Face à cette crinière bouclée et indomptable, incapable de vous offrir la mèche de Justin Bieber, vous avez beaucoup râlé à l'adolescence. Les boucles, c'est vrai, sont parfois lourdes à porter: le poids du genre humain…
C'est en tout cas ce que révéleraient les résultats d'une étude menée par Tina Lasisi, chercheuse en anthropologie biologique à l'Université d'État de Pennsylvanie, qui montre que les cheveux bouclés offraient une meilleure protection du cerveau aux hominidés (hommes préhistoriques), leur garantissant alors de meilleures chances de survie.
National Geographic revient sur les tenants et aboutissants de la recherche, qui pourrait même faire des cheveux bouclés l'une des raisons pour lesquelles homo sapiens a supplanté les autres espèces d'hominidés comme le Néandertal et le Dénisovien qui, elles, se sont éteintes il y a environ 40.000 ans.
Comprendre pourquoi les humains sont chevelus est encore matière à débat chez les scientifiques. Pour répondre à la question, Tina Lasisi et ses collègues sont partis d'un premier constat: «Le cerveau est un organe volumineux, très sensible à la chaleur, tout en en générant également beaucoup. Nous nous sommes donc dit qu'à une époque où l'on constate que la taille du cerveau de notre espèce augmente, la masse capillaire pouvait être décisive du point de vue de l'évolution.»
La scientifique explique que «les poils du cuir chevelu nous évitent le coût physiologique de la transpiration». Celle-ci n'est en effet pas sans conséquences, puisque ces sécrétions faites pour réguler la température corporelle nous font perdre dans le même temps de l'eau et des électrolytes (minéraux). «Pour nos ancêtres hominidés, cela aurait pu être crucial.»
Pour vérifier son hypothèse, l'équipe de l'Université de Pennsylvanie a utilisé un mannequin thermique, coiffé de trois perruques différentes (raide, modérément bouclée, très bouclée). Le mannequin a été mis à l'épreuve de diverses conditions climatiques et météorologiques se rapprochant de celles rencontrées par les premiers hominidés. De cette manière, les scientifiques ont pu mesurer la façon dont les cheveux régulent la température du cuir chevelu confronté à la lumière directe du soleil, à la pluie, au vent…
Si les résultats ont permis de reconnaître que tous les types de cheveux offraient une certaine protection contre le soleil, il n'en reste que les cheveux les plus bouclés se sont révélés être la meilleure protection crânienne. En outre, ils protègent mieux le cuir chevelu du rayonnement solaire et ne restent pas à plat contre la peau lorsqu'ils sont mouillés. «C'est une découverte importante», salue la professeure Lasisi, qui invite cependant à approfondir les recherches génétiques.
À un stade ultérieur de notre évolution, en effet, les cheveux bouclés ont pu perdre leur avantage évolutif et les cheveux lisses ont pu être favorisés par différents types de sélection génétique. «Peut-être qu'une fois que nous avons eu ces cerveaux plus gros, nous avons aussi eu toutes ces adaptations culturelles pour éviter la surchauffe, comme de meilleures sources d'eau, suppose-t-elle. À ce moment-là, il n'y a peut-être plus eu de pression sélective en faveur des cheveux bouclés.» Les frisottis reviendront-ils en force lorsque le réchauffement climatique aura fait son œuvre?