L’une des choses fascinantes avec les réseaux sociaux, c’est la rapidité de diffusion des informations qu’ils autorisent. Une prof agressée par un élève ? En quelques heures, le hashtag #PasdeVague réunit des dizaines de milliers de témoignages de profs. Les réseaux sociaux permettent de toucher un immense public d’une façon quasi immédiate : face à la perquisition de son domicile, Jean-Luc Mélenchon se « branche » sur facebook live, et la nouvelle fait aussitôt le tour du web. Les pouvoirs médiévaux auraient probablement souhaité disposer d’un moyen aussi efficace : on imagine déjà le pape Urbain II tweetant un #Dieuleveut pour appeler à une croisade… Mais, en l’absence de ces réseaux, comment s’y prenait-on au Moyen Âge pour toucher autant de gens d’un coup ?
Pas de comparaison abusive : clairement, si on s’intéresse à la question de la rapidité de la diffusion des informations, il n’y a pas photo, le Moyen Âge est loin derrière. Un cheval ne fait guère qu’une centaine de kilomètres par jour au mieux. Un pigeon voyageur, s’il évite flèche et faucons, en fera dix fois plus. Un homme beaucoup moins. Entre tout ça, les nouvelles cheminent à leur rythme.
Prenons l’exemple de la prise de Jérusalem en 1187 : il s’agit d’une nouvelle cruciale, et pourtant elle met au moins 5 semaines à atteindre Rome, d’où elle est ensuite diffusée dans toute la chrétienté. Ce qui est très lent, on est bien d’accord… mais en même temps assez rapide finalement à une époque où il faut un mois pour faire l’aller-retour entre Paris et Lyon ! (oui oui, vous avez bien lu, un mois. Pensez-y la prochaine fois que vous râlez contre les 10 minutes de retard de la Sncf).
Cela dit, il reste compliqué de diffuser un message rapidement à un grand nombre de personne. Or, pour l’Église, c’est une priorité forte. Du coup celle-ci innove : alors qu’auparavant la prédication avait lieu durant la messe, donc dans une église, devant un nombre forcément limité de personnes, on commence à partir du XIIe siècle à prêcher à l’extérieur, devant toute la foule rassemblée.
Cela suppose des adaptations nombreuses, dont les ordres mendiants deviennent les spécialistes. D’abord, il faut prêcher en langue vulgaire, et pas en latin – même si on a des exemples, plus tardifs, de grands prédicateurs capables de toucher les foules en parlant en latin. Ensuite, il faut perfectionner ses talents oratoires, et notamment insérer des petites histoires dans son sermon : ce sont les exempla, et on aura même des recueils de milliers d’exempla dans lesquels les clercs vont pouvoir venir piocher.
Et puis il faut des innovations techniques. Pour que les gens puissent se rassembler devant l’église, il faut qu’il y ait de la place… et on va donc ouvrir de grandes places urbaines devant les cathédrales. Celles-ci, qui modifient profondément le tissu urbain et la physionomie de la ville, se multiplient au XIIIe siècle. Mais, en l’absence de micro, comment faites-vous pour vous faire entendre d’une foule de milliers de personnes sans hurler à vous casser la voix ? Très simple : vous disposez au milieu de la foule des crieurs qui répètent votre discours au fur et à mesure. Comme des relais radios, ou comme des milliers de tweets relayant un même message pour en assurer la diffusion rapide. Et, évidemment, vous travaillez votre gestuelle, afin de communiquer à la foule des émotions même quand on ne vous entend pas.
Dès cette époque, il existe des professionnels de l’information : marchands, ambassadeurs, espion, etc. Ce sont d’ailleurs les marchands qui sont à l’origine des premiers journaux ! Mais à côté de ces canaux, on est mal renseignés sur les réseaux plus horizontaux qui jouent probablement un rôle-clé : artistes, pèlerins, étudiants, brigands véhiculent nouvelles, informations, rumeurs sur les routes du monde. En quelques mois, une nouvelle peut faire le tour de la chrétienté.
Prenons l’exemple de la prédication de la croisade. D’un côté, on a des canaux officiels : bulles du pape, légats pontificaux, archevêques organisant la prédication ou la levée des fonds, etc. On pourrait comparer ça au journal de 20h, quand le président vient expliquer ses prochaines mesures politiques. Et puis à côté on a une prédication diffuse, en réseau : en 1320, ce seraient ainsi plusieurs prêtres, plus ou moins subversifs, qui lancent sur les routes des milliers de Pastoureaux dans une croisade totalement non-officielle (et d’ailleurs condamnée par l’Église). Ça, ce serait plutôt l’équivalent d’un mouvement comme #metoo, lancé à l’horizontal, sans passer par des canaux de communication classiques. (bon, sauf que #metoo n’a pas invité à brûler des villes et à convertir de force des juifs, mais vous m’avez compris).
Le nombre très élevé de gens qui s’engagent dans cette « croisade des Pastoureaux » souligne que, dès le Moyen Âge, les foules savent s’organiser et se mobiliser autour de grandes causes, sans attendre forcément des incitations venues d’en haut. Ça a été le cas il y a peu avec l’appel pour la « marche pour le climat » du 8 septembre 2018, lancé par un anonyme sur Facebook et qui a rencontré un succès mondial. Et les autorités sont souvent dépassées par le succès de ces mouvements : en 1095, le pape est le premier surpris du nombre de croisés qui partent vers Jérusalem.
Pas besoin donc d’attendre les réseaux sociaux pour voir apparaître des causes « virales », enflammant la société. Les échelles temporelles et géographiques ne sont évidemment pas les mêmes : #metoo fait le tour du monde, de l’Amérique à l’Australie, en quelques jours, alors que l’organisation de la troisième croisade prend… 4 ans. Mais il s’agit là d’une différence de degré : même sans twitter, les sociétés médiévales savaient déjà faire circuler les informations et mobiliser les foules, à une très large échelle.
La Loi de Renseignements et le Fichier TES sont passés par là et je sens que ça ne tourne plus rond. Tous les appareils de contrôle, légaux ou non, se multiplient partout sur la planète, je n’aime pas l’idée. Les états ont grignoté l’espace et reprennent la main à pas feutrés. On bannit pour une origine ou pour une opinion, sans subtilité. Dans certains pays, et pas des dictatures, on vous demande d’ouvrir votre Facebook ou même de donner vos mots de passe. J’ai en magasin quelques anecdotes à ce sujet qui font peur. Je n’ai pas envie, jamais, de justifier des opinions et des propos à qui que ce soit, ici ou ailleurs. Alors je le fais une bonne fois pour toutes aujourd’hui et je dis adieu à 31 500 tweets.
Les temps ont changé depuis juillet 2007, date à laquelle je me suis lancé sur Twitter. 31 500 tweets plus tard, quiconque voudrait me faire dire un truc pourrait le faire sans difficulté. C’est la guerre des mots et des GIFs, la bataille du temps qui ne passe plus. Ce que vous dites un jour est gravé pour toujours, vos propos s’empilent et s’empalent sur le mur de l’actu chaude sans aucune exigence de vérité. Ce qui est dit est dit, cochon qui s’en dédit, peu importe le sens, le contexte, le droit à la connerie, au changement d’opinion ou à cette sublime contradiction qui fait de nous ce que nous sommes. Certes, personne ne me cherche de poux aujourd’hui, mais dans six mois, deux ans ou même dix? Et vous?
Je n’ai plus confiance
Ni dans les techno-corporations dirigées par des solutionnistes aux ambitions floues, illégitimes et hors contrôle. Ni dans les états qui, profitant de nos peurs, placent leurs mouchards dans nos réseaux. La ficelle est fine pour l’instant, mais elle grossit. Je ne crois pas à la neutralité de ceux qui nous observent. Il y a derrière chaque action une intention, et je ne sais rien des intentions de nos dirigeants actuels et futurs. Nous avons offert sur un plateau aux prochains gouvernants les outils de notre soumission et ça me tend. Je ne crois pas non plus à l’inviolabilité des serveurs. D’ailleurs, je sais bien que quelque part sur cette planète mes Tweets sont gravés et dupliqués, pour toujours.
Parano? Pfff… Plus envie d’argumenter, faites comme vous le sentez.
Les règles du jeu ont changé. Loin de moi l’idée de supprimer mon compte, mais le temps de l’innocence est révolu.
PS: à la demande générale. Pour sauvegarder ses tweets, vous pouvez le faire sur Twitter, dans paramètres, et vous téléchargez un fichier. Pour supprimer vos Tweets en masse il y a, entre autres, l’appli payante DLTTR. Vous pouvez choisir de supprimer les tweets de l’heure, du jour, du mois, de l’année ou tous vos tweets. Cela m’a pris 16 minutes pour 31 500 tweets.
Pour stalker vos cousins éloignés, les grandes tantes et... les donneurs de spermes.
Repéré sur The New York Times
La démocratisation des kits de tests génétiques a engendré une nouvelle tendance: les tests ADN récréationnels. Vous voulez connaître les secrets de vos chromosomes? Il suffit de vous rendre sur un des sites qui proposent ce genre de test –23andme et Ancestry.com. Selon la Société internationale de généalogie génétique, presque huit millions de personnes dans le monde ont déjà fait analyser leur ADN via ces services –en particulier aux États-Unis.
Après réception des résultats, il est proposé aux clients de «découvrir des proches parents», qui auraient aussi fait le test et qui se seraient eux aussi inscrits sur ce genre de sites. Si des points communs dans les génomes respectifs apparaissent, un mise en relation est proposée, quaisment comme une banale suggestion d’amis sur Facebook. En France, faire tester son ADN à des fins récréationnelles est interdit. Toutefois, il est possible de passer outre la loi en se faisant livrer le kit dans un autre pays.
En 2016, Nolwenn Le Blevennec, journaliste à Rue89, avait comparé son expérience avec les tests ADN à une inscription sur un réseau social: «23andme me propose de découvrir les gens inscrits sur son site qui partagent des séquences de leur ADN avec moi. Le plus souvent, des cousins éloignés, au cinquième degré ou plus. [...] Dans mon cas, le premier profil qui sort est très proche de moi. [...] 23andMe me dit qu’il s’agit surement d’un demi-frère», expliquait-elle à l’époque.
La génétique reprend les codes qui ont fait le succès de Facebook
En utilisant leur base de données génétiques pour «matcher» des clients volontaires avec des personnes qui leur sont génétiquement apparentées, les sites comme 23andme et Ancestry.com reprennent simplement les codes des réseaux sociaux. Rappelons qu'à sa création, le but de Facebook était de connecter les gens entre eux.
«Dans de nombreux cas, des parents éloignés se réunissent, deviennent amis, partenaires de voyage ou confidents. Les enfants adoptés se créent des liens avec leurs familles biologiques», note Alyson Krueger dans le New York Times.
Dyan deNapoli, conférencière TED, fait partie des millions de personnes ayant fait tester leur ADN. Deux mois après avoir craché dans une éprouvette, elle a reçu un dossier de quarante-et-une pages qui liste les personnes qui lui sont génétiquement apparentées: 1.200 personnes au total: «Je me suis très vite trouvée dans un puit sans fond génétique», témoigne-t-elle.
Le New York Times raconte que grâce au système de messagerie interne –non sans rappeler Messenger– Dyan deNapoli a contacté trois de ses cousins au second degré qu'elle a fini par rencontrer pour échanger de longues heures à propos de l'histoire familiale.
Toutefois, tout le monde ne ressort pas satisfait de ces tests ADN. Pour certains groupes ethniques, il est très difficile de trouver des liens de parenté. D’après le magazine Pacific Standard, les Asiatiques et les Latino-Américains ont moins recours à ces tests ADN.
«La manque de diversité dans la recherche génétique est un problème mondial. Mais notre base de données continue de grandir. On y est presque», explique Joanna Mountain, directrice principale à la recherche pour 23andme.