'Arctique en 2018. Celui-ci qualifie l'Empire du Milieu d'"État proche de l'Arctique" et affirme que l'intérêt du pays pour la région s'étend à l'analyse du changement climatique, à l'environnement, à la recherche scientifique, à l'utilisation des routes maritimes, à l'exploration et l'exploitation des ressources, à la sécurité et à la gouvernance mondiale. Bien qu'il n'y ait pas de mention spécifique des données, la circulation de l'information sous-tend bon nombre de nos industries aujourd'hui. La politique chinoise stipule ainsi que "l'utilisation des routes maritimes et l'exploration et la mise en valeur des ressources de l'Arctique peuvent avoir un impact énorme sur la stratégie énergétique et le développement économique de la Chine, qui est un important pays commerçant et consommateur d'énergie dans le monde".
"Le capital, la technologie, le marché, les connaissances et l'expérience de la Chine devraient jouer un rôle majeur dans l'expansion du réseau de routes maritimes dans l'Arctique et faciliter le progrès économique et social des États côtiers le long de ces routes. La Chine a des intérêts communs avec les États de l'Arctique et un avenir commun avec le reste du monde dans l'Arctique", précise également la feuille de route de Pékin.
Selon le site américain USNI, le pays suit la "Route polaire de la soie" dans sa quête de contrôle des infrastructures à travers l'Ouest. Le rapport estime que les investissements chinois représentent 6 % du PIB en Islande et 12 % du PIB au Groenland. En d'autres termes, investir dans des pays qui pourraient stimuler l'économie au nom de la croissance, avoir des intérêts commerciaux dans les centres de données, les câbles de communication et les centres de transport, et cela pourrait faire de la Chine une superpuissance économique colossale à long terme, non seulement au niveau national, mais dans le monde entier. Le soutien financier du pays ne doit pas être sous-estimé.
Toutefois, les investisseurs chinois potentiels n'ont pas tous eu la vie facile, affirme Arni Jensen, citant les différences culturelles entre les Chinois et les Islandais. Lorsqu'il s'agit de l'accaparement des terres, par exemple, les Chinois échouent souvent. Les routes commerciales, les câbles, la recherche, l'énergie et les nouvelles possibilités d'affaires contribuent tous à l'ensemble des raisons pour lesquelles la Chine s'intéresse à la région arctique. Cependant, la création d'une "route de la soie" en Finlande, impliquant Pékin et les autorités finlandaises désireuses de construire un nouveau câble transatlantique, soulève également des questions quant aux intentions de la Chine.
La Blockchain, un nouvel atout dans la manche de l'Islande
Les câbles maritimes sont capables de fournir des transferts de données à faible latence, une exigence clé pour les institutions financières et de nombreuses entreprises d'aujourd'hui. On estime que 97 % des communications mondiales et 10 billions de dollars en transactions financières quotidiennes sont transmis par câble plutôt que par satellite, et comme Etix Everywhere Borealis continue d'élargir son portefeuille de centres de données - le dernier ajout étant un centre de données à Blönduós - la popularité croissante de la technologie de la Blockchain, facilitée par les centres de données, est aussi intéressante.
Cette technologie, également connue sous le nom de technologie du grand livre distribué, a été présentée non seulement comme un moyen de faciliter le commerce de cryptomonnaies, mais aussi comme une future épine dorsale potentielle pour les échanges de devises traditionnels et fiat.
L'avantage de la Blockchain réside dans le stockage des enregistrements de transactions et leur immuabilité, et si les systèmes financiers traditionnels s'éloignent de Swift pour s'installer dans des chaînes de blocage, les câbles à faible latence, les centres de données et l'hébergement dans des endroits accessibles depuis les Etats-Unis et l'Europe sont des perspectives intéressantes et seront nécessaires pour supporter le poids des futures banques et institutions financières.
La Chine le reconnaît probablement aussi et pourrait jouer un rôle à long terme dès maintenant pour participer au contrôle de l'infrastructure informatique dont les banques auront besoin à l'avenir en investissant dans des pays comme l'Islande aujourd'hui. La Chine a une vision à long terme et il est peu probable qu'elle soit découragée dans sa quête d'une suprématie économique accrue. "Ils ont beaucoup de raisons de maintenir leur croissance économique et ils comprennent l'infrastructure ", fait ainsi valoir Arni Jensen. "Le propriétaire de l'infrastructure, à la fin de la journée, gagne."
Source : "Does China's route to infrastructure control run through Iceland's data centers?"