Malgré son nom, hérité d’un ancien titre de presse prestigieux, FranceSoir s’était récemment refait une santé avec la circulation de thèses complotistes, notamment sur le Covid-19.
MÉDIAS - Le site FranceSoir a finalement perdu son statut de service de presse en ligne, qui lui donnait notamment la possibilité de bénéficier d’aides publiques et d’avantages fiscaux, a indiqué ce mercredi 30 novembre la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP).
Réunie mercredi matin en commission plénière, la CPPAP « a décidé de ne pas renouveler la reconnaissance de service de presse en ligne à FranceSoir », a-t-elle déclaré à l’AFP, confirmant une information de la lettre spécialisée Mind Media.
Selon l’institution composée de représentants de l’État et des éditeurs de presse, « FranceSoir ne respectait plus l’ensemble des critères » fixés par décret pour obtenir cette qualification. Contactée par l’AFP mercredi soir, la direction du site n’était pas disponible pour réagir dans l’immédiat.
Selon le site Mind Media, à l’origine de l’information, la commission estime que le site présente désormais un « défaut d’intérêt général », en raison notamment de contenus qui portent « atteinte à la protection de la santé publique ». La circulation d’informations erronées sur la pandémie de Covid-19 aurait entraîné nouvelle démarche de la Commission. Cette dernière a d’ailleurs annoncé que « la décision motivée sera communiquée directement à l’éditeur dans les meilleurs délais », sans plus de précisions.
Le média en ligne, qui a conservé le nom d’un prestigieux quotidien disparu, est accusé depuis plusieurs années de relayer des thèses complotistes. Mais il avait réussi à conserver son statut de site d’information politique et générale lors du dernier examen de la CPPAP en avril 2021. « La preuve a été apportée de la présence de deux journalistes permanents et quatre pigistes », soulignait alors le ministère de la Culture.
À l’époque, « l’administration était frileuse », craignant de ne pas avoir des arguments suffisamment solides à faire valoir en cas de recours du site, a expliqué à l’AFP une source proche du dossier. Les fondements de cette nouvelle décision n’étaient dans l’immédiat pas connus.
Le retrait de ce statut entraîne notamment la perte d’une exonération fiscale sur les dons, d’un taux de TVA réduit, et complique les démarches pour obtenir une carte de presse. En septembre 2021, Google avait déjà coupé l’accès de FranceSoir à son réseau publicitaire, le privant ainsi d’une partie de ses revenus, après la diffusion d’un reportage sur France 2 intitulé « Fake News, la machine à fric ».
Quelques mois auparavant, Google avait déjà déréférencé FranceSoir de son service Google Actualités et suspendu sa chaîne YouTube. Début septembre 2022, le tribunal de commerce de Paris a débouté Shopper Union, la société éditrice du site FranceSoir, de son recours contre Google.
Nous avons besoin de vous. De votre mobilisation. Du rempart de vos consciences.
Il n’est jamais arrivé que des médias, qui défendent souvent des points de vue divergents et dont le manifeste n’est pas la forme usuelle d’expression, décident ensemble de s’adresser à leurs publics et à leurs concitoyens d’une manière aussi solennelle.
Si nous le faisons, c’est parce qu’il nous a paru crucial de vous alerter au sujet d’une des valeurs les plus fondamentales de notre démocratie: votre liberté d’expression.
Aujourd’hui, en 2020, certains d’entre vous sont menacés de mort sur les réseaux sociaux quand ils exposent des opinions singulières. Des médias sont ouvertement désignés comme cibles par des organisations terroristes internationales. Des États exercent des pressions sur des journalistes français “coupables” d’avoir publié des articles critiques.
La violence des mots s’est peu à peu transformée en violence physique.
Ces cinq dernières années, des femmes et des hommes de notre pays ont été assassinés par des fanatiques, en raison de leurs origines ou de leurs opinions. Des journalistes et des dessinateurs ont été exécutés pour qu’ils cessent à tout jamais d’écrire et de dessiner librement.
“Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi”,
proclame l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, intégrée à notre Constitution. Cet article est immédiatement complété par le suivant: “La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.”
Pourtant, c’est tout l’édifice juridique élaboré pendant plus de deux siècles pour protéger votre liberté d’expression qui est attaqué, comme jamais depuis soixante-quinze ans. Et cette fois par des idéologies totalitaires nouvelles, prétendant parfois s’inspirer de textes religieux.
Rappelons ici, en solidarité avec Charlie Hebdo, qui a payé sa liberté du sang de ses collaborateurs, qu’en France, le délit de blasphème n’existe pas.
Bien sûr, nous attendons des pouvoirs publics qu’ils déploient les moyens policiers nécessaires pour assurer la défense de ces libertés et qu’ils condamnent fermement les États qui violent les traités garants de vos droits. Mais nous redoutons que la crainte légitime de la mort n’étende son emprise et n’étouffe inexorablement les derniers esprits libres.
Que restera-t-il alors de ce dont les rédacteurs de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 avaient rêvé? Ces libertés nous sont tellement naturelles qu’il nous arrive d’oublier le privilège et le confort qu’elles constituent pour chacun d’entre nous. Elles sont comme l’air que l’on respire et cet air se raréfie. Pour être dignes de nos ancêtres qui les ont arrachées et de ce qu’ils nous ont transmis, nous devons prendre la résolution de ne plus rien céder à ces idéologies mortifères.
Les lois de notre pays offrent à chacun d’entre vous un cadre qui vous autorise à parler, écrire et dessiner comme dans peu d’autres endroits dans le monde. Il n’appartient qu’à vous de vous en emparer. Oui, vous avez le droit d’exprimer vos opinions et de critiquer celles des autres, qu’elles soient politiques, philosophiques ou religieuses pourvu que cela reste dans les limites fixées par la loi. Rappelons ici, en solidarité avec Charlie Hebdo, qui a payé sa liberté du sang de ses collaborateurs, qu’en France, le délit de blasphème n’existe pas. Certains d’entre nous sont croyants et peuvent naturellement être choqués par le blasphème. Pour autant ils s’associent sans réserve à notre démarche. Parce qu’en défendant la liberté de blasphémer, ce n’est pas le blasphème que nous défendons mais la liberté.
Nous avons besoin de vous. De votre mobilisation. Du rempart de vos consciences. Il faut que les ennemis de la liberté comprennent que nous sommes tous ensemble leurs adversaires résolus, quelles que soient par ailleurs nos différences d’opinions ou de croyances. Citoyens, élus locaux, responsables politiques, journalistes, militants de tous les partis et de toutes les associations, plus que jamais dans cette époque incertaine, nous devons réunir nos forces pour chasser la peur et faire triompher notre amour indestructible de la Liberté.
DéfendonsLaLiberté
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Le 26 mars dernier, après deux années de débats houleux (et une grande bataille pour Julia Reda, notre ancienne eurodéputée), le parlement européen adoptait une directive européenne du droit d’auteur.
Quand on dit houleux, on a toujours en tête l’eurodéputé Jean-Marie Cavada accusant les GAFAM de « corruption » et d’être « terroristes Pac-Man » ou Wikipedia de faire campagne « avec l’argent de Google ». [1]
Dans cette directive[0], il y a un article sur la presse (l’article 15, anciennement article 11). Cet article prévoit la création d’un droit voisin pour les éditeurs de presse. Pour simplifier, à chaque fois que les plate-formes en ligne (Google, Facebook) utilisent un contenu issu d’un site de presse, elles doivent verser un droit d’utilisation au site de presse. Une exception cependant, faire un simple lien vers un site est exclu du droit voisin (taxer un lien internet, c’est tuer internet … on n’est pas passé loin du pire).
Pour le moment, quand vous copiez/collez le lien d’un article de presse sur Facebook ou quand vous allez dans Google actualités, vous avez le lien vers l’article, mais aussi le titre de l’article, une illustration et une accroche de l’article. C’est cette technique qui est visée par la directive.La France, toujours à la pointe, est l’État qui a transposé le plus rapidement cette directive dans son droit, elle a été publiée fin juillet. La loi va donc entrer en vigueur dans peu de temps …
Le problème, c’est que Facebook et Google ont décidé d’appliquer la loi. Pour cela, ils ont mis en place un système permettant aux éditeurs de presse d’autoriser ou non les illustrations et courtes citations. Si l’éditeur est d’accord, les illustrations et courts extraits seront là, sinon, un simple lien sera affiché.
Scandale chez les éditeurs de la presse française [2], on dénonce une décision unilatérale, les GAFAM refuseraient de respecter « l’esprit et la lettre » de la loi.Pire encore, les choix proposés par les GAFAM mépriseraient la démocratie, la souveraineté nationale et européenne. C’est la porte ouverte vers les infox et la désinformation.
Oui parce que bon, les GAFAM qui fournissent gratuitement un service à leurs utilisateurs, sans publicité, qui génèrent gratuitement un flux important de visiteurs vers les sites de presse et qui proposent d’ailleurs aux éditeurs de presse des plateformes d’annonces publicitaires, des outils de statistiques précises des visiteurs… Ce n’était pas assez. Il fallait bien, en plus de fournir du trafic gratuitement, que les GAFAM paient pour cela…
Alors naturellement, les GAFAM, moyennement emballés par l’idée de payer un outil qui génère gratuitement des visites sur les sites de presse, ont décidé d’appliquer la loi. Avec une approche simple. Soit vous êtes d’accords pour que l’on génère les liens comme d’habitude, gratuitement, avec un joli petit encadré qui met l’eau à la bouche comme avant, soit vous voulez qu’on paie et on proposera un simple lien.
C’est tellement évident qu’on se demande pourquoi personne n’y avait pensé plus tôt, non ?
Lors de la précédente mandature, Julia Reda, une députée européenne issue du Parti Pirate allemand, a alerté de nombreuses fois sur les failles de cette directive [3] [4] Tim Berners-Lee lui-même s’est inquiété des risques possibles de cet article [5].
En septembre 2018, devant le ministère de la Culture, une phrase est lancée : « Cela fait des années que des pays d’Europe, l’Espagne, l’Allemagne ont essayé d’adopter une rémunération normale pour que Google ou Facebook, qui s’enrichit grâce à la presse, rémunère aussi votre travail.« [6]
Et en effet, Monsieur Tronc, numéro 1 de la SACEM, a raison. L’article 15, l’Allemagne et l’Espagne l’ont tenté.
L’Espagne est un cas intéressant. En 2014, le pays décide de mettre en place une compensation financière aux éditeurs de presse par les sites qui indexent et affichent une partie de leur contenu. Cette taxe, non négociable (l’éditeur ne peut pas autoriser gratuitement la publication de ses articles) à une conséquence simple, la fermeture de Google Actualités en Espagne.
Alors le législateur bruxellois a pris en compte ce problème, et a proposé que les éditeurs de presse puissent ou non réclamer cette compensation, en se disant qu’avec 500 millions d’habitants, on ferait sans doute plus peur que l’Espagne et ses 46 millions d’habitants …
Prenons maintenant le cas de l’Alllemagne. La loi allemande est très proche de la directive européenne. Après quelques semaines d’application, le leader de la presse allemande (l’éditeur Axel Springer) voit le trafic vers ses sites de presse chuter de 40 %. Presque 100 000 € de perte par jour et par site. Après quelques jours, l’éditeur accepte les conditions du moteur de recherche.
Du coup, entre l’Allemagne et l’Espagne, on a un test grandeur nature concernant 25 % de la population Européenne… Il faut croire que ce n’était pas suffisant pour la France…
Les éditeurs de presse ont beau tenter de retourner le problème dans tous les sens, de trouver l’approche des GAFAM méprisante ou déloyale… Ce qui se passe en ce moment était prévisible, avait été annoncé, par beaucoup de monde, par des élus, par des mouvements citoyens, par des lobbies, par les GAFAM eux-mêmes.
Alors, finalement, qu’est-ce qu’on peut dire à une personne qui se plaint d’avoir mal après s’être tiré une balle dans le pied ?
SOURCES
[0] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32019L0790&from=FR
[1] https://www.nextinpact.com/brief/directive-droit-d-auteur—les-gafa–des—terroristes-pac-man—selon-cavada-8226.htm
[2] https://www.lalsace.fr/france-monde/2019/10/27/pourquoi-vous-ne-voyez-plus-de-photos-quand-vous-partagez-nos-articles-sur-facebook
[3] https://juliareda.eu/2017/12/detruire-le-web/
[4] https://juliareda.eu/eu-copyright-reform/extra-copyright-for-news-sites/ [EN]
[5] https://www.bbc.com/news/technology-44482381 [EN]
[6] https://www.nextinpact.com/news/107692-directive-droit-dauteur-leurodeputee-julia-reda-accuse-lafp-conflit-dinterets.htm
[7] https://www.01net.com/actualites/un-jour-avant-sa-fermeture-les-media-espagnols-regrettent-deja-google-news-637166.html
[8]https://www.touteleurope.eu/actualite/qu-est-ce-que-la-directive-europeenne-sur-le-droit-d-auteur.html
Nous ne voulons pas que Google nous paie pour enrichir les liens qu'il référence. Alors que les voix qui soutiennent cette redevance n'ont jamais été aussi fortes et médiatisées, Numerama a choisi d'expliquer les raisons pour lesquelles nous trouvons qu'elle est absurde.
L’économie des médias est un sujet qui n’entre pas exactement dans notre ligne éditoriale. Par la force des choses, étant un média 100 % indépendant qui vit du web et rémunère 8 journalistes en CDI à temps plein, dans une entreprise qui en compte une trentaine, nous pratiquons en revanche cette économie au quotidien. Depuis la massification du numérique, la presse se dit très souvent en crise. Crise d’audience, crise de revenus, crise de technique, crise de format, crise de légitimité, crise de confiance.
Dans un premier temps, le discours alarmiste cherchait à enclencher un cycle de transformation des médias, ce qui est positif : les esprits cogitent quand ils sont menacés. Ces derniers temps, il cherche surtout à trouver des coupables quand la transformation numérique ne s’est pas faite.
Le 22 octobre, une « lettre ouverte » signée par des centaines de journalistes a été publiée et relayée massivement par l’AFP, plaçant sa dépêche en copier-coller chez tous les médias partenaires. La cible ? Google. Google, pointé du doigt pour avoir trouvé comment éviter de payer la presse pour référencer ses liens dans le moteur de recherche, les applications liées à Google News et à Discover. Cette « lettre ouverte » est la continuité d’une campagne de lobbying au niveau européen, menée de longue date et ayant abouti à la Directive droit d’auteur, dans laquelle plusieurs médias, AFP en tête, sont juges et partis. Cette position a été pointée du doigt par l’ancienne députée Julia Reda pour son manque de déontologie : sous couvert d’information neutre, ces médias créent ou relaient un discours à sens unique, qui se permet en plus, bien souvent d’englober toute la presse européenne dans un grand navire en lutte contre des ennemis imaginaires.
En tant que média, Numerama s’est contenté d’expliquer tour à tour les dangers de cette loi pour le web, l’inutilité de ses contours légaux, mais a aussi relayé les critiques adressés par cette presse aux géants du web — qui sont loin d’être toutes illégitimes. Nous estimons que pour nos lectrices et nos lecteurs, nous avons fait notre travail d’information.
Aujourd’hui, comme la parole est subtilisée et projetée de manière démesurée par les anti-référencement sur Google, jusqu’à nous inclure dans des formulations englobantes, nous avons décidé de communiquer sur notre position et nos choix.
Le référencement sur Google est bénéfique
Être anti-Google est à la mode. Ajouter « contre les GAFA » dans un business plan permet d’augmenter une levée de fonds de quelques euros. Proposer des services technologiquement dépassés pour être contre est acclamé, relayé, encensé parfois par la classe politique. C’est une posture reprise récemment par la presse qui a un ennemi tout trouvé, volant à la fois ses audiences, ses revenus publicitaires… et son contenu.
Pour nous, cette position est intenable. Sans verser dans la caricature, nous ne pouvons que nous rappeler à quel point le web que nous connaissons doit à Google — et à l’indexation des contenus de manière générale. Pour notre média, Google est un kiosque imparfait mais vertueux, avec une puissance que peu d’entités ont eu auparavant dans l’histoire de la presse. Il nous permet tout à la fois d’inscrire nos articles dans une temporalité longue par du référencement naturel, mettre en avant nos articles dans des outils comme Google News ou pousser des sujets aux lectrices et aux lecteurs sur Android et iOS. Et, grosso modo, Google fait plutôt bien son travail, qui consiste à amener la personne en quête d’information vers un article répondant à son interrogation.
C’est pour cela que, depuis de nombreuses années, ce jeu est bénéfique pour nos médias. Comment accepter l’absurdité de croire que mieux renseigner des lecteurs potentiels sur le contenu de l’article qu’ils vont voir après le clic serait négatif pour nous ? Les expérimentations de Google dans le moteur de recherche ont toutes cette finalité : non seulement amener rapidement vers un article de presse pertinent, mais aussi, informer au maximum sur la pertinence du clic.
Et c’est pour cela que nous sommes heureux de fournir des éléments à Google et aux autres moteurs de recherche sur le contenu de nos papiers : titre, image de une, description, accès aux rubriquage, parfois questions en FAQ, graphiques, tableaux. Nous craindrons en réalité le jour où Google nous demandera de payer pour ce travail de référencement gratuit, qui nous amène audience et, mécaniquement, revenus — ce qui vaut aussi bien pour les modèles de presse gratuite que pour les modèles sur abonnement.
Qui pourrait penser fournir une version de son magazine à un kiosquier physique dénuée de toute information, de toute rubrique, de toute image de couverture, avec simplement le titre du média ? Qui, ce faisant, oserait demander au kiosquier une redevance par élément figurant sur la une ? Personne. Et pourtant, c’est ce que cette presse demande à Google : payer la presse pour permettre de rémunérer la presse, sous couvert d’une lutte anti-GAFA bien pratique pour politiser le message.
Ce que Numerama refuse catégoriquement, tant les problèmes générés seraient dangereux.
Ce discours est une manière de mettre sous le tapis les problèmes soulevés par le numérique et la presse au numérique. L’AFP, en tête de file de la contestation, n’a pas cru bon de changer son business model reposant sur la vente de dépêches aux autres médias, qui copient-collent à outrance des textes écrits par les journalistes de l’agence, retouchant souvent maigrement le contenu. Le web n’aime pas le contenu dupliqué (duplicate content), Google non plus (et les jeunes journalistes dégoûtés du métier à cause du batonnage non plus, mais c’est une autre histoire) : un contenu répété tel quel sur des dizaines de médias perd de sa valeur pour un moteur de recherche. C’est une chose sue depuis 20 ans : l’AFP n’avait-elle pas l’occasion de penser à sa transformation économique pour coller aux nouveaux enjeux du numérique ?
Pour ces médias habitués aux intraveineuses de subventions publiques, faire payer pour des liens hypertexte (constituante technique du web qui a une valeur inestimable de citation et de maillage de « la toile ») est une manière de continuer à faire ce qu’ils font de longue date, sans se remettre en question. Ils ne voient pas le problème à greffer un modèle économique sur un fait technique, qu’ils maîtrisent d’ailleurs souvent mal : nous ne comptons plus les fois où nos articles originaux ou enquêtes exclusives sont repris sans lien — même si certains confrères et consœurs sont irréprochables en la matière, et nous les en remercions.
De la même manière, rémunérer la presse pour du référencement augmenté inscrit une différenciation entre un site web et un site web d’information. Et entre les deux, la frontière est parfois ténue : aux États-Unis, la section recettes du New York Times est plébiscitée par ses lecteurs et ses lectrices. Est-ce de la presse ? Et Marmiton, est-ce de la presse ? Faut-il dès lors rémunérer le journal pour la même typologie de contenu que le « site web » ? Google a raison quand il dit qu’il ne faut pas se risquer à créer une relation commerciale pour le référencement naturel, qu’importe l’acteur avec qui il négocie : ce n’est pas son rôle, c’est celui des espaces publicitaires qui apparaissent avant les résultats.
L’insistance de la presse après le refus de Google de payer est tout aussi problématique : elle montre que sa seule préoccupation est d’être rémunérée d’une manière ou d’une autre pour être référencée. Aujourd’hui, la solution de Google a été de dire que le référencement ne serait pas touché par la décision, ou non, de transmettre des informations supplémentaires pour enrichir les résultats. Demain, Google pourrait tout simplement proposer d’arrêter de référencer le contenu des médias… qui dépendent, sur le web, massivement de Google pour exister. Économiquement, la fermeture de Google News en Espagne a été néfaste pour les médias : une leçon que ni l’Europe, ni la France, ne semblent retenir.
Cette dépendance du lectorat européen à Google est un vrai problème, mais ce n’est, encore une fois, pas celui que la presse a choisi de régler. D’autres acteurs, plus malins et plus en phase avec les attentes de nos lectorats, s’en chargent : Apple a son Apple News, Samsung a Upday et les agrégateurs, parfois de grande qualité, ont un terrain de choix à occuper. La presse est encore passée à côté d’une opportunité et ces business construisent intelligemment la fin (même si relative) de l’hégémonie de Google pour accéder aux articles.
Pour résumer notre position, nous pensons que vouloir faire payer Google pour des absurdités liées au référencement est une très mauvaise idée pour la presse en ligne. La Directive droit d’auteur est d’ailleurs si mauvaise et si peu adaptée aux enjeux modernes que Google peut refuser légalement de payer une redevance en incluant un opt-in — beaucoup de médias, ceux du groupe Humanoid inclus, sont d’ailleurs déjà prêts, d’après Mind News.
Plutôt que de demander rémunération pour justifier l’immobilisme, nous appelons la presse à se poser les bonnes questions pour se transformer efficacement et envisager un avenir où Google n’est qu’un cadre de plus pour référencer du journalisme de qualité.
Google référence mal ? Regardons comment, et où sont distribués nos contenus. Google a pris des revenus publicitaires ? Le Nieman Lab a montré à quel point imputer ces pertes aux géants du web était ridicule : réfléchissons plutôt à la manière dont fonctionne notre rémunération et la monétisation de nos espaces publicitaires. Google gagne de l’argent avec notre travail ? Ce n’est que marginalement vrai : Google gagne de l’argent en affichant de la publicité à ses utilisateurs. Si nos articles ne sont plus dans Google, d’autres, peut-être moins bons, prendront leur place — Discover et Actualités n’ont pas d’espace publicitaires associés.
Alors si demain, la question nous est posée de savoir si nous souhaitons être mis dans le même panier que la presse et disparaître des moteurs de recherche ou être sortis de cette case pour continuer à proposer le contenu que nous espérons de qualité à toujours plus de lectrices et de lecteurs, nous prendrons la deuxième option avec regret. Regret que « la presse » avec laquelle nous partageons tant de valeur se soit tirée une balle dans le pied et qui, par ricochet, ait touché aussi celles et ceux qui voyaient la catastrophe arriver et tentaient de mettre en garde.
Contrairement à de nombreux médias, Numerama ne touche ni subvention publique, ni subvention privée, n’a pas touché d’argent du Fonds Google (DNI) ou des initiatives similaires portées par d’autres géants du web pour accompagner la transformation numérique des publications en ligne. Numerama est présent sur Google News, Upday, Squid, Flipboard et d’autres agrégateurs avec lesquels nous avons des partenariats — non rémunérés — de diffusion.
Facebook fait part de son interprétation du droit voisin de la presse en France. Le résultat est grosso modo le même que pour Google. En test, un onglet Facebook News est progressivement déployé aux USA et pourrait ultérieurement concerner la France.
Des éditeurs de presse en France ont décidé de porter plainte contre Google auprès de l'Autorité de la concurrence pour abus de position dominante. Dans le collimateur, l'adaptation du moteur de recherche à la nouvelle législation créant un droit voisin pour la presse.
Par défaut, Google a fait le choix de ne pas afficher des liens enrichis pour des articles (avec aperçus des articles et petites images). Les éditeurs et agences de presse peuvent donner leur autorisation pour ces contenus enrichis, mais sans rémunération en contrepartie.
Du côté de Facebook, le réseau social fait aussi le choix de ne pas rémunérer pour les liens enrichis dans la mesure où ce sont les éditeurs de presse qui décident eux-mêmes de la publication sur sa plateforme et donnent de facto leur autorisation.
Pour ce qui est présenté comme " une très petite part des contenus " avec le partage des utilisateurs " sans avoir reçu le consentement des éditeurs de presse ", Facebook écrit que les éditeurs de presse " auront la possibilité de nous donner leur accord et de nous informer de leur volonté que ces liens soient affichés dans un format enrichi. " Sinon, ce sera un lien avec un titre.
L'un dans l'autre, il est au final à retenir que Facebook ne veut pas non plus rémunérer la presse pour les liens ou formats enrichis.
Dans le même temps, Facebook précise qu'il discutera avec les éditeurs de presse pour " créer un espace dédié aux actualités. " Un onglet Facebook News qui fait aujourd'hui l'objet d'un lancement aux États-Unis dans le cadre d'un test.
Pour les débuts de ce test sur l'application mobile de Facebook, le déploiement sera progressif aux États-Unis et ne concernera que quelques utilisateurs avec des informations générales, thématiques, diverses et locales. Une partie mais pas tous les éditeurs partenaires recevront une rémunération.
Avec des options de personnalisation et de contrôle pour les utilisateurs, Facebook News fait appel à une sélection d'articles par une équipe spécialement formée en fonction de directives publiques et avec une " indépendance éditoriale. "
Les éditeurs de presse se rebiffent contre le Google et ses règles pour s'adapter à la création d'un droit voisin. Même s'ils sont largement obligés de les accepter.
C'est aujourd'hui que la transposition de la directive européenne créant un droit voisin pour des agences et éditeurs de presse est entrée en vigueur en France. Une date symbolique qui donne lieu à des représailles.
Pour se mettre en conformité, Google a fait le choix avec les résultats de recherches de ne pas afficher par défaut des aperçus d'articles avec quelques lignes ou les petites images. Les éditeurs et agences de presse peuvent donner l'autorisation d'afficher des contenus enrichis, mais sans rémunération en contrepartie.
De la sorte, Google se soustrait à un paiement pour des droits voisins. Pour cette adaptation à la nouvelle législation, des critiques ont fusé en estimant qu'elle bafoue l'esprit de la directive européenne. Le ministre de la Culture avait appelé à " une véritable négociation globale entre Google et les éditeurs. "
Résultat… les éditeurs de presse français ont décidé de porter plainte contre Google devant l'Autorité de la concurrence pour abus de position dominante.
Google a un levier fort à sa disposition. Son moteur de recherche est un important pourvoyeur de trafic et c'est pour cela que des éditeurs de presse ont finalement accepté que leurs extraits soient utilisés gratuitement.
Aux Échos, Marc Feuillée, directeur général du Figaro, président du Syndicat de la presse quotidienne nationale et vice-président de l'Alliance de la presse d'information générale, déclare : " L'Autorité de la concurrence doit faire cesser cet abus. Il est nécessaire de prendre des mesures conservatoires pour aller vite car il faut tout stopper, avant que la situation ne devienne irréversible. "
Du point de vue de Google, c'est un service gratuit qui est offert aux éditeurs de presse pour leur permettre de générer du trafic en aiguillant les internautes et leur permettant d'attirer un nouveau public.
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