État le plus vaste du monde, l’URSS a occupé un sixième des terres émergées du globe. Du point de vue géopolitique, cette construction fédérale a permis à la Russie de s’assurer un glacis conséquent face à l’Europe, le Proche et le Moyen-Orient. Sous l’influence de Staline et de ses successeurs, elle a inscrit la politique soviétique dans la continuité géopolitique de la Russie des tsars, un rêve d’expansion qui refait surface un siècle après sa création.
Au début de l’année 1917, alors que le conflit dure depuis bientôt trois ans, l’absurdité et l’horreur de la guerre associées à la famine qui touche les grandes villes du pays poussent de nouveau la Russie dans la Révolution. La précédente, en 1905, a mené à la création d’une assemblée, la Douma, dont la création se présente comme une promesse de changement pour la plus grande autocratie européenne. Dans les faits, elle n’est qu’une vitrine sans pouvoir, qui ne trouve de véritable fonction que douze ans plus tard, après les troubles de février.
Le régime tsariste s’effondre en quelques jours, forçant le tsar à abdiquer. Le nouvel homme fort du gouvernement provisoire est un socialiste révolutionnaire, Alexandre Kerenski, ministre de la Justice puis de la Guerre et, enfin, ministre-président. Si les réformes sont nombreuses et spectaculaires, le gouvernement ne veut pas mettre fin au conflit, par peur de trahir ses alliés, mais aussi de devoir faire des concessions territoriales à l’Allemagne. Le mécontentement grandit et les bolcheviks, menés par Lénine, rentré de son exil suisse en avril avec la bénédiction de Berlin, prennent le contrôle des conseils d’ouvriers, les soviets.
Les soviets au cœur de la fiction d’une démocratie populaire
« Tout le pouvoir aux soviets », le mot d’ordre de Lénine repris aux anarchistes, est une formule purement rhétorique. Il s’agit de s’appuyer sur le mécontentement ouvrier face à un gouvernement défini comme « bourgeois ». Dans un pays dévasté, les bolcheviks n’ont aucun mal à déclencher une seconde révolution en octobre et à s’emparer du pouvoir. Les soviets sont désormais sous le contrôle des commissaires du peuple. Le pouvoir qui se veut soviétique – tenu par les conseils représentants du peuple – est en fait tout entier entre les mains d’une poignée de révolutionnaires professionnels, secondée par une police politique omniprésente, la Tchéka.
En mars 1917, des congrès nationaux ont pris le pouvoir dans les pays baltes, en Finlande, en Ukraine, en Géorgie, en Arménie, au Turkestan, qui tous étaient jusque-là sous le contrôle direct de la Russie. Lorsque le nouveau pouvoir proclame le droit à l’autodétermination des peuples, Finlande, Pologne, pays baltes, Ukraine, Géorgie et Arménie choisissent aussitôt l’indépendance. Les nouveaux pays sont reconnus par la Société des nations. En mars 1918, le gouvernement bolchevik signe une paix séparée à Brest-Litovsk qui s’avère désastreuse. Mais une autre guerre, civile cette fois, est déjà en cours, où s’invitent dès l’armistice de novembre 1918 les anciens alliés du tsar, comme la France et le Royaume-Uni.
Dès lors, il n’est plus question de la liberté des peuples. Et en août 1920, il s’en faut de peu pour que le nouveau régime n’inclue la Pologne dans ses conquêtes. En Finlande, les bolcheviks sont durement réprimés. En Russie, Trotski, chef de la nouvelle Armée rouge, s’exclame « Vive la guerre civile ! » Depuis septembre 1918, règne la « Terreur rouge ». On parle d’anéantir les dix millions de Russes hostiles à la révolution. S’ajoute à cela une famine qui fait des millions de morts. En mars 1921, les marins de Kronstadt se révoltent au cri de « Vive les soviets sans les communistes ! » La répression menée par Trotski est implacable.
Carte de l'expansion de la Russie et de l'URSS de 1812 à 1945 © Pline Wikimedia Creative Commons
Les frontières de la Russie sont désormais assurées. Politiquement est instauré le « centralisme démocratique » qui nie jusqu’au droit de tendance dans l’appareil bolchevik. Économiquement, en revanche, le régime fait machine arrière sur la collectivisation et propose la Nouvelle politique économique (la NEP), pour une période de sept ans. Même après la mort de Lénine en 1924, Staline attendra 1928 pour assurer le contrôle absolu de l’État sur l’économie.
Très vite donc, les principes ont cédé face à ce qui est perçu comme la nécessité de maintenir un cadre idéologique conforme à la révolution bolchevik. En 1920 déjà, l’Armée rouge crée une République soviétique en Ukraine, où une large majorité des forces politiques en présence sont vigoureusement anti-bolcheviks. Et pour s’assurer le contrôle de ce régime fantoche, elle met en place en juillet un traité d’union ouvrière et paysanne non seulement avec elle, mais aussi avec l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Géorgie. Lénine, dont la santé et l’influence déclinent rapidement, cherche à maintenir un cadre fédéral qui permettrait à la fois un semblant de pluralisme politique – un accord avec l’autre courant communiste en Géorgie, les mencheviks – et surtout un dialogue entre toutes les nations en présence. C’est le sens du terme Union des républiques socialistes soviétiques, d’où toute référence explicite à la Russie a été effacée.
Staline, lui, se positionne constamment au centre des différentes tendances bolcheviks, renvoyant dos à dos les oppositions de droite et de gauche – cette dernière menée par Trotski. Il entend asseoir de manière explicite l’hégémonie de Moscou. Il a donc proposé, dans un premier temps, la création d’une République socialiste fédérative soviétique de Russie. Formellement pourtant, c’est bien le terme d’URSS qui est choisi lors du premier congrès des soviets le 30 décembre 1922. Dans les faits, la Russie a repris possession de son Empire et l’internationalisme communiste a débouché sur une aporie.
De gauche à droite: les dirigeants révolutionnaires russes Joseph Staline (1879-1953), Vladimir Lénine (1870-1924) et Mikhaïl Kalinine (1875-1946), lors du 8e congrès du parti communiste russe à Moscou, le 23 mars 1919. © Universal History Archive/Getty Images
Deux ans plus tard, Staline fera du « socialisme dans un seul pays » le slogan officiel de l’URSS, montrant par là que les diversités internes de l’État fédéral n’ont plus cours. Sept ans après la Révolution d’octobre, il offre surtout un cadre rassurant pour les puissances occidentales : le but des bolcheviks n’est plus dès lors d’étendre la révolution communiste au monde entier. De fait, les extensions territoriales de 1945 resteront mineures et dans la constitution du bloc de l’Est, l’URSS cherchera presque exclusivement à étendre son glacis protecteur. Pour ne pas effrayer, elle n’apportera qu’un soutien purement formel aux puissantes forces communistes en Grèce qui perdront la guerre civile – comme elle l’avait fait, avant-guerre, en Espagne – mais n’hésitera pas à imposer ses vues, à la seule fin de défendre ses intérêts géostratégiques, dans des pays où le communisme est réduit à la portion congrue, en Pologne par exemple.
Le 21 décembre 1991, l’URSS laisse place à la CEI (Communauté des États indépendants) qui rassemble aujourd’hui neuf des quinze ex-républiques soviétiques : la Russie et la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, la Moldavie, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan ainsi que l’Arménie et l’Azerbaïdjan pourtant régulièrement en conflit depuis 1988. Le Turkménistan n’est plus depuis 2007 qu’un État associé, la Mongolie est un État observateur dans certaines instances. La Géorgie et l’Ukraine ont quitté la CEI respectivement en 2009 et en 2018, après la guerre d’Ossétie du Sud (2008) et la révolution de Maïdan (2014).
L’Ukraine était, avec la Russie et la Biélorussie, l’un des trois membres fondateurs de la CEI. État continuateur de l’URSS, héritière de son siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies, la Fédération de Russie demeure le plus vaste pays de la planète et aussi l’un des moins denses. Elle compte encore plus de 120 nationalités, dont beaucoup ont été intégrées par la politique coloniale de la Russie tsariste, consolidée au XIXe siècle.
Les prénoms russes d'origine slave actuellement utilisés sont en nombre assez restreint. La christianisation du peuple russe par l'église byzantine a entraîné la disparition de la plupart d'entre eux au profit de prénoms grecs et, dans une moindre mesure, latins et hébraïques.
Aleksandr (Александр)
Alekseï (Алексей)
Anastassia (Анастасия)
Anatoli (Анатолий)
Andreï (Андрей)
Arkadi (Аркадий)
Artiom (Артём)
Basilovitch (Базилович)
Denis (Денис)
Dmitri (Дмитрий)
Fiodor (Фёдор)
Galina (Галина)
Guennadi (Геннадий)
Iekaterina (Екатерина)
Ielena (Елена)
Ievgueni (Евгений)
Ievguenia (Евгения)
Iouri (Юрий)
Irina (Ирина)
Ksénia (Ксения)
Larissa (Лариса)
Natalia (Наталия)
Nikita (Никита)
Nikolaï (Николай)
Oksana (Оксана)
Raïssa (Раиса)
Sofia (София)
Stepan (Степан)
Vassili (Василий)
Yuri (Юрий)
Zinaïda (Зинаида)
Bogdan (Богдан)
Boris (Борис)
Lioubov (Любовь)
Lioudmila (Людмила)
Nadejda (Надежда)
Svetlana (Светлана)
Stanislav (Станислав)
Vadim (Вадим)
Véra (Вера)
Viatcheslav (Вячеслав)
Vladimir (Владимир)
Vladislav (Владислав)
Le prénom Olga (Ольга) serait d'origine germanique (Helga).
L'emploi des diminutifs est très répandu en russe. En famille, entre amis ou entre collègues, il n'est pas courant de s'adresser à quelqu'un par son prénom. La plupart des prénoms russes ont un diminutif d'usage :
Алексей Alekseï (Alexis) = Aliocha (Алëша)
Александр Aleksandr (Alexandre) = Sacha (Саша), Choura (Шура)
Анатолий Anatoliï (Anatole) = Tolia (Толя)
Борис Boris (Boris) = Borya (Боря)
Дмитрий Dmitriï = Dima (Дима) ou Mitia (Митя)
Георгий Gueorguiï (Georges) = Jora (Жора)
Ярослав Iaroslav = Slava (Слава)
Евгений Ievgueniï (Eugène) = Jenia (Женя)
Константин Konstantin = Kostia (Костя)
Михаиль Mikhaïl (Michel) = Micha (Миша)
Николай Nikolaï (Nicolas) = Kolya (Коля), Nikita (Никита)
Павель Pavel (Paul) = Pacha (Паша)
Станислав Stanislav (Stanislas) = Stas (Стас)
Тимофей Timofeï (Timothée) = Tima (Тима)
Василий Vassiliï (Basile) = Vassia (Вася)
Владимир Vladimir = Volodia (Володя) ou Vova (Вова)
Анастасия Anastassia (Anastasie) = Nastia (Настя).
Анна Anna (Anne) = Ania (Аня)
Дария Daria = Dacha (Даша)
Екатерина Iekaterina (Catherine) = Katia (Катя)
Елена Ielena (Hélène) = Lena (Лена)
Ирина Irina (Irène) = Ira (Ирa)
Ксения Ksenia = Xioucha (Ксюша) (t. fam.)
Любовь Lioubov (Aimée) = Liouba (Любa)
Людмила Lioudmila (Ludmilla) = Liouda (Люда)
Мария Maria (Marie) = Macha (Маша)
Надежда Nadejda (Espérance ; Nadège) = Nadia (Надя)
Наталия Natalia (Nathalie) = Natacha (Наташа)
София Sophia (Sophie) = Sonia (Соня)
Светлана Svetlana = Sveta (Света)
Татяна Tatiana = Tania (Таня)
Зинайда Zinaïda (Zénaïde) = Zina (Зина)
En russe, les prénoms se déclinent comme des substantifs, c'est-à-dire que leur terminaison se modifie suivant la fonction qu'ils exercent dans la phrase (sujet, COD, COI, etc.)
Les prénoms féminins se terminent tous par la lettre « -а », « я » (« -ia ») ou par le signe orthographique non prononcé « -ь » et se déclinent de la même manière que les substantifs féminins de même terminaison. Les noms féminins étrangers ne se déclinent que s'ils se terminent par le son a. Dans les autres cas, un prénom féminin étranger (comme le prénom français Catherine) ne se décline pas.
En Russie et dans la plupart des pays de l'ex-URSS, le patronyme (отчество, mot dérivé de отец qui signifie père), dérivé du prénom du père, figure obligatoirement, en plus du prénom et du nom de famille, sur les actes de naissance et les pièces d'identité. Il est placé entre le prénom et le nom de famille1. Les mots « monsieur » et « madame » étant pratiquement inusités en russe, il est d'usage, pour exprimer le respect, de s'adresser à son interlocuteur en employant son prénom et son patronyme (mais pas son nom de famille). Ainsi, pour s'adresser à Vladimir Poutine, on ne dira pas : « Monsieur Poutine » mais « Vladimir Vladimirovitch ». (Vladimirovitch étant son patronyme.)
Pour les hommes, le patronyme se forme du prénom du père auquel est ajouté le suffixe ovitch (ович) ou evitch (евич).
Fiodor Dostoïevski dont le père se nommait Mikhaïl (Михаил) a pour nom complet : Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski (Фёдор Михайлович Достоевский).
Alexandre Pouchkine dont le père s'appelait Sergueï (Сергей) а pour nom complet : Alexandre Sergueïevitch Pouchkine (Александр Сергеевич Пушкин).
Lénine (son vrai nom était Vladimir Oulianov) dont le père s'appelait Ilia (Илья) а pour nom complet : Vladimir Ilitch Oulianov (Lénine) (Владимир Ильич Ульянов (Ленин)).
Pour les femmes, le patronyme est formé du prénom du père auquel est ajouté le suffixe ovna (овна), ou evna (евна).
Marina Alekseïeva dont le père se nomme Anatole (Анатолий) a pour nom complet : Marina Anatolievna Alekseïeva (Марина Анатольевна Алексеева).
Nina Gorlanova (nom du père : Viktor) se nomme quant à elle : Nina Viktorovna Gorlanova (Нина Викторовна Горланова).
Nadejda Allilouïeva dont le père se nomme Sergueï (Сергей) a pour nom complet : Nadejda Sergueïevna Allilouïeva (Надежда Сергеевна Аллилуева).
Un certain nombre de noms russes tels qu'Ivanov ou Petrov ont une origine patronymique mais ne sont pas des patronymes ; il s'agit de noms de famille qui, comme dans les langues scandinaves, se sont formés à partir de patronymes. Il est ainsi possible pour un Russe de s'appeler Ivan Ivanovitch Ivanov, Ivan étant le prénom, Ivanovitch le patronyme (fils d'Ivan) et Ivanov le nom de famille (formé dans le passé d'après un patronyme).
Sans que cette possibilité ne soit reconnue par la loi, l'usage du matronyme apparaît ponctuellement, dans le cas par exemple où la mère élève seule l'enfant, et où le père ne l'a pas reconnu. Les règles de formation du matronyme sont celles ci-dessus (ex. : Ielizaveta Marievna Tchernobrovkina [Елизавета Марьевна Чернобровкина], si la mère se nomme Maria [Мария]).
Les noms de famille obéissent, tout comme le reste du vocabulaire russe, aux déclinaisons grammaticales. En conséquence, les noms possèdent une forme masculine et une forme féminine. Ainsi, l'épouse (ou la fille) de Vladimir Poutine se nomme-t-elle Poutina.
Les noms se terminant en -ov / -ev (-ов/ев), comme Ivanov, ont pour terminaison au féminin -ova/-eva (-ова/ева) : Ivanova.
Les noms se terminant en -ine (-ин), comme Lenine, ont pour terminaison au féminin -ina (-ина) : Lenina.
Les noms se terminant en -ski (-ский), comme Dostoïevski, ont pour terminaison au féminin -skaïa (-ская) : Dostoïevskaïa.
Les noms en -itch (-ич) restent semblables au féminin. Ils ne se déclinent pas au féminin.
Les autres noms de famille n'ont pas de forme particulière au féminin.
La noblesse russe n'utilisa la particule nobiliaire que de façon marginale, sous l'influence de l'Occident et plus particulièrement de la France du XVIIe siècle.
Le bouillard de la guerre ne réussit manifestement pas à Vladimir Poutine qui peine à définir des objectifs stratégiques tout en semant massivement la mort et la haine en Ukraine.
Le temps est peut-être venu pour lui ou son successeur de savoir comment ne pas perdre la paix. Pour cet exercice-là, il y a une référence incontestable et elle est française. Elle porte un nom célèbre et à rallonge : Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord qui après avoir servi la diplomatie du sabre de Napoléon devient en 1814 le représentant du roué Louis XVIII au Congrès de Vienne. Cette grand-messe anti 1789 qui vise à restaurer un équilibre européen d’Ancien Régime en ignorant le principe des nationalités.
Talleyrand, devenu « prince », commença très fort en abandonnant à peu près tous les territoires acquis pendant vingt-deux ans de batailles par la Révolution et l’Empire, par le traité du 30 mai 1814. La France revient en effet à ses frontières de 1792 tout laissant son flanc est rhénan et son flanc nord flamand exposé et vulnérable. Reste que l’autosatisfecit que se décernera Talleyrand n’est pas est infondé : « Ce traité, écrit-il, n’ôta rien qui fut essentiel à la sûreté de la France. Six semaines après l’entrée du roi à Paris, les soldats avaient quitté le sol français, elle possédait une superbe armée et nous avions conservé tous ces admirables objets d’art conquis par nos armes dans presque tous les musées d’Europe ».
Bien, mais c’est au Congrès de Vienne à proprement parler que Talleyrand va donner toute sa mesure et que selon le mot de Lyautey, il peut se targuer d’avoir « gagné la paix ». À Vienne, il est en effet le seul à n’avoir plus de revendication. Ce qui lui permet d’afficher un profil conciliant, rassurant et jamais menaçant. Un tour de force pour l’ex-ministre de Napoléon ! Raminagrobis peut s’employer alors l’air de ne pas y toucher, à attiser les rivalités entre les quatre grandes puissances — Prusse, Autriche-Hongrie, Angleterre, Russie — qui tentent de se répartir entre monarques de bonne compagnie les morceaux polonais, italiens, saxons de l’ex Premier Empire. Premier coup de maître de Talleyrand : imposer la France au rang de cinquième puissance négociatrice au même titre que les quatre autres auxquelles il récuse le nom de « puissances alliées ». Alliées contre qui rétorque-t-il ? Napoléon ? Il est à l’Ile d’Elbe !
De proche en proche, Talleyrand impose la notion de « droit public » dans les négociations. Mieux, il complète le tour de table de Vienne avec la Suède et l’Espagne, ce qui permet à Talleyrand de relativiser le front des vainqueurs et de se poser en arbitre entre le bloc anglo-autrichien et russo-prussien… Du grand art ! Certes Talleyrand cède sur la création d’États tampon autour de la France, d’un royaume des Pays-Bas incluant la Belgique, notamment, mais il s’est « imposé, explique Louis Madelin (1) avec une singulière autorité, au nom de son pays et de son roi jusqu’à faire baisser pavillon aux plus fiers vainqueurs de ce pays humilié. »
Si l’on considère que la Russie de 2022 n’est pas plus soluble que la France de 1814 dans la défaite, alors Vladimir Poutine ou plutôt son successeur auraient tout intérêt à s’inspirer du travail de Talleyrand. Pour mettre l’arme au pied et espérer reprendre pied dans le concert des nations.
Guillaume Malaurie