Reçu ce matin ce communiqué de l'A.FR.AV (Association francophonie avenir) et de son président Régis Ravat, que je crois utile de porter à la connaissance des habitués de ce blog :
Madame, Monsieur,
Une forfaiture civique et linguistique, une de plus, est en train de se mettre en place dans notre pays, et cela a été annoncé, qui plus est, le 16 mars 2021, durant la Semaine mondiale de la langue française et de la francophonie :
LA FUTURE CARTE D'IDENTITÉ DES FRANÇAIS VA DEVENIR BILINGUE FRANÇAIS-ANGLAIS !
Nouvelle provocation contre les francophones et les amis de la langue française en France et dans le monde : le gouvernement a choisi la Semaine de la francophonie et de la langue française pour présenter, sans le moindre débat parlementaire préalable, son projet de nouvelle carte d'identité bilingue où les rubriques sont toutes libellées en français et... en anglais.
L'anglicisation en marche !
Ça ne suffisait pas à l'équipe gouvernementale en place de fermer les yeux sur les innombrables entorses des grandes firmes « françaises » privées et publiques (Renault, PSA) qui basculent leur communication technique vers le tout-anglais ou qui nomment leurs produits et enseignes en anglais (« Ma French Bank », « TGV Night », etc.).
Ça ne lui suffisait pas non plus de laisser nombre de grandes écoles et d'universités multiplier les enseignements en anglais destinés... à des francophones dans toutes sortes de disciplines pendant que, illégalement, toutes sortes de collectivités publiques rebaptisent leurs « territoires » en anglais (« Oh my Lot ! », « Only Lyon », « In Annecy Mountains », « Purple Campus », « Lorraine Airport », etc.).
Enfin, ça ne suffisait pas au gouvernement de laisser la Commission de Bruxelles, sans aucune protestation française qui fût à la hauteur de cette forfaiture, installer le fait accompli d'une communication européenne exclusivement délivrée en anglais.
Voilà maintenant que l'État français lui-même décide de passer outre l'article II de la Constitution (« la langue de la République est le français ») et de violer lui-même, et fort grossièrement, la loi Toubon de 1994 (« la langue française est un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France » en éditant une carte d'identité dont l'effet réel sera de désétablir le français de son rôle de seule langue officielle du pays, de le reléguer au rang de langue locale en niant sa dimension internationale et d'instituer du même coup l'anglais – et cela en plein Brexit ! – comme seule langue internationale reconnue par la France.
De plus en plus se confirme la volonté, voire l'acharnement des milieux dominants imbus d'idéologie atlantiste et « post-nationale » de désétablir à toute vitesse notre langue nationale, premier service public de France, socle de la République indivisible et ciment de la francophonie internationale.
Cette carte d'identité de la honte est un test de la résistance civique et linguistique des citoyens.
Si nous, citoyens français, laissons passer cette grossière forfaiture linguistique, le pouvoir saura qu'il peut donner son feu vert à l'entreprise visant à faire de l'anglais la seule langue de travail de l'UE, puis à en faire une langue co-officielle en France même : ce qui accélèrera prodigieusement la politique linguistique d'arrachage du français, de substitution systématique de l'anglais à notre langue maternelle commune et de basculement général, en France et dans le reste de l'UE, à la langue unique ardemment désirée par la finance et par les grandes sociétés transnationales, avec tous les énormes dangers que cela représente sur les plans économique, social, culturel et politique.
C'est pourquoi nous, associations de défense du français, adjurons les parlementaires, les intellectuels, les syndicalistes, les journalistes, d'interpeller fortement le président de la République et le gouvernement, qui jusqu'ici n'ont même pas la courtoisie démocratique de répondre à nos adresses citoyennes, pour qu'ils retirent au plus tôt ce projet attentatoire à la loi, à la Constitution, à la personnalité même de la France et à la langue commune du peuple français et des autres peuples de la francophonie internationale.
Albert Salon, ancien ambassadeur, président d’honneur d’Avenir de la Langue française (ALF), président du FFI-France, et secrétaire général du Haut Conseil de la langue française et de la francophonie (HCILFF)
Georges Gastaud, philosophe, président exécutif de CO.U.R.R.I.E.L. (Collectif unitaire républicain pour la résistance, l'initiative et l'émancipation linguistiques)
Catherine Distinguin, présidente d'Avenir de la langue française (A.L.F.)
Ilyes Zouari, président du Centre d'études et de réflexion sur le monde francophone
Thierry Saladin, secrétaire de l'A.FR.AV. (Association francophonie avenir)
Philippe Reynaud, président de Défense de la langue française (D.L.F.) en pays de Savoie, ainsi que M. Lucien Berthet, DLF en pays de Savoie.
Si l'orthographe française est compliquée, c'est historiquement volontaire. En 1694, dans les cahiers préparatoires du tout premier dictionnaire de l’Académie française, il était écrit : « L’orthographe servira à distinguer les gens de lettres des ignorants et des simples femmes ».
L’orthographe a longtemps été décidée par et pour les lettrés, qui connaissaient le latin et souvent le grec. Ses conventions complexes ont rarement été simplifiées, et le français écrit, avec ses lettres et marqueurs muets, demeure une langue difficile à s’approprier.
L'usage des majuscules en français est un véritable casse-tête. Si tout le monde sait qu’une phrase commence par une majuscule et se termine par un point, il nous arrive à tous d’hésiter devant certains noms, surnoms, fonctions… Examinons ensemble les erreurs les plus courantes afin de ne plus les commettre.
Les titres et sous-titres prennent une majuscule, mais une seule, au début, contrairement à ceux écrits en anglais. On écrit Gone with the Wind mais Autant en emporte le vent. D’autres erreurs communes nous viennent de l’anglais, langue que l’on fréquente tous de plus en plus. Je pense aux noms des mois, que je vois fréquemment affublés d’une majuscule par mes élèves. Or en français, les noms des mois n’en demandent pas. Nous sommes aujourd’hui le dimanche 7 mars. Les jours, les semaines non plus, sauf s’ils représentent une fête. On écrira donc : le Lundi de Pâques est férié.
En français, les noms propres prennent une majuscule : patronymes, prénoms, surnoms, toponymes... On écrit donc Christophe, Alger-la-Blanche, Alexandre le Grand, la Terre, Mars…
Les antonomases font exception. Antonomase ? Vous rappelez-vous cette figure de style par laquelle un nom propre est généralisé, pris comme nom commun car il désigne alors une qualité ou un défaut ? Alors dans ce cas, l’usage de la majuscule se complique : tout dépend du degré de lexicalisation, de la fréquence d’utilisation de ce mot. On écrira donc "j’aime boire un bourgogne avec mon roquefort". Ou encore : "Chéri ! Sors la poubelle !", sans majuscule (alors que ce nom vient du préfet Eugène Poubelle) mais un Harpagon pour désigner un homme avare, faisant référence au fameux personnage de Molière. Le mieux est alors de vérifier dans un dictionnaire.
Vous aurez noté au passage que les deux points, lorsqu’ils introduisent une citation, sont suivis d’une majuscule.
Les noms propres prennent une majuscule, on l’a vu. Cela vaut bien sûr pour les noms d’habitants de villes, de pays. Mais attention : les adjectifs dérivés de ces gentilés n’en prennent pas. On écrirait donc "je suis berlinois" mais "je suis un Berlinois". Les habitants de Besançon sont les Bisontins, mais ils vendent des spécialités bisontines… Les noms de religions s’écrivent en minuscules : les chrétiens, les musulmans, les bouddhistes.
Ou à Madame la Présidente bien sûr! En effet, les titres, les fonctions, les charges civiles s’écrivent sans majuscule. C’est le terme qui caractérise la fonction qui s’en empare. Exemples : le président de la République française, le ministre de l’Intérieur, l’archevêque de Lyon…
NB : les titres honorifiques, eux, prennent une majuscule : Sa Majesté, Votre Sainteté, Son Altesse... Et si vous écrivez au chef d’État ou l’une de ses ministres, commencez par "Monsieur le Président", ou "Madame la Ministre"…
Les sigles s’écrivent en majuscules : HLM, SNCF, CGT, RTL. C'est plus compliqué pour les acronymes, ces successions d'initiales qui se prononcent comme des mots normaux et non lettre par lettre : certains s'écrivent en majuscule (OTAN, INRI), d'autres n’en prennent qu’au début (Medef, Nasa) ou pas du tout s’ils désignent un objet commun : on écrit un radar, un laser.
NB : si vous détaillez un sigle, il suffit d’une majuscule au début. On écrit : Société nationale des chemins de fer.
On tolérait autrefois, lorsque l’accentuation des majuscules impliquait des manipulations savantes sur les machines à écrire, qu’elles ne soient pas accentuées. Mais ça, c’était autrefois. Avec les logiciels et applications actuels, plus d’excuses. À vous de jouer!
"Outre ses défauts fonctionnels, l’écriture inclusive pose des problèmes à ceux qui ont des difficultés d’apprentissage et, en réalité, à tous les francophones soudain privés de règles et livrés à un arbitraire moral." Bien que favorables à la féminisation de la langue, plusieurs linguistes estiment l'écriture inclusive profondément problématique.
Présentée par ses promoteurs comme un progrès social, l’écriture inclusive n’a paradoxalement guère été abordée sur le plan scientifique, la linguistique se tenant en retrait des débats médiatiques. Derrière le souci d'une représentation équitable des femmes et des hommes dans le discours, l’inclusivisme désire cependant imposer des pratiques relevant d’un militantisme ostentatoire sans autre effet social que de produire des clivages inédits. Rappelons une évidence : la langue est à tout le monde.
Les inclusivistes partent du postulat suivant : la langue aurait été "masculinisée" par des grammairiens durant des siècles et il faudrait donc remédier à l’"invisibilisation" de la femme dans la langue. C’est une conception inédite de l’histoire des langues supposant une langue originelle "pure" que la gent masculine aurait pervertie, comme si les langues étaient sciemment élaborées par les locuteurs. Quant à l"invisibilisation", c’est au mieux une métaphore mais certainement pas un fait objectif ni un concept scientifique.
Si la féminisation est bien une évolution légitime et naturelle de la langue, elle n’est pas un principe directeur des langues
Nous relèverons simplement ici quelques défauts constitutifs de l’écriture inclusive et de ses principes.
La langue n’a pu être ni masculinisée, ni féminisée sur décision d’un groupe de grammairiens, car la langue n’est pas une création de grammairiens — ni de grammairiennes. Ce ne sont pas les recommandations institutionnelles qui créent la langue, mais l’usage des locuteurs. L’exemple, unique et tant cité, de la règle d’accord "le masculin l’emporte sur le féminin" ne prétend posséder aucune pertinence sociale. C’est du reste une formulation fort rare, si ce n’est mythique, puisqu’on ne la trouve dans aucun manuel contemporain, ni même chez Bescherelle en 1835. Les mots féminin et masculin n’ont évidemment pas le même sens appliqués au sexe ou à la grammaire : trouver un quelconque privilège social dans l’accord des adjectifs est une simple vue de l’esprit.
Si la féminisation est bien une évolution légitime et naturelle de la langue, elle n’est pas un principe directeur des langues. En effet, la langue française permet toujours de désigner le sexe des personnes et ce n’est pas uniquement une affaire de lexique, mais aussi de déterminants et de pronoms ("Elle est médecin"). Par ailleurs, un nom de genre grammatical masculin peut désigner un être de sexe biologique féminin ("Ma fille est un vrai génie des maths") et inversement ("C’est Jules, la vraie victime de l’accident"). On peut même dire "un aigle femelle" ou "une grenouille mâle"...
La langue n’est pas une liste de mots dénués de contexte et d’intentions, renvoyant à des essences. Il n’y a aucune langue qui soit fondée sur une correspondance sexuelle stricte. Autrement, le sens des mots serait déterminé par la nature de ce qu’ils désignent, ce qui est faux. Si c’était le cas, toutes les langues du monde auraient le même système lexical pour désigner les humains. Or, la langue n’a pas pour principe de fonctionnement de désigner le sexe des êtres : dire à une enfant "Tu es un vrai tyran" ne réfère pas à son sexe, mais à son comportement, indépendant du genre du mot.
Les formes masculines du français prolongent à la fois le masculin (librum) et le neutre (templum) du latin et font donc fonction de genre "neutre", c’est-à-dire par défaut, ce qui explique qu’il intervienne dans l’accord par résolution (la fille et le garçon sont partis), comme indéfini (ils ont encore augmenté les impôts), impersonnel (il pleut), ou neutre (c’est beau). Il n’y a là aucune domination symbolique ou socialement interprétable. Quand on commande un lapin aux pruneaux, on ne dit pas un.e lapin.e aux pruneaux...
La langue a ses fonctionnements propres qui ne dépendent pas de revendications identitaires individuelles. La langue ne détermine pas la pensée — sinon tous les francophones auraient les mêmes pensées, croyances et représentations. Si la langue exerçait un pouvoir "sexiste", on se demande comment Simone de Beauvoir a pu être féministe en écrivant en français "patriarcal". L’évidence montre que l’on peut exprimer toutes les pensées et les idéologies les plus antithétiques dans la même langue.
Ces formes fabriquées ne relèvent d’aucune logique étymologique et posent des problèmes considérables de découpages et d’accords
En français, l’orthographe est d’une grande complexité, avec ses digraphes (eu, ain, an), ses homophones (eau, au, o), ses lettres muettes, etc. Mais des normes permettent l’apprentissage en combinant phonétique et morphologie. Or, les pratiques inclusives ne tiennent pas compte de la construction des mots : tou.t.e.s travailleu.r.se.s créent des racines qui n’existent pas (tou-, travailleu-).Ces formes fabriquées ne relèvent d’aucune logique étymologique et posent des problèmes considérables de découpages et d’accords.
En effet, les réformes orthographiques ont normalement des objectifs d’harmonisation et de simplification. L’écriture inclusive va à l’encontre de cette logique pratique et communicationnelle en opacifiant l’écriture. En réservant la maîtrise de cette écriture à une caste de spécialistes, la complexification de l’orthographe a des effets d’exclusion sociale.Tous ceux qui apprennent différemment, l’écriture inclusive les exclut : qu’ils souffrent de cécité, dysphasie, dyslexie, dyspraxie, dysgraphie, ou d’autres troubles, ils seront d’autant plus fragilisés par une graphie aux normes aléatoires.
Tous les systèmes d’écriture connus ont pour vocation d’être oralisés. Or, il est impossible de lire l’écriture inclusive : cher.e.s ne se prononce pas. Le décalage graphie / phonie ne repose plus sur des conventions d’écriture, mais sur des règles morales que les programmes de synthèse vocale ne peuvent traiter et qui rendent les textes inaccessibles aux malvoyants.
L’écriture inclusive pose des problèmes à tous ceux qui ont des difficultés d’apprentissage
On constate chez ceux qui la pratiquent des emplois chaotiques qui ne permettent pas de produire une norme cohérente. Outre la prolifération de formes anarchiques ("Chere.s collègu.e.s", "Cher.e.s collègue.s", etc.), l’écriture inclusive est rarement systématique : après de premières lignes "inclusives", la suite est souvent en français commun... Si des universitaires militants ne sont pas capables d’appliquer leurs propres préceptes, qui peut le faire ?
L’écriture inclusive, à rebours de la logique grammaticale, remet aussi radicalement en question l’usage du pluriel, qui est véritablement inclusif puisqu’il regroupe. Si au lieu de "Les candidats sont convoqués à 9h00" on écrit "Les candidats et les candidates sont convoqué.e.s à 9h00", cela signifie qu’il existe potentiellement une différence de traitement selon le sexe. En introduisant la spécification du sexe, on consacre une dissociation, ce qui est le contraire de l’inclusion. En prétendant annuler l’opposition de genre, on ne fait que la systématiser : l’écriture nouvelle aurait nécessairement un effet renforcé d’opposition des filles et des garçons, créant une exclusion réciproque et aggravant les difficultés d’apprentissage dans les petites classes.
Outre ses défauts fonctionnels, l’écriture inclusive pose des problèmes à tous ceux qui ont des difficultés d’apprentissage et, en réalité, à tous les francophones soudain privés de règles et livrés à un arbitraire moral. La circulaire ministérielle de novembre 2017 était pourtant claire et, tout en valorisant fort justement la féminisation quand elle était justifiée, demandait "ne pas faire usage de l'écriture dite inclusive" : des administrations universitaires et municipales la bafouent dans un coup de force administratif permanent. L’usage est certes roi, mais que signifie un usage militant qui déconstruit les savoirs, complexifie les pratiques, s’affranchit des faits scientifiques, s’impose par la propagande et exclut les locuteurs en difficulté au nom de l’idéologie ?
Aujourd’hui, amis des mots, c’est cours de latin ! Mais, vous savez, d’une certaine façon, le latin n’est jamais que du très très très vieux français. Ce qui est rigolo, c’est que le "bon" français est issu d’un "mauvais" latin. Enfin, d’un latin pas très châtié. Celui qu’on appelle le latin "vulgaire".
Entendons-nous bien : à l’origine, vulgaire n’a rien de péjoratif. Il vient du latin vulgus, "la foule". Le sens originel de vulgaire, c’est "populaire", c’est celui que l’on retrouve dans vulgariser, que le Robert définit comme "répandre des connaissances en les mettant à portée du grand public".
Donc, me demanderez-vous, le français n’est pas issu du latin classique ? Eh bien, comment pensez-vous que, en Gaule, le latin ait supplanté le gaulois ? Pas par une invasion de profs de langue. Après la conquête de César, en milieu du Ier siècle avant J.-C., le latin a peu à peu été adopté par les populations locales parce qu’il est devenu la langue des échanges administratifs et commerciaux. On est bien avant l’invention de l’école, du cartable, du livre scolaire et de la méthode Assimil, donc comment apprend-on le latin ? En se frottant aux envahisseurs qui le parlent, qui sont avant tout des légionnaires, des commerçants, bref pas des lettrés.
Donc, nos Gaulois sont confrontés à un latin populaire, une langue parlée, qui n’est pas le latin classique et qui peut en être très différent ! Prenons l’exemple du mot cheval. En latin classique, le "cheval", c’est equus, en latin vulgaire, c’est caballus : rien à voir ! Et c’est caballus qui sera adopté chez nous, donnant caval au Moyen Age puis cheval aujourd’hui. Or, par rapport à equus, caballus était à la fois un terme populaire et péjoratif.
Un "canasson", si vous voulez ! Dans son livre, Etcetera, etcetera, chez First éditions, Julien Soulié donne un autre exemple du même phénomène : celui de la tête. C’est le mot testa qui a donné notre tête, un terme du latin vulgaire qu’on pourrait traduire par "la caboche", "le carafon" ou "la tronche", alors que la tête en latin classique se dit caput (qui, lui, donnera la capitale ou le capitalisme). On peut aussi citer le mot champ, qui vient du latin vulgaire campus, alors que le mot classique était ager.
Il n’y aurait donc aucune trace de latin classique en français ?
Eh si, le français a également emprunté au latin des lettrés romains, mais plus tard. Et d’ailleurs, c’est ce qui explique certaines étrangetés du français actuel.
"À partir du XIVe siècle, quand nos clercs, pétris de culture antique, eurent besoin d’inventer de nouveaux mots, vers qui se retournèrent-ils ? Vers le latin, mais le latin écrit, donc classique », raconte Julien Soulié.
C’est sans doute pourquoi nous ne pratiquons pas le "chevalisme" mais l’équitation, par exemple, les clercs ayant créé ce mot en se basant non sur le latin vulgaire caballus mais sur equus, du latin classique. C’est aussi pourquoi ceux qui font profession de cultiver les champs sont aujourd’hui des agriculteurs, mot bâti sur le latin classique ager, alors que si on avait décidé de construire le nom de leur métier sur le mot champ, on les appellerait peut-être des "champions" !
"Fluctuat nec mergitur"? La Bibliothèque de la Pléiade publie jeudi une "Anthologie bilingue de la poésie latine", alors que peu de lecteurs savent encore lire la langue de Cicéron.
Rares sont les langues ayant eu l'honneur d'entrer dans la collection de prestige des éditions Gallimard: outre l'ancien français, il n'y a eu que l'anglais, l'allemand, l'espagnol, l'italien et le latin, déjà, avec les oeuvres complètes de Virgile en 2015.
Face à quatre langues bien vivantes, la question se pose ex abrupto: ce XXIe siècle fera-t-il du latin une langue vraiment morte, privée ad vitam aeternam de locuteurs?
"Non", répond à l'AFP Philippe Cibois, sociologue, qui suit les tendances de l'enseignement de rosa, rosam, rosae. "En moyenne, toutes classes confondues, 12 ou 13% des élèves font des langues anciennes, surtout du latin maintenant, très peu du grec. C'est un roc solide dans l'enseignement et les 7.000 profs de latin en France sont très actifs pour promouvoir leur matière".
"Je suis certain qu'il y aura beaucoup de lecteurs qui aimeront avoir cette Pléiade dans leur bibliothèque", parie-t-il.
Sans forcément beaucoup lire la page de gauche, en VO: "C'est tout le bénéfice du sous-titrage. On apprécie une langue sans avoir besoin d'être très performant".
Le volume couvre bien sûr la littérature romaine, en commençant par Livius Andronicus (IIIe siècle avant Jésus-Christ), en passant par les classiques Ovide ou Catulle.
Mais aussi le Moyen Âge, où Alain de Lille a pour alias Alanus de Insulis, la période moderne... et contemporaine, avec des vers de Pascal Quignard publiés en 1979, "Inter aerias fagos" ("Parmi les hêtres aériens").
Comme l'écrit dans une note introductive Philippe Heuzé, professeur de littérature latine à Sorbonne Nouvelle, la poésie latine "a la particularité remarquable de courir sur deux mille trois cents ans".
"Des auteurs du XIXe ont une production originale en latin, comme Baudelaire, ou Rimbaud qui avait remporté un premier prix de vers latins. C'est presque militant que de rappeler que des auteurs aussi importants sont des poètes bilingues", relève Pierre-Alain Caltot, maître de conférence en langue et littératures latines de l'Université d'Orléans.
Le poème de Rimbaud s'appelle "Ver erat" ("C'était le printemps", 1868), et semble préfigurer "Le Dormeur du val" (1870). "Iacui uiridanti in fluminis ora": "Je me couchai sur la rive verdoyante d'une rivière".
"J'ai une vraie espérance pour l'avenir de la langue, non dénuée d'inquiétude, mais fondée sur l'idée qu'on ne peut pas se passer de latin, que sans connaissance du latin on ne peut pas comprendre ce que sont par exemple l'épopée, la satire, même l'écriture de l'histoire", dit M. Caltot. "La question se pose toujours de savoir à quoi ça sert, à une époque où tout doit payer immédiatement, et j'allais dire que ça ne sert à rien directement. Sauf à cultiver son jardin".
Mais c'est un combat quotidien, quand il faut convaincre les parents de collégiens d'ajouter une matière optionnelle à des programmes déjà chargés.
Philippe Cibois ferait presque son mea culpa. "J'ai fait du latin de la 6e à la 1re, au lycée classique. Au début ça allait, mais à la fin j'étais noyé: après mes études je me disais que le latin, il fallait supprimer ça, que ça amenait des élèves à l'échec... Et puis, quand ma fille a eu l'âge d'en faire, je me suis dit qu'on ne pouvait pas la priver de cette culture-là". Nolens volens.
Beaucoup se demandent quel peut bien être le secret du garde des Sceaux pour occuper ainsi à lui tout seul la quasi-totalité de la scène médiatique. La Voix du Nord vous met au parfum : en réalité, ils sont deux !
Il n'aura pas fallu longtemps à votre serviteur (dont, faut-il le rappeler, les initiales sont B. D.) pour remarquer que Castex, ça commence comme Casterman. Dès lors, son gouvernement, faute de nous promettre la Lune, ne pouvait que marquer le grand retour des Dupondt. Marianne aura achevé de nous mettre la puce à l'oreille. Dans un article publié cette semaine, l'hebdomadaire note d'abord que « lentement, mais sûrement, Éric Dupond-Moretti s'installe dans un bras de fer avec les magistrats ». Mais, dès le paragraphe suivant, c'est un Éric Dupont-Moretti qui, lentement toujours, « s'avance sur le gravier du ministère ». La preuve que cette fois, et contrairement à ce qui se passe chez un spécialiste reconnu de l'aménagement, il y en a bien deux !
Pourtant, pour distinguer au premier coup d'œil le Dupont avec « t » du Dupond avec « d », c'est tintin ! Le dernier nommé, le jumeau dominant à n'en pas douter, fait l'essentiel du taf. Mais, occasionnellement, on n'en a pas moins croisé l'autre, celui avec « t », dans les colonnes du Monde, du Figaro, du Journal du dimanche, de Valeurs actuelles, de Gala, d'Ouest-France, de Charente libre, de Sud-Ouest, de L'Indépendant, du Midi libre, du Dauphiné libéré, de La Nouvelle République, de L'Est républicain, de L'Union... et même de votre journal préféré !
C'est mon moyen mnémotechnique, et je le partage volontiers : pour s'assurer (trêve de plaisanterie !) que le seul, le vrai, est bien le Dupond avec « d », il suffit de se souvenir que notre homme est avocat et qu'il a consacré sa vie à la défense, avec un « d » là aussi. Mettons-nous à la place d'un homme qui croyait naïvement s'être fait un nom, et qui doit traîner comme un boulet (merci au correcteur automatique de ne pas écrire ici Boulay) ce déficit de reconnaissance. Car je n'en démords pas, quoi qu'en disent d'aucuns pour s'absoudre de leurs propres négligences : défigurer un nom propre est aussi grave que d'estropier un nom commun. Ça l'est même davantage. En ces jours d'égoïsme forcené, le respect d'autrui commence par celui de son patronyme. Si le masque est un mal nécessaire, n'allons pas lui en faire porter un second.
Pas question pour autant que Matignon reconnaisse l'existence d'une doublure : « Botus et mouche cousue », c'est leur devise !
DÉCLARATION de l’ACADÉMIE FRANÇAISE
sur l'ÉCRITURE dite « INCLUSIVE »
adoptée à l’unanimité de ses membres
dans la séance du jeudi 26 octobre 2017
Prenant acte de la diffusion d’une « écriture inclusive » qui prétend s’imposer comme norme, l’Académie française élève à l’unanimité une solennelle mise en garde. La multiplication des marques orthographiques et syntaxiques qu’elle induit aboutit à une langue désunie, disparate dans son expression, créant une confusion qui confine à l’illisibilité. On voit mal quel est l’objectif poursuivi et comment il pourrait surmonter les obstacles pratiques d’écriture, de lecture – visuelle ou à voix haute – et de prononciation. Cela alourdirait la tâche des pédagogues. Cela compliquerait plus encore celle des lecteurs.
Plus que toute autre institution, l’Académie française est sensible aux évolutions et aux innovations de la langue, puisqu’elle a pour mission de les codifier. En cette occasion, c’est moins en gardienne de la norme qu’en garante de l’avenir qu’elle lance un cri d’alarme : devant cette aberration « inclusive », la langue française se trouve désormais en péril mortel, ce dont notre nation est dès aujourd’hui comptable devant les générations futures.
Il est déjà difficile d’acquérir une langue, qu’en sera-t-il si l’usage y ajoute des formes secondes et altérées ? Comment les générations à venir pourront-elles grandir en intimité avec notre patrimoine écrit ? Quant aux promesses de la francophonie, elles seront anéanties si la langue française s’empêche elle-même par ce redoublement de complexité, au bénéfice d’autres langues qui en tireront profit pour prévaloir sur la planète.
Ce vendredi 3 juillet 2020, le changement de Premier Ministre a fait grand bruit. Édouard Philippe a laissé sa place à Jean Castex, un homme politique originaire du Gers. Après sa prise de parole au 20h de TF1, l’accent du nouveau premier ministre a donné lieu à un flot de commentaires et de tweets. L’un d’eux a particulièrement retenu notre attention:
Le nouveau Premier Ministre Jean #Castex n’est pas là pour « chercher la lumière ». Son accent rocailleux genre 3e mi-temps de rugby affirme bien le style terroir #TF1 @ParisMatch https://t.co/71NspmVUsB
— Bruno Jeudy (@JeudyBruno) July 3, 2020
A lui seul, ce tweet permet de mettre le doigt sur une discrimination méconnue en France, discrimination qui se manifeste par la stigmatisation d’une personne en raison de son accent, et que l’on appelle depuis 2016 glottophobie (le nélogisme est de Philippe Blanchet).
Souvenez-vous, en 2018, une affaire de discrimination du même genre avait fait grand bruit dans les médias, quand Jean-Luc Mélenchon avait singé l’accent d’une journaliste originaire du Midi.
En France, la région de Paris joue depuis des siècles le rôle de centre, au sens géospatial du terme. C’est à Paris que siège le pouvoir, les plus grands médias mais aussi la plupart des rédacteurs de dictionnaires commerciaux (Larousse et Robert, pour ne citer que les principaux).
Sur le plan de la prononciation, on comprend donc pourquoi ce sont les usages de ces « professionnels de la parole » qui jouent le rôle de « norme », ou de « modèles », sur le plan national.
Corolairement, on considère toute façon de parler qui s’éloigne de ce modèle de norme comme la manifestation d’un « accent régional ». Plus la prononciation s’éloigne de la norme, plus l’accent régional est marqué. Par ailleurs, cette distance entre le standard et le régional n’est pas seulement linguistique, elle est aussi sociale. Inconsciemment, on considère que plus une personnne a un accent marqué plus elle occupe une position « basse » dans la société, la non-maîtrise de la norme étant associée à un manque d’instruction et la pratique de métiers ou d’activités « peu nobles ».
On retrouve tous ces poncifs dans le tweet du journaliste Bruno Jeudy. La notion d’accent « rocailleux » (adjectif qui ne veut pas dire grand chose, comme c’est le cas en général des qualificatifs liés aux accents régionaux : plat, pointu, chantant, etc.), le style « terroir » (qui souligne la distance entre le « centre » que représente l’Île-de-France et la « région » que représente la province) et l’association entre l’accent du sud-ouest et le rugby (l’accent de la région de Toulouse étant associé dans les représentations des Français, aux journalistes sportifs qui commentent le rugby).
Bien entendu, ces idées sont à combattre, car il ne devrait pas exister de hiérarchie entre les accents, et le fait d’avoir un accent ne devrait pas faire préjuger de la position sociale de qui que ce soit.
Les journalistes Jean-Michel Apathie et Michel Feltin-Palas viennent tout juste de sortir un essai pointant ces problématiques.
Au détour de témoignages, d’anecdotes et d’interviews, ils illustrent avec brio cette problématique de la glottophobie en France, tout en faisant des propositions pour des changements. Leur ouvrage se termine avec la présentation d’une enquête, la première en son genre.
Méthode
Le sondage a été réalisé par l’Ifop, auprès d’un échantillon de plus de 2000 personnes, sélectionnées selon la méthode des quotas, après stratification par régions et catégories d’agglomération.
J’ai utilisé une partie des données pour illustrer en cartes deux questions liées à des questions d’accent en France.
La première portait sur le sentiment d’accent régional. À la question : « Quand vous parlez, estimez-vous avoir un accent régional? », 21% des sondés ont répondu par l’affirmative.
On voit que c’est dans la région Midi-Pyrénées (d’où est d’ailleurs originaire Jean Castex) que les participants ont déclaré être les plus conscients d’avoir un accent régional. Le Nord-Pas-de-Calais n’est pas loin derrière. La transformation par anamorphose (cartogramme) à droite permet de rendre compte du fait que c’est dans les régions du Centre et des Pays-de-la-Loire que les gens ont l’impression d’avoir le moins d’accent (ce qui va dans le sens du stéréotype populaire selon lequel c’est dans cette région que l’on parle le français le plus neutre).
La seconde portait sur l’expérience d’une discrimination liée à l’accent. À la question « Avez-vous déjà été l’objet de discriminations que ce soit pendant vos études ou pendant votre carrière professionnelle (par exemple lors d’un concours, d’un examen ou lors d’un entretien d’embauche) du fait de votre accent régional ? », la moyenne globale est de 27%.
On peut voir sur ces deux cartes un phénomène intéressant. C’est dans les régions où les participants ont déclaré avoir le moins d’accent que les participants se sentent les plus souvent discriminés en raison de leur prononciation!
Le nouveau Premier Ministre a un accent régional, et il faut s’en réjouir. C’est un pas important dans l’histoire des discriminations liées à l’accent en France, mais aussi au regard de la reconnaissance des variétés régionales de la langue française.
Naguère, on travaillait « sur place » ou « à distance ». Le confinement aura vulgarisé ce qui relevait jusque-là du jargon des entreprises : travailler « en présentiel » ou « en distanciel ». Tellement plus chic !
Force est d'ailleurs d'avouer que la terminaison en question (-tiel dans la grande majorité des cas, -ciel pour un petit nombre de mots du lexique traditionnel) est devenue la coqueluche de l'usager, notamment depuis l'afflux massif sur le marché des logiciels, progiciels, ludiciels, didacticiels et autres ciels qui vous parlent d'un paradis 2.0 que les plus de soixante-cinq ans peuvent difficilement connaître.
Il s'en faut du reste que le monde des entreprises soit le seul touché (pardon : « impacté » !). Notre Éducation nationale, championne toutes catégories de la novlangue, a très tôt usé et abusé du référentiel pédagogique, à la mamelle duquel ses ouailles étaient fermement appelées à téter. Un cran au-dessus dans le ronflant, il faudrait aussi évoquer, dans le domaine particulièrement exposé de l'explication littéraire, les délices générées par le schéma actantiel (actanciel pour Robert), là où, assez bêtement, on se bornait jadis à étudier les rapports qu'entretenaient les personnages dans le récit. Tout cela, parfois, avec la bienveillante complicité des élèves eux-mêmes, lesquels, le premier moment de surprise passé, n'aiment rien tant, le jour de l'oral, qu'égrener oxymorons, focalisations internes et situations d'énonciation du plus bel effet.
Et que dire, quand la rime serait moins riche, du visuel, qui, dans le petit monde de l'imprimerie, du journalisme et de la communication (ça fait du monde quand même !) a renvoyé photo, illustration et autres platitudes à leurs chères études ? Au point que s'en est emparé le milieu de la police, à en croire du moins les innombrables séries télévisées qui sont censées le mettre en scène : combien de fois n'avons-nous pas entendu un inspecteur en planque confier à son talkie-walkie qu'il avait le suspect... en visuel ? Bref, qu'il l'apercevait.
Pas sûr que la langue sorte grandie de toutes ces trouvailles qui, à l'évidence, visent plus à impressionner qu'à renseigner. Mais si elles peuvent contribuer à aiguiser les dents des jeunes loups des écoles de commerce, dopés aux accents martiaux des Lacs du Connemara, pourquoi pas, après tout ?
Légende du... visuel :
Le travail en distanciel aurait fait la preuve de son efficacité. Même si certains confinés ont eu du mal à tenir... la distance !
Il suffit, pour s'en convaincre, de sillonner la Toile pour faire provision de ces dérapages qui consternent et font rire à la fois. À vous de substituer au terme en gras son frère jumeau, qui fera mieux l'affaire !
Par Bruno Dewaele - La Voix du Nord 24 mai 2020
Il est vrai que le professeur Raoult est un imbécile et que vous êtes un imminent virologue ! (Du moins, ça ne saurait tarder.) De brusques irruptions cutanées inquiètent les dermatos. (Ça ne prévient pas, mais quand même...) Hôtels vides, restaurants fermés, locations annulées : tout espoir de rebond est reporté aux calandres grecques. (Et encore, si les garages rouvrent !) Alors que l'on voit de nombreux conducteurs abhorrer un masque au volant, vous êtes plusieurs à nous interroger. (C'est vrai que le porter dix minutes suffit à le détester...) Les experts se perdent en conjonctures sur des cas de malades soi-disant guéris mais toujours contaminants. (Faute de maîtriser la situation, autant la voir partout...) Le défi est de quadriller le terrain, de voir les nouveaux cas qui se déclencheraient, d'essayer de circoncire au plus vite autour d'eux. (Pour couper la chaîne de transmission, rien de tel !) Le Covid-19 provoque un excès de fièvre chez Chronopost. (40 °C sous l'aisselle, sinon rien !) Telles sont les phrases dont les télés nous rabattent les oreilles à propos du coronavirus. (Le masque y suffisait pourtant...) Si la pandémie dépassait le premier semestre, le sceptre d'une crise alimentaire viendrait assombrir le tableau. (Déjà que, pour se déplacer, on doit faire tintin sur l'Ottokar !) Trop facile de donner des exemples négatifs : il existe certainement des policiers compréhensibles ! (C'est un fait qu'ils ne le sont pas toujours, avec leurs « subséquemment »...) Depuis l'allocation du président, tout le monde rêve de ce lundi qui chante. (Il aurait dit qu'il mettrait la main à la poche, on l'aurait écouté !) Il en existe toujours, poussés par l’envie de s’égayer sur les bords de la Loire. (Il faut reconnaître que les vins du cru ont de quoi rendre gai.) Je décide d'aller faire mes courses à midi, pour éviter les heures d'influence. (On ne la lui fait pas, à lui !) Il s'agit d'une femme qui aurait contacté le virus en Afrique. (Si elle est chez Free et qu'elle ait tout compris, pourquoi pas ?)
SOLUTIONS
Vous aurez préféré : éminent, éruptions, calendes, arborer, conjectures, circonscrire, accès, rebattent, spectre, compréhensifs, allocution, s'égailler, affluence, contracté.
Le dictionnaire Le Robert est un volumineux ouvrage papier qui est mis à jour chaque année. C’est une référence linguistique pour qui doit manier la langue française au quotidien.
Pour ce genre d’outils, le numérique est particulièrement bien adapté, puisqu’avec la technologie l’accès aux mots d’un dictionnaire et aux définitions se fait très rapidement en quelques clics de souris. De plus, les liens hypertextes facilitent la découverte de termes nouveaux en butinant de mot en mot au fil de ses lectures.
illustration-dictionnaire
Dernièrement, les éditions Le Robert ont mis à disposition une version en ligne gratuite de leur célèbre dictionnaire. Elle est bien entendu moins étoffée que la version papier, mais devrait être suffisante pour la plupart des utilisateurs qui veulent parfaire leur usage de la langue française.
Des discours du chef de l'État il reste souvent une formule choc, reprise jusqu'à plus soif par les médias. Le mois dernier, c'est un « quoi qu'il en coûte » inhabituel dans sa bouche qui avait défrayé la chronique.
La chose peut se comprendre, l'intéressé s'étant surtout signalé, jusque-là, par son peu d'empressement à dépenser « un pognon de dingue » ! Ce qui se comprend moins, c'est la façon dont il a été rendu compte de ce revirement : ce sont des « quoiqu'il en coûte » qui ont fleuri un peu partout, sur les sites de distinguées radios d'abord (Europe 1, RTL, France Info, France Inter, voire (horresco referens !) France Culture, ensuite de la presse écrite (Le Figaro, Le Point... et je ne prétendrai pas que votre journal préféré ait toujours été, dans cette affaire, blanc comme un comprimé de chloroquine !).
Il s'en trouvera pour se récrier : un ou deux mots, pas de quoi fouetter un chat ! Eh bien, si, parce que le sens est loin d'être le même. Quand M. Macron annonce que « Quoi qu'il en coûte, la priorité de la nation est notre santé », il réaffirme que rien n'est plus important que cette dernière : ça coûtera donc ce que ça coûtera ! Soudez les deux mots (quoiqu'il en coûte), et notre président, en ex-banquier qui se respecte, n'est pas loin de déplorer – en tout cas il lui en coûte ! – que le sanitaire doive ainsi prendre le pas sur l'économique. Le penser, pourquoi pas ? Mais l'avouer au pays, ce serait une faute politique majeure.
J'en entends d'ici pester contre une langue par trop subtile, mais ne siérait-il pas plutôt de louer sa précision ? Un espace oublié (une espace oubliée, ce nom étant féminin en typographie), et la face du discours s'en trouve changée ! Raison de plus pour tirer sur cette bonne vieille ficelle : la soudure n'est requise que si est possible le remplacement par bien que. On est fondé à écrire « Quoiqu'il ait parlé longtemps, on a bu ses paroles », puisqu'on peut dire « Bien qu'il ait parlé longtemps... ». En revanche, « Bien qu'il dise, on reste sceptique » ne se pouvant (Bien qu'il dise quoi ?), c'est « Quoi qu'il dise » (quelles que soient les choses qu'il dise) qu'il faut écrire.
Le hic, c'est que la substitution de bien que était ici moins inconcevable qu'ambiguë. Mieux aurait valu parler comme Gérald Darmanin : « Quand la maison brûle, on ne compte pas les litres d'eau pour éteindre l'incendie » !
« une langue est un dialecte avec une armée et une marine » Max Weinreich (1945),
Prenez un moment et pensez à la langue que vous parlez le plus souvent et le mieux. Puis réfléchissez au(x) pays ou aux régions du monde où cette langue revêt le plus d’importance, en quantité et en qualité. Votre manière de parler est-elle identique à celle que l’on vous a appris à l’école, ou que vous utilisez dans vos réunions au travail, dans vos documents écrits ? Dans certains cas, il y aura une grande proximité (si vous êtes, par exemple, Parisien ou Londonien, ou si vous travaillez dans des cercles réduits), mais des différences significatives se révèlent dès que notre regard se tourne vers des pays ou des continents voisins.
L’Allemagne fournit à ce titre un exemple intéressant. Jusqu’au 19e siècle, il n’existait pas un « allemand » unifié, mais plutôt des dizaines de dialectes qui cohabitaient ; ceux du sud, tels que le bavarois, se démarquant tant de ceux du nord tels que l’ostphalien à Hanovre, qu’ils pouvaient conduire à une situation d’inintelligibilité mutuelle.
Ce n’est qu’en 1871, lorsque l’état-nation de l’Empire allemand fut créé, que la variante écrite « Standarddeutsch » fut imposée dans les institutions administratives et éducatives. Hanovre, lieu dont les dialectes fournirent les fondements de la phonologie du haut allemand, appartenait au royaume de Prusse. Ainsi, jusqu’à récemment, les enfants bavarois parlant les variétés les plus marquées de leurs dialectes sans connaissance préalable de l’allemand standard apprenaient une variété de langue distincte à l’école et devaient alterner entre ces dernières selon la situation.
Mais pourquoi n’appelons-nous pas toutes ces variétés des « langues » ? Quelle est la différence fondamentale entre une langue et un dialecte ? L’exploration scientifique de cette question controversée et sans doute irrésolue à ce jour est conduite par la dialectologie, un champ spécifique de la (socio)linguistique. Définir « langue » et « dialecte » de manière abstraite n’est pas une tâche aisée, comme nous allons le voir. Le sujet est important, en particulier dans le contexte européen actuel où les échanges tendus au sujet de langues et d’identités nationales se multiplient.
D’un point de vue formel en linguistique, on pourrait considérer qu’un dialecte est l’une des subdivisions d’une langue donnée qui diffère de cette dernière à plusieurs niveaux objectifs. L’étude de cas du russe nous aide à voir cela plus clairement. Le russe standard se fonde sur un dialecte parlé à Moscou, qui divise l’ouest du pays entre les dialectes du nord et du sud. Au nord, il y a au moins cinq groupes de dialectes principaux correspondant à des lieux : Vladimir, Vlatka, Novgorod, Olonets et Arkhangelsk. Ils partagent un certain nombre de différences vis-à-vis du russe standard.
En termes de phonologie (l’étude des sons d’une langue), les dialectes du nord n’affaiblissent ni ne réduisent la voyelle/o/dans les syllabes inaccentuées, tandis que le russe standard la combine avec une voyelle/a/, produisant un/ə/faible. Par exemple, много « très », « beaucoup de », se prononce « mno-gueu » à Moscou et « mno-go » au nord.
Sur le plan morphologique (la structure de mots individuels), les dialectes du nord changent les articles définis en suffixes, ainsi « le livre » se dit « ta kniga » en russe standard et « knigata » au nord.
Au niveau du lexique (les mots individuels), les variantes du nord ont des mots qui leur sont propres, tels que баской « beau » et ухват ou орать, « labourer » au lieu des mots standards красивый et вспахивать.
Enfin, d’un point de vue syntaxique (l’ordre des mots, parfois selon leur forme), certaines variétés au nord-est utilisent le cas nominatif au lieu de l’accusatif pour exprimer un object direct après un verbe à l’infinitif. Par exemple, pour exprimer la proposition « Nous devons acheter un bateau », ces variétés donneront nádo lódka(Nom) kupít’ au lieu de lódku(Acc) dans les variétés sud.
Ce raisonnement nous conduirait à considérer qu’une langue est une collection de dialectes mutuellement intelligibles. Mais comme nous l’avons vu pour l’allemand, des variétés qui diffèrent fortement peuvent causer des difficultés de compréhension et de communication. A l’inverse, on dit souvent que les locuteurs du danois, du suédois et du norvégien peuvent se comprendre relativement bien s’ils font l’effort nécessaire, or nous considérons leurs variétés comme des langues individuelles correspondant à des états-nations spécifiques. Les dialectes scandinaves sont sujets à un continuum géographique où plus la distance est grande, plus les variétés sont différentes, de manière similaire au continuum des langues romanes occidentales comprenant l’italien, le français, le catalan, le castillan et le portugais.
La distinction entre langue et dialecte est peut-être mieux comprise en tant que notion sociale et politique plutôt que purement linguistique. En ce sens, une langue serait un ensemble de dialectes, gouverné par des continuums géographiques et sociaux, et sujets à des évènements socio-politiques hissant l’un de ces dialectes au sommet de la pyramide via des processus de standardisation. Afin d’illustrer ceci, prenons l’exemple de la Chine.
On a tout d’abord le mandarin, qui est la langue standard, officielle, enseignée à l’école est parlée à la télévision et dans les autres médias. Le mandarin a historiquement été sélectionné comme norme, codifié par des grammaires et des dictionnaires, accepté par une majorité ou une minorité socialement puissante de la communauté, et élaboré pour les besoins de la nation, par exemple dans des contextes administratifs, diplomatiques et éducatifs. Ceci fait du mandarin un dialecte hiérarchiquement supérieur, un acrolecte. A l’autre bout du spectre, il y a le toisanais, qui fut parlé tout d’abord par les ouvriers ferroviaires de Guandong, et qui aujourd’hui n’est ni médiatisé, ni pratiqué à l’écrit. Il s’agit d’un basilecte. Entre les deux, le cantonais est un mesolecte : il est écrit et pratiqué dans des journaux et des médias locaux parce qu’il est parlé par un grand nombre de personnes en Chine, mais les locuteurs du cantonais doivent tout de même connaître le mandarin dans des contextes officiels.
Il est donc difficile de distinguer langue et dialecte, mais pas impossible si l’on ancre notre analyse dans des situations concrètes et des études approfondies de variétés spécifiques.
Il faut cependant noter l’arbitraire de ces hiérarchies. D’un point de vue linguistique, il est absurde de dire qu’une variété est « plus pure », « meilleure » ou « plus belle » qu’une autre, comme on le dit parfois à l’école pour dissuader les élèves de pratiquer leurs dialectes locaux.
On pourrait tout à fait imaginer un monde où le scots est la langue standard et la variété la plus prestigieuse de Grande-Bretagne, tandis que l’anglais d’Écosse serait restreint aux registres familiers et moralement dévalués. Comme le dit le linguiste Max Weinreich (1945), « une langue est un dialecte avec une armée et une marine » (« a language is a dialect with an army and a navy »). Ce dicton s’avère peut-être un peu exagéré ; mais le fait que les hiérarchies entre une langue standard et des dialectes dépendent fondamentalement de constructions socio-politiques, comme c’est le cas pour d’autres aspects de l’identité nationale, est une notion importante à garder à l’esprit dans n’importe quelle discussion sérieuse traitant de l’identité sociale ou nationale appliquée à la politique.
Le jour est venu de passer en revue les principales difficultés d’écriture liées à l’emploi des noms de jours de la semaine, soit : lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi, dimanche
Bien qu’ils s’apparentent parfois à des adverbes temporels par leur comportement syntaxique, ces mots sont bien des noms communs, des noms masculins et variables en nombre. Ils prennent donc un s au pluriel. Les éventuels déterminants et adjectifs qui s’y rattachent s’accordent en conséquence :
un dimanche ensoleillé
des dimanches ensoleillés
En français, les noms de jours, comme tout nom commun, s’écrivent avec une minuscule initiale dans du texte suivi :
La réunion aura lieu jeudi.
Il est né le mardi 7 mai 1946.
Profitons de ce mois pascal pour rappeler que, dans un nom de fête religieuse, civile ou commerciale qui contient le nom d’un jour de semaine, celui-ci conserve la minuscule s’il est suivi d’un nom complément qui constitue l’élément spécifique du nom de la fête. Ce nom spécifique prend quant à lui la majuscule :
le mercredi des Cendres (ou simplement les Cendres)
le dimanche des Rameaux (ou simplement les Rameaux)
le lundi de Pâques (lundi qui suit Pâques)
En revanche, c’est le nom du jour de semaine qui prend la majuscule si l’élément spécifique est seulement un adjectif qui le qualifie. Ce dernier ne prend la majuscule que s’il est placé devant le nom :
le Mardi gras
le Vendredi fou (jour de fin novembre marqué par des soldes)
le Super Vendredi (autre nom du Vendredi fou)
À noter que, si l’adjectif spécifique qui suit est saint, la majuscule au nom du jour est facultative, certains ouvrages de référence préférant la minuscule :
le Vendredi saint ou le vendredi saint
Pour les noms d’évènements historiques, on applique les mêmes règles que pour les noms de fêtes :
le Dimanche rouge (émeute inaugurant la révolution russe de 1905)
le Jeudi noir (début du krach boursier de 1929)
Quand, dans le corps du texte, un nom de jour de semaine est employé sans déterminant, il fait habituellement référence au jour de ce nom qui est le plus rapproché dans le passé ou dans le futur par rapport au moment de l’énonciation. Le contexte, par exemple le temps du verbe, permet normalement de comprendre s’il s’agit du passé ou du futur :
Il est venu mardi. (= mardi dernier)
Il viendra mardi. (= mardi prochain)
On emploie dans le même sens, mais plus rarement, le déterminant démonstratif :
Il est venu ce mardi.
Il viendra ce mardi.
Quand le nom du jour n’est pas précisé par une date, le déterminant défini (le ou les) indique habituellement une action répétée chaque semaine :
Elle s’entraine le mardi. (= chaque mardi)
Elle s’entraine les mardis. (= tous les mardis)
Dans du texte suivi, on emploie aussi le déterminant devant le nom du jour quand celui-ci est accompagné d’une date. Attention de ne pas placer le déterminant entre le jour et la date :
Je suis né le mardi 7 mai 1946.
*Je suis né mardi le 7 mai 1946.
En principe, la seconde phrase ci-dessus ne pourrait être correcte que si elle était énoncée dans le courant de la semaine suivant immédiatement cette date, ce qui ferait de l’énonciateur un bébé très précoce !
Dans l’indication de dates coordonnées avec et, on évitera de répéter un même nom de jour de semaine et le déterminant qui précède. Ainsi, dans le deuxième exemple de la paire ci-dessous, on a supprimé la deuxième occurrence de le mardi et on a remplacé la première par la forme plurielle les mardis, qui s’applique alors aux deux dates.
Les réunions auront lieu le mardi 7 mai et le mardi 4 juin.
Les réunions auront lieu les mardis 7 mai et 4 juin.
Dans la paire d’exemples qui suit, où le mois est le même pour les deux dates, on supprime aussi la répétition du nom de mois. Comme celui-ci suit le quantième (le numéro), ce n’est pas la première, mais la dernière occurrence de mai qui est conservée. Le nom de mois reste au singulier :
Les réunions auront lieu le mardi 7 mai et le mardi 14 mai.
Les réunions auront lieu les mardis 7 et 14 mai.
Quand chacune des dates est précédée d’un nom de jour différent, on répète le déterminant le :
Les réunions auront lieu le mardi 7 et le jeudi 9 mai.
*Les réunions auront lieu les mardi 7 et jeudi 9 mai.
On a vu que le déterminant défini peut conférer une valeur de répétition, de périodicité (le mardi ou les mardis). Des difficultés d’écriture peuvent se présenter dans cet emploi, notamment avec des noms de jours coordonnés. Prenons ces exemples :
Elle s’entraine le mardi et le jeudi. (= chaque mardi et chaque jeudi)
Elle s’entraine les mardis et les jeudis. (= tous les mardis et tous les jeudis)
Dans ces coordinations, on omet souvent le deuxième déterminant. Deux façons d’écrire sont alors envisageables :
Elle s’entraine les mardi et jeudi.
Elle s’entraine les mardis et jeudis.
La première façon peut se justifier comme dérivant de la coordination le mardi et le jeudi, avec mise en commun et mise au pluriel du déterminant conservé. Voici des exemples semblables qui peuvent aider à saisir cette analyse :
Elle aime ses père et mère.
Elle écrit ses nom et prénom.
Cette façon d’écrire est d’un registre plutôt soutenu, pour ne pas dire « endimanché ». Dans cette construction, on écrit plus couramment les noms de jours au pluriel, suivant la deuxième façon mentionnée, en analysant la phrase comme dérivant plutôt de la coordination les mardis et les jeudis, avec simple omission du deuxième déterminant.
On insiste parfois sur la régularité de la périodicité en ajoutant la mention de chaque semaine :
Elle s’entraine le mardi de chaque semaine.
Cette insistance peut occasionner des difficultés d’écriture. On évitera alors le déterminant pluriel qui n’est guère compatible avec la présence du singulier chaque semaine. On obtiendrait une phrase plutôt maladroite qui télescope l’aspect pluriel de tous les mardis et l’aspect singulier de le mardi de chaque semaine :
*Elle s’entraine les mardis de chaque semaine.
*Elle s’entraine tous les mardis de chaque semaine.
Un déterminant pluriel est par ailleurs possible dans une coordination, s’il résulte de la mise en commun de deux déterminants au singulier. Les noms de jours restent au singulier :
Elle s’entraine le mardi et le jeudi de chaque semaine.
Elle s’entraine les mardi et jeudi de chaque semaine.
*Elle s’entraine les mardis et jeudis de chaque semaine.
La coexistence d’un nom de jour au pluriel avec le mot semaine au singulier ne s’envisagerait guère que dans un exemple tordu de ce genre :
Elle s’entraine tous les jeudis de la semaine des quatre jeudis.
Façon élégante de laisser entendre qu’elle ne s’entraine jamais !
D’autres difficultés se posent dans des constructions similaires faisant intervenir les syntagmes de chaque mois ou du mois. Puisqu’un mois contient plusieurs jours du même nom, on mettra ce nom au pluriel le cas échéant :
Elle s’entraine (tous) les mardis du mois, de chaque mois.
Les hésitations concernent notamment les coordinations mettant en jeu des déterminants tels que premier, deuxième et dernier. Voici d’abord une formulation correcte, mais plutôt lourde :
Elle s’entraine le premier mardi et le dernier mardi du mois.
On peut omettre la première occurrence de mardi :
Elle s’entraine le premier et le dernier mardi du mois.
On peut aussi omettre le deuxième déterminant le et mettre au pluriel le premier déterminant ainsi que le nom du jour :
Elle s’entraine les premier et dernier mardis du mois.
Comme il n’y a qu’un seul « premier mardi » et un seul « dernier mardi » dans un mois, les mots premier et dernier sont laissés au singulier. Cela dit, leur mise au pluriel est parfois admise :
Elle s’entraine les premiers et derniers mardis du mois.
On justifie ces pluriels par la volonté d’insistance sur la répétition mensuelle : dans une année, il y a plusieurs « premier mardi du mois » et plusieurs « dernier mardi du mois ». Il est vrai que le syntagme du mois est plus ambigu que de chaque mois : il peut dans certains contextes faire référence à un mois particulier implicite, sans idée de répétition mensuelle, d’où cette volonté légitime de clarifier l’idée de répétition par la mise au pluriel des mots premiers et derniers. En revanche, ces pluriels paraissent moins justifiés avec le syntagme de chaque mois, non ambigu quant à la répétition :
Elle s’entraine les premier et dernier mardis de chaque mois.
*Elle s’entraine les premiers et derniers mardis de chaque mois.
Lorsqu’un mot comme matin est apposé à un nom de jour de la semaine et que celui-ci est au pluriel, faut-il accorder matin ?
On considère généralement que matin prend dans ce contexte une valeur adverbiale (« au matin », « le matin ») et qu’il est invariable :
Elle s’entraine tous les mardis matin.
Mais l’accord est assez fréquent (sans doute sous l’influence de l’expression tous les matins) pour être toléré par certains grammairiens :
Elle s’entraine tous les mardis matins.
Cet accord facultatif vaut pour les autres mots qui peuvent s’apposer aux noms de jours : soir, midi, avant-midi, après-midi :
S’étant assez entrainée la semaine, elle sort tous les samedis soir(s).
Si l’on n’a pas assimilé du premier coup tous ces conseils relatifs aux noms de jours (à chaque jour suffit sa peine), on pourra les relire périodiquement, par exemple tous les premier et troisième mardis matin de chaque mois.
Le Conseil d'État a rejeté des recours demandant l'annulation d'une circulaire d'Édouard Philippe, publiée en novembre 2017. Il demandait à proscrire l'écriture inclusive dans les communications ministérielles.
Les "Immortels" disent "oui" à la féminisation des noms de métiers. Une évolution "naturelle de la langue", selon l'Académie française.
CULTURE - L'Académie française a adopté ce jeudi 28 février, à "une large majorité", le rapport sur la féminisation des noms de métiers soulignant qu'il n'existait "aucun obstacle de principe" à la féminisation" des noms de métiers et de professions.
"Celle-ci relève d'une évolution naturelle de la langue, constamment observée depuis le Moyen Âge", explique le texte adopté par les académiciens.
Gardienne sourcilleuse du bon usage de la langue française, l'Académie française avait mis jeudi à son ordre du jour l'examen d'un rapport préconisant la féminisation des noms de métiers, sujet longtemps tabou au sein de l'institution fondée au XVIIe siècle par Richelieu.
"S'agissant des noms de métiers, l'Académie considère que toutes les évolutions visant à faire reconnaître dans la langue la place aujourd'hui reconnue aux femmes dans la société peuvent être envisagées", indique le rapport rédigé par une commission présidée par l'historien Gabriel de Broglie, 87 ans, et composée de la romancière et essayiste Danièle Sallenave, du poète d'origine britannique Michael Edwards et de l'écrivaine et biographe Dominique Bona.
Professeure et autrice
L'Académie française ne compte pas "dresser une liste exhaustive des noms de métiers et de leur féminisation inscrite dans l'usage ou souhaitable" ni "édicter des règles de féminisation des noms de métiers" en arguant que ce serait "une tâche insurmontable".
"Il convient de laisser aux pratiques qui assurent la vitalité de la langue le soin de trancher", a indiqué l'Académie qui a retenu dans son rapport des mots jusqu'à présent tabous comme "professeure".
"L'emploi de ces formes en 'eure', qui fait débat, et cristallise certaines oppositions au mouvement naturel de la féminisation de la langue, ne constitue pas une menace pour la structure de la langue ni un enjeu véritable du point de vue de l'euphonie, à condition toutefois que le 'e' muet final ne soit pas prononcé", a tranché l'Académie qui accepte également "auteure", "autrice" et "écrivaine".
Alors que les anglicismes ont envahi les médias, Emmanuel Macron a tenu à réaffirmer l’importance de la langue française lors d’une conférence de presse organisée pour l’occasion.
« La french langue doit être la préoccupation number one de notre start up nation » a annoncé d’emblée le président de la République avant de préciser : « Le process sera peut-être long et hard mais il faut savoir être control freak dans ses speach si on veut être du côté des winners. La french langue est notre copyright, elle participe à la team ambiance de notre start up nation. Je vais vous parler cash : l’anglais, c’est good, mais il faut pas que ça devienne open bar. On doit trouver la balance et protect notre langue. ce n’est qu’à cette condition qu’on pourra disrupter le pays et construire une new France ».
Une stratégie à long terme
« Mais pour ça, j’ai besoin de la task force de tous mes helpers » a poursuivi le chef de l’Etat. Puis d’ajouter : « Ça ne se fera pas tout seul, il faudra investir de la money, lever des fonds en equity, étudier le venture capital, peut-être même pivoter notre business model mais surtout réaliser des audit, brainstormer en coworking et favoriser le teambuilding pour mutualiser nos ressources et drafter un projet. Ensuite, la next step sera de faire asap des bons feedback, checker la to-do list, updater les changements et se fixer une deadline raisonnable pour faire du français la langue la plus bottom up de la Terre ».
Jean-Louis qui m’a écrit sur langue@RTL.fr se pose une question que l'on me pose souvent, je ne sais pas très bien pourquoi. Il me demande si les noms des jours de la semaine se mettent au pluriel. Par exemple : "'Tous les samedis de février' : avec ou sans s à samedi ?", s’interroge-t-il.
Les noms des jours ne sont pas des noms propres, ce sont des noms communs comme les autres, donc "tous les samedis" prend un s à "samedi". En revanche, et c'est peut-être ce qui conduit nombre de personnes à se poser des questions, on écrira "tous les samedis matin", avec un s à "samedi" mais pas de s à "matin".
On peut considérer cette formule comme une ellipse : "tous les samedis au matin", "tous les dimanches au soir" (donc "tous les dimanches soir", s à "dimanche", pas de s à "soir" non plus, bien entendu).
Mais puisque nous en parlons, vous êtes-vous jamais demandé d'où viennent les noms des jours de la semaine ? Le mot "semaine" lui-même vient du latin septimana, "septième". D'ailleurs on disait "sepmaine" à une époque, en ancien français.
Les noms des jours, comme les noms des mois dont j'avais expliqué l'origine la saison dernière, nous viennent des Romains, qui s'appuyaient eux-mêmes sur des découvertes des Mésopotamiens, remontant au VIIe siècle avant notre ère. Ils avaient repéré dans le ciel sept astres, et attribué chacun à un dieu : la Lune, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne et le Soleil. Chaque jour était l'occasion de célébrer une de ces divinités. Et "jour", c'est dies, diem en latin. Comme dans carpe diem qui veut dire "profite du jour présent".
Ce "diem" a donné le "di" que l'on retrouve dans le nom de chaque jour en français : lundi, mardi, mercredi... Lundi, c'est lunis diem, le jour de la déesse de la Lune, mardi c'est martis diem, le jour de Mars, mercredi c'est mercuris diem, le jour de Mercure, jeudi c'est jovis diem, le jour de Jupiter, vendredi c'est veneris diem, le jour de Vénus. Quant à samedi, la logique voudrait que ce soit le jour de Saturne, et dimanche le jour du Soleil... Mais bien sûr, il n'en est rien !
Samedi, c'est sambati diem, qui veut dire "jour du sabbat", un nom qui est venu remplacer dies saturni, la référence à Saturne, avec l'avènement du christianisme. Autrement, nous serions peut-être aujourd'hui "saturdi" 23 février. De même, dimanche est devenu à la même époque le "jour du Seigneur", diem domenicus, au lieu du "jour du Soleil". Vous remarquerez que les Anglo-Saxons, eux, ont conservé les références à Saturne et au Soleil (Saturday, Sunday, c'est littéralement "jour de Saturne" et "jour du Soleil"). Sur ce, je vous souhaite un bon "saturdi" !
Savez-vous ce que sont les signes diacritiques ? Leur nom sonne comme un symptôme de maladie, mais ça ne s’attrape pas, promis. Les signes diacritiques, du grec diakritikos, "qui distingue", ce sont tous ces petits signes qui sont ajoutés aux lettres pour en modifier la prononciation ou le sens.
Ils ne sont que cinq en français. Il y a ceux qui se placent au-dessus des lettres, les accents grave, aigu et circonflexe, mais aussi le tréma, comme sur le e de "Noël", et il y a la cédille, le seul signe diacritique qui se place sous une lettre.
Ces signes n’ont pas toujours existé, on a commencé à les introduire à la Renaissance, quand il est apparu que les lettres héritées du latin ne permettaient pas de reproduire assez fidèlement les sons du français. Le premier signe a été le "é".
Les règles de leur emploi sont strictes : on peut mettre sur un o ou un i un accent circonflexe, mais il ne vous viendrait pas à l’idée d’y mettre un accent aigu en français, alors que cela se fait en espagnol, par exemple. En revanche, jamais d’accent sur les consonnes en français, la seule qui puisse être équipée d’un signe diacritique étant le c avec sa petite cédille.
D’autres langues disposent donc d’autres signes diacritiques. Il y a le rigolo petit rond sur le a suédois, qui s’appelle joliment le "rond en chef". Il y a aussi le o barré en norvégien, et, plus connu chez nous, le tilde espagnol, cette petite vague sur le n qui fait qu’il se prononce "gne" au lieu de "ne". Et c’est justement lui qui m’a donné l’idée de vous parler diacritiques aujourd’hui.
Cette semaine, je corrigeais au journal Le Monde un article dans lequel il était question de Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur. Je suis allée vérifier l’orthographe de son nom parce qu’il me semblait qu’il avait un tilde sur le n, d’habitude. Là, il n’y était pas. Et alors, impossible de savoir ! On trouve des documents disant que Laurent Nuñes tient au tilde, et étrangement, sur le portail du gouvernement, son nom ne le porte pas.
Ce qui est amusant, c’est qu’il est entré au gouvernement à l’automne dernier, juste au moment où se jouait en Bretagne une tragédie judiciaro-familialo-bretonnante autour du tilde. Car figurez-vous que le tilde existe en breton, et que des parents qui voulaient appeler leur bébé Fañch, avec un tilde sur le n, se le sont vu interdire, au motif que ce signe n’est pas français. Ils sont pourtant parvenus à démontrer que le tilde existait en ancien français, et l’affaire est en appel. Mais c’est peut-être pour éviter que les Bretons puissent se servir de l’argument Nunez que celui-ci s’est scalpé le n en entrant au gouvernement. En tout cas, vous voyez que ces tout petits signes soulèvent parfois de grandes passions.