COMMUNIQUÉ
Le Haut Conseil international de la langue française et de la francophonie* (HCILF) transmet le message suivant :
Le peuple français et les peuples des pays et communautés de langue française de Belgique, Canada, Québec, Suisse, et d’ailleurs, ACCUSENT :
une oligarchie mondialiste de viser une hégémonie universelle en épandant et imposant partout un anglais de commerce déculturant ;
trois institutions de l’Union européenne (Commission, Parquet, Cour des Comptes) de s’en faire les instruments en imposant – post-Brexit ! – l’anglais langue de travail unique en leur sein, décisions violant les textes fondateurs de l’UE : Traité de Rome, Charte des Droits, Règlement des langues ; nos associations attendent que le président de la République obtienne du Conseil de l’UE sous la présidence française le rétablissement d’un vrai pluralisme des langues : promesse écrite reçue de M. C. Beaune, secrétaire d’État aux Affaires européennes ;
la Cour de justice de l’Union européenne de déni de justice pour s’être déclarée incompétente sur le fond, déboutant notre association agréée qui la priait – preuves requises à l’appui – de sanctionner l’illégalité des trois décisions ; déni aggravé par le passage de fait du droit romain au droit coutumier anglo-saxon : le fait accompli illégal dure, fait jurisprudence, puis devient loi (« common law »), le remplacement de langue et celui de droit allant de pair, impérialement ;
les gouvernements français, belge, wallon, canadien, québécois, suisse, de ne pas faire appliquer leurs législations linguistiques : Constitution française (art. 2 et 87), lois Toubon (1994) et Fioraso (2013 pour l’enseignement supérieur trop en anglais) ; loi 101 au Québec... et de laisser pervertir administrations, écoles et universités par une idéologie et une novlangue américaines « déconstructrices » de l’histoire et de la langue de leur pays ;
des tribunaux administratifs français de complaisance coupable, pour avoir débouté nos associations qui attaquaient des décisions illégales de ministères et d’universités, et s’être ainsi rendus complices du remplacement du droit français par une « common law » de fait ;
Le Haut Conseil international de la langue française et de la francophonie (HCILFF) invite donc les gouvernements cités à entendre le message de leur peuple et à appliquer la loi.
Il invite les Français et toutes personnes de langue française présentes à Paris le 20 mars, et voulant – pacifiquement mais clairement – rejeter l’arrachage de leur langue, et affirmer leur attachement à leur civilisation, à confluer dès 14 h vers la Montagne Sainte-Geneviève et le Panthéon pour un rassemblement-forum au-delà de toutes les opinions politiques, à y entendre nos appels, puis à suivre notre cortège dans le Quartier latin, haut lieu de l’humanisme et de l’universalisme européens, pour appeler ensemble à un urgent sursaut civilisationnel.
Au nom du Haut Conseil : son secrétaire général Albert Salon, ancien ambassadeur. Contact : Avenir de la langue française (ALF), 34 bis, rue de Picpus, 75012, Paris, albert.salon0638@orange.fr tél 0768 87 16 01.
L'Académie française a adopté mardi un rapport dénonçant la confusion due à l'abondance d'anglicismes dans la communication institutionnelle, et le risque "d'une perte de repères linguistiques".
Intitulé "Pour que les institutions françaises parlent français", le rapport d'une trentaine de pages a été rédigé par une commission ad hoc, composée de six académiciens.
L'Académie, gardienne de la langue de Molière, décèle "une évolution préoccupante", à savoir une "envahissante anglicisation".
"Franglais"
Selon elle, "nombre d'anglicismes sont employés en lieu et place de mots ou d'expressions français existants avec pour conséquence immanquable l'effacement progressif des équivalents français".
"Follower" serait par exemple trop souvent privilégié face à "abonné, mais aussi adepte, ami, contact, fan, suiveur", détaille-t-elle.
"La propagation massive et continue d'un vocabulaire anglo-américain souvent dénaturé, considéré à tort comme bien connu du public général et d'emploi quasi universel, a pour conséquence contradictoire le risque d'un appauvrissement en proportion du lexique français, et d'une discrimination croissante entre les publics", déplorent les Immortels.
Le rapport donne des dizaines d'exemples, issus d'institutions publiques, d'agences, de collectivités territoriales, d'entreprises publiques ou privées.
Certains sont répandus et/ou faciles à comprendre (des déclinaisons de "start-up", "kit de com", "valley", etc.). D'autres exigent une certaine maîtrise de l'anglais, comme "bleisure" (mot-valise entre "business" et "leisure"), le slogan "Unboring the future" d'un constructeur automobile, etc.
"Une véritable atteinte à la langue"
Au-delà du lexique, l'Académie française déplore "des conséquences d'une certaine gravité sur la syntaxe et la structure même du français".
Avec "la disparition des prépositions" et "la suppression des articles", d'après son constat "la syntaxe est bousculée, ce qui constitue une véritable atteinte à la langue".
En conclusion, les académiciens avancent "quelques préconisations", qui doivent "contribuer au maintien du français et permettre que la langue française puisse participer à une mondialisation réussie".
Sous l'impulsion de sa secrétaire perpétuelle Hélène Carrère d'Encausse, l'Académie française est devenue très récemment plus offensive dans sa mission de préservation de la cohérence et de la place du français.
Elle a annoncé en janvier son projet d'aller devant la justice administrative contester le nouveau modèle de la carte d'identité, bilingue français-anglais, contraire selon elle à l'article 2 de la Constitution ("La langue de la République est le français").
Les nouveaux programmes scolaires, censés entrer en vigueur en 2016, font la part belle à un jargon «pédagogiste» ravivé. Un paradoxe alors qu'ils sont présentés par le Conseil supérieur des programmes comme «plus simples et plus lisibles».
Se déplacer (…) dans un milieu aquatique profond standardisé. (Page 22, cycle 4)
Le «milieu aquatique profond» est tout simplement… une piscine. Ce type de jargon foisonne dans les programmes d'éducation physique et sportive (EPS), une des disciplines scolaires les plus récentes (1981). Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?
«Créer de la vitesse» et «traverser l'eau en équilibre horizontal par immersion prolongée de la tête». (Page 22, cycle 4)
Toujours en EPS, discipline friande de termes pédants, «créer de la vitesse» signifie «courir», tandis que «traverser l'eau en équilibre horizontal» signifie nager. Et comment appelle-t-on un plongeon?
«Produire des messages à l'oral et à l'écrit» en histoire-géographie. (Page 5 du cycle 4)
Le collégien à la sauce 2016 n'aura plus besoin de rédiger un devoir ou de répondre verbalement à une question de son professeur. Il se contentera de «produire des messages» écrits ou oraux. En «montrant un raisonnementconstruit».Tout de même…
«Aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs». (Page 17, cycle 4)
La «visée générale» des programmes de «langues étrangères et régionales» est d'«aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs». Cette visée se veut poétique mais semble un rien prétentieuse. Il est possible que beaucoup se perdent en chemin.
L'éducation aux médias est mise en œuvre, et organisée de façon spiralaire. (Page 53, cycle 4)
Selon Sylvie Queval, philosophe de l'éducation, la notion de pédagogie «spiralaire», inventée en 1960, a «vite rencontré un large écho chez les pédagogues, qui trouvent dans la métaphore de la spirale une façon juste d'exprimer qu'apprendre est un processus continu qui suppose une reprise constante de ce qui est déjà acquis». À en perdre l'équilibre.
La phonologie permet de comparer les similitudes des langues modernes avec celle qui avait cours à l'époque de la Rome antique.
La langue italienne est considérée comme la plus proche du latin. Mais il y existe des arguments en faveur de certaines variantes de la langue sarde, dont la phonologie est encore plus proche de celle du latin classique que l'italien.
L'espagnol –c'est-à-dire le castillan– occupe la deuxième position. Contrairement à l'italien, l'espagnol a perdu toute voyelle longue. Tandis que l'alternance des voyelles longues et courtes est la cause principale de la musicalité de l'italien, la succession rapide des voyelles courtes dote l'espagnol d'une qualité dite militaire.
Phonologie
Le portugais en est encore plus éloigné, surtout concernant la phonologie qui confond l'écouteur inattentif, supposant qu'il entend parler une langue slave.
Le roumain ne peut pas être considéré comme la langue la plus proche du latin à cause de son superstrat slave, et de ses déclinaisons que l'on ne peut guère corréler au latin.
Et le français? C'est la langue la moins latine! Sur le plan de la phonologie, elle s'est éloignée encore plus du latin que le portugais –par l'influence des parlers germaniques limitrophes. En plus, c'est la seule langue romane où l'usage du pronom personnel est obligatoire. Même le nom des locuteurs –les Français– est dérivé d'une tribu parlant le francique, prédécesseur du… néerlandais. (Comprenne qui pourra.)
Les origines de la langue française se trouvent dans le latin vulgaire, tel qu'il était parlé dans le nord de la Gaule, et plus spécialement entre Paris et la Vallée de la Loire.
«Vulgaire» est à prendre au sens étymologique: commun, populaire, par opposition au latin classique; le mot n'a rien de péjoratif. Ce latin populaire avait gardé des traces de la langue parlée antérieurement dans la région (le gaulois), assez peu dans le vocabulaire, sans doute davantage dans la phonétique et la grammaire. Plus tard, il empruntera du vocabulaire au francique, langue des conquérants francs qui dominèrent la région après la chute de l'Empire romain.
J'en profite pour répéter –combien de fois le faudra-t-il?– que le français n'est pas:
du gaulois latinisé,
du francique latinisé,
un «mélange» de latin et de francique, d'ailleurs, en règle générale, les langues ne se mélangent pas…
Le système de la langue française (grammaire, formation des mots, vocabulaire fondamental) est issu de l'évolution du système latin, et non du système gaulois ou francique. La langue, ce n'est pas les mots (et d'ailleurs, plus de 80% des mots français sont d'origine latine, mais ça ne changerait rien s'ils étaient beaucoup moins nombreux).
Une fois constitué dans son originalité vers la fin du IXe siècle, le système de la langue française continua d'évoluer considérablement jusqu'à nos jours, du point de vue de la grammaire et de la phonétique. Il emprunta des mots à ses voisins (y compris ceux du territoire français, breton, langue d'oc, etc.), et se dota, à partir du bas Moyen Âge et surtout de la Renaissance, d'un vocabulaire savant gréco-latin décalqué du latin classique, bien reconnaissable car n'ayant pas subi l'évolution phonétique souvent profonde du vocabulaire hérité du latin vulgaire depuis des siècles.