Trottoir interdit, casque obligatoire, vitesse limitée... Dès la rentrée, les trottinettes électriques et autres mini-engins motorisés seront censés être strictement encadrés dans l’Hexagone. Pour faire face aux déplacements anarchiques des trottinettes électriques et autres mono-roues et hoverboard, une nouvelle réglementation entre en vigueur en septembre.
C’est un phénomène de société. Même Usain Bolt s’y met ! L’ancienne star du sprint mondial a récemment fait la promotion, à Paris, de sa propre marque de trottinettes électriques. A Marseille, A Nice, comme dans la capitale, les engins de déplacement personnel motorisés (EDPM) sont même disponibles en libre-service, en deux clics.
Devant la croissance exponentielle des usagers motorisés, le gouvernement s’est penché sur les nouvelles règles à inscrire au Code de la route. Objectif : définir un cadre plus sécurisé pour les municipalités, utilisateurs et plateformes de location.
C’est la fin du feuilleton législatif. Adopté par le Sénat le 3 avril, le projet de loi d’orientation des mobilités (LOM) est examiné depuis mardi dernier par l’Assemblée nationale en dernière lecture. Objectif : contrecarrer la « loi de la jungle » des EDPM avancée par la ministre des Transports, Elisabeth Borne. Et aussi légiférer sur de multiples sujets comme le forfait mobilité, ou encore la régulation des plateformes de VTC, etc.
Focus sur les mesures qui seront applicables à la rentrée prochaine.
Qui est concerné ?
Tous les utilisateurs de trottinettes électriques, gyroroues, overboards ou autres vélos à assistance électrique, sont concernés... Toutefois, certaines catégories d’âge ne pourront plus conduire de petits bolides, puisque l’âge minimum est fixé à 8 ans.
Enfin, les rodéos en tandem sont terminés : une seule personne sera autorisée à circuler sur un EDPM.
Quel équipement obligatoire?
Dans un souci de protection, les utilisateurs âgés de moins de 12 ans seront obligés de porter un casque, comme les cyclistes.
Afin d’accentuer leur visibilité sur les voies adaptées, ils seront désormais contraints de porter un équipement rétro-réfléchissant. Et ce, de jour comme de nuit. Il peut s’agir d’un brassard, d’un gilet ou encore de bandes réfléchissantes incorporées à une tenue vestimentaire.
Toujours dans une logique de visibilité, des feux avant et arrière sont obligatoires sur l’engin, tous comme des dispositifs rétroréfléchissants (appelés dans le milieu les catadioptres).
Autre dispositif obligatoire, un frein et un avertisseur sonore.
Attention aux inconditionnels de la musique « au guidon » : les écouteurs et autres appareils susceptibles d’émettre du son seront proscrits.
Où peut-on rouler ?
Au revoir le trottoir... Cette interdiction concerne bel et bien tous les mini-engins. Pas uniquement les trottinettes.
La circulation pourrait néanmoins être autorisé à une seule condition : que le maire prenne des dispositions et les autorise dans un périmètre établi par arrêté.
Sur les trottoirs, l’usager doit tenir son engin en main sans faire usage du moteur.
Dans les agglomérations, ils doivent, si possible, rouler sur les pistes et bandes cyclables. Ou alors sur des routes limitées à 50 km/h.
En dehors des agglomérations, il leur sera interdit de rouler sur la chaussée. Seules les voies vertes et les pistes cyclables sont autorisées.
En ce qui concerne le stationnement, il peut se faire sur le trottoir, à la stricte condition qu’il ne gêne pas la circulation des piétons.
Quelles sanctions prévues ?
Il y a trois types de contraventions prévues pour les usagers commettant des infractions.
La première est de 35 euros, pour un simple manquement aux règles de circulations. Le niveau supérieur concerne la circulation sur les trottoirs sans y être autorisé. Une amende de 135 euros (classe 4) est prévue à cet effet. Certaines villes pourront néanmoins autoriser les usagers à rouler dessus.
La plus élevée culmine à 1 500 euros (infraction de classe 5) pour un dépassement de la vitesse maximale autorisée : 25 km/h.
Beaucoup de gens aujourd'hui changent de métier au moins une fois dans leur vie. Mais qu'en était-il au Moyen Âge?
«Que chacun reste dans sa profession sans jamais en changer.» Ainsi s'ouvre l'un des capitulaires de Charlemagne, émis dans les premières années du IXe siècle.
Aujourd'hui, les reconversions professionnelles n'ont jamais été si nombreuses: environ 9% des actifs et actives ont au moins une fois dans leur vie changé de métier. Derrière ce phénomène, on devine évidemment les effets délétères de la crise –près d'un tiers des reconversions se font après un licenciement– mais aussi la volonté d'un grand nombre de personnes d'avoir un travail qui leur plaise. Selon les statistiques officielles, plus de la moitié des reconversions sont en effet volontaires, même si ce pourcentage change beaucoup en fonction des domaines professionnels et de l'âge de celles et ceux qui changent de travail.
Qu'aurait donc pensé Charlemagne? Il faut réinscrire l'interdiction dans son contexte: à quoi pense l’empereur d’Occident lorsqu’il interdit ainsi à quiconque de faire un autre métier? Le terme latin utilisé est professio qui désigne au Moyen Âge une déclaration publique, et en particulier une déclaration de religion (c'est la «profession de foi»). Autrement dit, ce que vise Charlemagne ici, ce sont les clercs: ceux-ci ont en effet prononcé des vœux qui leur interdisent de quitter leur habit.
Cela dit, la suite du cartulaire précise immédiatement que les laïcs doivent eux aussi rester dans leur condition. Avec cette double précision, Charlemagne ne cherche pas à empêcher les reconversions professionnelles, mais à limiter au maximum la mobilité sociale. C'est bien ça qui fait peur: qu'un cordonnier devienne boulanger, tout le monde s'en moque (sauf ceux qui achètent son pain, mais c'est une autre histoire). Mais qu'un paysan devienne artisan, un artisan chevalier ou un clerc laïc: là est le danger. De tels changements brouillent en effet les frontières sociales, et risquent de conduire le monde au chaos. Si vous songez à vous reconvertir, aucune pression...
On connaît de nombreux exemples d'ascension sociale au Moyen Âge, en particulier à la fin de la période: des hommes partent de rien et, à force d'études, de travail, avec un coup de chance par-ci et un mariage habile par-là, obtiennent des postes importants, souvent synonymes de richesse et de gloire. Ainsi d'Audoin Chauveron, qui devient prévôt de Paris en 1381 ou encore Marco Polo, qui prétend que ses compétences linguistiques valent qu'on l'appelle «messire».
Mais cette mobilité sociale, importante, est généralement très mal vue. La société médiévale est une société d'ordres très attentive aux distinctions sociales et aux signes qui permettent de les repérer.
En interdisant les changements, Charlemagne fixe donc un idéal de stabilité: tout le monde à sa place, aucun changement, aucune évolution. Cet idéal, jamais atteint, participe de la construction de l'empire carolingien et contribue évidemment à mettre en valeur l'autorité du souverain: si personne n'a jamais le droit de changer de statut, cela revient à dire que le souverain ne craindra jamais aucune révolte ni aucun coup d'État –idée très importante pour les Carolingiens qui ont eux-mêmes pris le trône après un renversement politique. Cet idéal de stabilité est donc également un idéal de hiérarchie: quand tout le monde occupe une place fixe, il est facile de savoir qui est au-dessus de qui.
La méfiance profonde envers la mobilité professionnelle dure plusieurs siècles: au XVIIIe, Diderot écrit encore que «rien n'est plus funeste à la société que ces émigrations insensées» d'un métier à un autre. Au contraire, la pensée révolutionnaire va placer la mobilité sociale au cœur de la construction d'une société juste, composée de personnes égales. Comme l'écrit Rousseau, «tous les états sont indifférents, pourvu qu'on puisse en sortir: les gueux sont malheureux parce qu'ils sont toujours gueux».
Pouvoir changer de métier est donc une chance énorme. La mobilité professionnelle met en évidence notre liberté individuelle dans la construction de nos vies: on peut, plus ou moins facilement certes mais en tout cas sans blocage juridique, exercer n'importe quel métier.
Mais elle indique également que nous savons, plus aisément que les gens du Moyen Âge, prendre une certaine distance par rapport aux hiérarchies sociales et politiques: même si les inégalités économiques sont beaucoup plus importantes aujourd'hui qu'au Moyen Âge, le nombre de reconversions indique que nous refusons de figer ces hiérarchies. N'importe qui peut devenir n'importe quoi. À nous de savoir, pour parler comme Rousseau, sortir des états qui nous rendent malheureuses ou malheureux.