Par Laurent Sagalovitsch - 10 mai 2024
D'emblée, avec un titre pareil, cela sent le papier de vieux con. Voire même de très vieux con, si ce n'est de très vieux très con. Il n'empêche, par son aura, sa popularité ou son influence, Taylor Swift pourrait souffrir d'être comparée à Bob Dylan. Évidemment, les styles musicaux sont différents, les époques aussi, mais dans cette manière que les deux chanteurs ont d'endosser les rêves et les aspirations de la jeunesse de leur temps, leurs trajectoires peuvent être mises en parallèle.
Bob Dylan a incarné les années 1960 comme Taylor Swift incarne les années d'aujourd'hui. Même effervescence, même omniprésence, même capacité à fédérer autour de leur personnage des foules considérables voire monstrueuses. Bob Dylan parlait à l'Amérique comme Taylor Swift parle à l'Amérique d'aujourd'hui. Avec cette même ferveur qui finit par déborder le simple cadre musical pour devenir un phénomène de société, l'objet de toutes les curiosités.
Chaque conférence de presse de Bob Dylan était scrutée à la loupe comme chaque publication de Taylor Swift sur les réseaux sociaux l'est désormais. Bob Dylan a été le porte-parole, l'oracle d'une jeunesse américaine qui prenait conscience que leur pays était loin de correspondre à l'image que l'on s'en faisait. Taylor Swift parle et incarne une Amérique qui a renoncé à tout exercice intellectuel si ce n'est de s'indigner (à juste titre) des violences commises envers les minorités.
Bob Dylan était un génie littéraire. Taylor Swift est une femme d'affaires incomparablement douée pour faire fructifier sa marque et, à travers ce glissement, cet éboulement même, on voit bien comment en l'espace d'un demi-siècle, nous sommes passés d'une société qui parvenait encore à réfléchir par elle-même à une sorte de marchandisation tous azimuts où la forme a définitivement pris le pas sur le fond.
C'est vrai en musique comme au cinéma. Songez que lorsque Manhattan de Woody Allen est sorti en 1979, il est resté trois semaines en tête du box-office… Oui, je sais, moi aussi j'ai failli en tomber de ma chaise! Trois semaines pour un film où, entre deux scènes de séduction amoureuse, on passait son temps à parler de Flaubert, de Mahler, de Bergman, de Norman Mailer, de psychanalyse, de mort, autant dire de thèmes et de sujets qui seraient aujourd'hui inaudibles voire incompréhensibles pour l'immense majorité de la population. Quel fabuleux décrochage!
Bob Dylan était un poète qui transcendait le langage pour fixer les vertiges de son époque, un troubadour shakespearien, là où Taylor Swift, malgré son indéniable talent, demeure une chanteuse certes pétillante, certes pétulante, certes douée comme personne pour habiter une scène de spectacle, mais bien trop occupée à faire prospérer son entreprise pour être autre chose qu'une marque destinée à plaire au plus grand nombre.
On ne peut pas le lui reprocher, elle est l'enfant d'une époque qui a sombré dans une aphasie culturelle si profonde qu'elle semble être en état de mort cérébrale. Elle a coupé tout lien avec l'écrit au point où une simple phrase qui prétendrait s'écrire sur plus d'une ligne provoquerait un passage aux urgences pour ceux qui se risqueraient à la comprendre. L'époque a l'intelligence d'un tweet, d'une story sur Instagram ou Facebook, d'un clip sur TikTok, un ramassis de banalités aussi revigorant à parcourir que la notice d'utilisation d'une crème hémorroïdaire.
Et nous n'avons encore rien vu. Quand l'intelligence artificielle aura fini de conquérir tous les champs de la pensée, l'humanité sera devenue un espèce de ventre, un cloaque fabuleux de bêtise, où à force d'ingurgiter inepties sur inepties, son intelligence intuitive, sa compréhension du monde et de ses enjeux, ne dépassera pas celle d'un moineau atteint de constipation.
Nul doute que dans les temps à venir, le règne de Taylor Swift dépassera toute mesure. Rouée et intelligente comme elle l'est, elle s'adaptera aux transformations de son époque et continuera à enchanter une Amérique retombée en enfance. Elle quittera son footballeur américain pour se pâmer entre les bras du fils d'Elon Musk, enfin s'il existe. Tous deux posséderont la moitié des richesses mondiales et passeront leur week-end sur la Lune. Ou sur Mars.
Moi, fort heureusement, comme Bob Dylan, je serai mort depuis bien longtemps.
C'est donc de mon cercueil que j'assisterai à la cérémonie de remise du prix Nobel de littérature de l'an 2068, décerné à Taylor Swift pour son œuvre qui aura marqué, selon le communiqué de l'académie suédoise, «l'empreinte d'un esprit qui sans cesse aura cherché à conquérir de nouveaux espaces littéraires par l'entremise d'une langue accrocheuse et râpeuse, porteuse d'une humanité bienveillante et aimante».
Au secours!!!!
Le bruit, c'est un peu comme les enfants ou les pets: on ne supporte que les siens. (Pardon, mais c'est Pierre Desproges qui le disait, à moins que ce ne soit Frédéric Dard.) Les moteurs de motos ou de voitures qui se mettent soudain à vrombir dans l'espace public sont insupportables. Et ce problème souvent très masculin a d'ailleurs fini par intéresser la communauté scientifique.
Basée à l'Université Western Ontario (sud-est du Canada), la psychologue Julie Aitken Schermer s'est livrée à une étude fondée sur un demi-millier de personnes, afin de déterminer ce que pouvait bien signifier le rapport de certains d'entre nous vis-à-vis des véhicules qu'ils possèdent (ou pourraient posséder) et notamment de leurs bruits. La conclusion n'est pas piquée des hannetons.
«Comme les modifications du pot d'échappement dérangent les gens et les animaux, et puisqu'elles sont illégales dans certaines juridictions, comprendre qui sont ceux qui veulent que leur véhicule fasse du bruit est un sujet de recherche intéressant», écrit la chercheuse pour le magazine Psychology Today.
Or, il se trouve que, comme nous l'apprend le média en ligne ScienceAlert, les personnes qui rêvent de faire pétarader leur engin (qu'elles le fassent réellement ou non) présentent fréquemment de hauts niveaux de sadisme et de psychopathie.
Pour parvenir à ses fins, Julie Aitken Schermer a interrogé 529 étudiants en commerce, dont 52% d'hommes, à propos de leur rapport à leur voiture. Les questions portaient aussi bien sur le bruit des véhicules que sur leur lien affectif avec leur voiture, ainsi que sur les éventuelles modifications de pots d'échappement effectuées.
Ensuite, les cobayes ont été invités à répondre au Short Dark Tetrad, un test destiné à détecter leur part sombre. Machiavélisme, narcissisme, psychopathie, sadisme, absence d'empathie: de nombreux critères ont été passés au crible. La mise en parallèle des résultats des deux parties de l'expérience a permis d'accoucher de résultats saisissants.
Ceux-ci ont permis d'établir que de forts degrés de sadisme et de psychopathie sont liés au fait «de vouloir modifier son pot d'échappement, de se sentir connecté à son véhicule et de penser que les voitures bruyantes sont vraiment cool, explique Julie Aitken Schermer au média audiovisuel canadien CBC News/Radio-Canada. Cela témoigne d'un mépris et d'un manque de sensibilité à l'égard des autres personnes et de ce qu'elles ressentent.»
D'après ses résultats, les hommes sont également bien plus nombreux à vouloir rendre leur voiture plus bruyante et à être prêts à trafiquer leur pot afin de monter dans les décibels.
À première vue, on ne comprend rien. C’est illisible. Une écriture cursive, des graphies particulières et des termes de l’époque. Bienvenue dans les manuscrits de la Nouvelle-France! Tous les historiens et les généalogistes vous le diront : plonger dans les documents de cette période est une grande source de frustration parce que déchiffrer et transcrire le contenu de ces écrits est exigeant et demande un temps fou.
On estime qu’il y a environ 1,5 million de pages relatives aux archives de la Nouvelle-France dans le seul réseau de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BANQ), souligne Rénald Lessard, spécialiste de la Nouvelle-France et archiviste coordonnateur au sein de la vénérable institution québécoise.
C'est le bloc d'archives le plus important sur le premier empire colonial français en dehors de la France.
Une partie de ces documents originaux a été numérisée et mise en ligne par BANQ. Bien qu’un court texte résume le contenu de ces documents, on est encore loin d’une transcription complète et détaillée de chacune de ces pages. En conséquence, une grande partie des archives de la Nouvelle-France ont été vues, mais elles n’ont pas nécessairement été lues.
Maxime Gohier codirige avec son collègue Léon Robichaud le projet Nouvelle-France numérique. Tous deux professeurs d’histoire, l’un à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR), l’autre à l’Université de Sherbrooke, ils rêvaient depuis longtemps d’un outil qui permettrait de mettre en parallèle des documents d’archives et leur transcription, tout en ayant la possibilité de les partager.
"Je fouillais sur Internet, puis à un moment donné, je tombe sur le site web de Transkribus", se rappelle Maxime Gohier. Transkribus est un nouveau logiciel développé en Autriche par la coopérative Read. Le système met à profit des techniques d’apprentissage profond et d’intelligence artificielle pour transcrire des séries de documents anciens.
Je venais de découvrir un peu le Saint-Graal que les historiens cherchent.
Le logiciel permet d’accéder à des modèles génériques de reconnaissance et de transcription de manuscrits, mais il permet aussi de développer des modèles plus spécifiques pour la transcription de textes particuliers, comme ceux de la Nouvelle-France.
Des historiens, des professeurs, des étudiants et des généalogistes spécialisés en paléographie ont graduellement corrigé les épreuves du logiciel pour lui apprendre à reconnaître des graphies particulières, des lettres, des nombres, des abréviations ou des termes de l’époque.
Au projet Nouvelle-France numérique se greffe un projet de science participative. Pierre Dubois a cofondé avec André Morel les Gardenotes, un regroupement de paléographes fascinés par les documents anciens.
Ce sont, pour la plupart, des généalogistes qui ont développé une grande aptitude à lire des documents manuscrits de l’époque. Grâce à leur expertise et à leur participation bénévole à l’entraînement des modèles, la performance de lecture du logiciel de transcription s’améliore.
On arrive avec un taux d’erreur de 5 % environ. C'est spectaculaire! Même nous, on n'y croyait pas au départ.
Une fois que la capacité de transcription du modèle est optimisée, à l’aide d’environ 200 pages d’entraînement, on peut lui soumettre des milliers de pages du même auteur avant que la transcription complète ne s'effectue en un clin d'œil.
"C’est là qu'on tombe dans la haute performance. Un notaire a pu laisser un greffe de 15 000 à 20 000 pages qu'on peut transcrire à 5 % d'erreurs. C'est extraordinaire!", s’exclame le professeur Maxime Gohier.
Des personnages oubliés
Avec la transcription de milliers de pages vient la capacité de réaliser des recherches dans les textes et de redécouvrir des morceaux de la grande et de la petite histoire de la Nouvelle-France, de voir surgir des personnages oubliés de l’histoire.
"Ça change tout. La vieille méthode de travail est complètement révolutionnée", s’enthousiasme Dominique Deslandres, professeure d’histoire à l’Université de Montréal.
Elle s’intéresse aux documents du premier tribunal de Montréal. Elle est à la recherche de femmes et d’esclaves dans les procès civils et criminels. À sa grande surprise, elle a découvert, dans le premier registre d’audience, une certaine Marie Pournin, étroite collaboratrice de Jeanne Mance à l’Hôtel-Dieu.
"En Nouvelle-France, il n'y avait pas d'avocat, les gens se représentaient eux-mêmes. La personne est interrogée, elle explique toutes sortes de choses. Donc, on voit et on entend des personnes qui n'ont laissé aucune autre trace que celle-là dans les archives", ajoute Dominique Deslandres.
Accéder à cette masse de documents manuscrits ouvre aussi la voie à de nouvelles recherches, plus pointues, qui seraient impossibles à réaliser à moins de lire ces documents, page par page.
"Ça va nous permettre de travailler plus en profondeur sur des individus, des lieux, des sujets, parfois plus terre à terre, comme la présence de chiens en Nouvelle-France, des choses qui passent sous le radar en temps normal. Les possibilités sont énormes", renchérit Rénald Lessard de BANQ.
Le grand public aura-t-il bientôt accès à ces transcriptions des archives de la Nouvelle-France? Le projet reste à venir. D'abord, il y a un coût lié à l'utilisation de la technologie, rappelle Maxime Gohier, mais c'est également une question de propriété d'images. Certaines sont publiques, d’autres sont privées et, bien que plusieurs soient prêts à les transmettre, il reste encore du travail à faire de ce côté-là.
Comme l’histoire de la plupart des courants politiques, celle du trotskisme est faite de dissensions, conduisant parfois à la naissance de factions emmenées par des leaders plus ou moins charismatiques ou singuliers. Mais parmi elles, il en est une qui dénote particulièrement : le posadisme.
Par Patrick Marcolini. Texte publié dans Brasero N° 1 (2021). Revue annuelle éditée par les Éditions de L’Échappée
Fondée par Homero Cristalli, alias J. Posadas (1912-1981), celle-ci s’est notamment fait connaître par la publication en 1968 d’un texte au titre baroque : Les Soucoupes volantes, le processus de la matière et de l’énergie, la science et le socialisme. Posadas y affirmait non seulement que les ovnis étaient bien des vaisseaux spatiaux conduits par des extraterrestres, mais que ces habitants d’une autre planète étaient nécessairement parvenus au stade du communisme défini par Marx.
En effet, seule une civilisation communiste, parvenue à un haut degré de développement scientifique et d’harmonisation des rapports sociaux, était en mesure de trouver les moyens techniques de traverser l’Univers pour venir observer l’espèce humaine sur Terre. Cet essai, qui n’était au départ qu’une mise au point dans un débat interne, a pourtant connu une diffusion internationale, alimentant même la légende du posadisme comme « secte trotskiste ovni ».
Mais comme l’a rappelé récemment une longue enquête du journaliste A. M. Gittlitz*, avant de se faire connaître pour ses positions loufoques sur les soucoupes volantes, le posadisme a joué un rôle non négligeable dans l’histoire des conflits sociaux et politiques en Amérique latine. Après une enfance marquée par la misère et une courte carrière de footballeur, Homero Cristalli, qui était issu de la classe ouvrière de Buenos Aires, avait multiplié dans les années 1930 les petits boulots de travailleur manuel.
D’abord jeune militant socialiste, il avait fini par rejoindre les trotskistes, qui à l’époque ne formaient encore qu’un mouvement embryonnaire. S’étant vu confier la tâche d’implanter les idées de Trotski dans le prolétariat par le biais de l’action syndicale, celui qui prend alors le pseudonyme de J. Posadas se distingue par ses talents d’organisateur, et devient à partir de 1947 l’une des figures centrales du trotskisme argentin. Cette année-là, il fonde en effet le POR (T) – pour Parti ouvrier révolutionnaire (trotskiste) – ainsi que le GCI, Grupo Cuarta Internacional, dont le nom définit clairement l’ambition : se faire reconnaître officiellement comme la section argentine de la IVe Internationale, créée neuf ans plus tôt par Trotski pour fédérer les militants bolchéviques opposés au pouvoir de Staline, et reconstituer une avant-garde révolutionnaire à l’échelle mondiale.
Cette reconnaissance par la IVe Internationale sera chose faite en 1951, lors du troisième congrès de l’organisation, qui réunit 74 délégués de 25 pays. Posadas se voit même nommé par ses camarades secrétaire du Bureau latino-américain (BLA), qui a pour mission de développer des sections trotskistes sur tout le sous-continent. Son rôle dans les années 1950-1960 est ainsi de première importance. Par exemple, c’est lui qui supervise la création à Cuba, en pleine révolution, d’une déclinaison locale du POR (T) qui rencontrera la sympathie de Che Guevara, avant d’être éliminée par un Fidel Castro aligné sur les positions soviétiques. Mais son influence est aussi notable au Guatemala du côté du MR-13 (Movimiento Rebelde 13 de Noviembre), une rébellion militaire de gauche menant la guérilla contre l’impérialisme américain, et soutenue par les étudiants et de larges fractions de la classe ouvrière – Gittlitz rappelle ainsi que Posadas était « devenu la figure de proue idéologique des rebelles du MR-13, les poussant à former des conseils paysans révolutionnaires armés partout où ils le pouvaient »**.
Entre-temps, les positions de Posadas et de ses partisans, convaincus que l’effort militant devait se concentrer sur l’Amérique latine comme épicentre de la révolution mondiale à venir, avaient toutefois rencontré l’opposition du reste de la IVe Internationale, si bien que le BLA avait fait scission en 1962 pour se transformer en… « Quatrième Internationale Posadiste ». Celle-ci, qui comptait aussi dans ses troupes plusieurs petits partis trotskistes européens, a d’ailleurs maintenu son existence jusqu’à aujourd’hui, et ce malgré la disparition de son fondateur en 1981.
Posadas n’était donc pas tout à fait le premier hurluberlu venu. Il n’en reste pas moins que les déclarations contenues dans son fameux texte sur les soucoupes volantes sont particulièrement insolites. Dans le détail, Posadas y affirme trois choses. D’une part, il est possible d’extraire directement l’énergie de la matière et de l’exploiter à l’infini, et cela même si les humains, dont les recherches scientifiques sont limitées par les courtes vues de la bourgeoisie, n’y sont pas encore parvenus. D’ailleurs, veut croire Posadas, « un jour, l’énergie viendra de l’air ».
D’autre part, la vie existe probablement dans d’autres systèmes solaires, et des entités intelligentes ont pu y développer les connaissances nécessaires à cette exploitation de l’énergie partout répandue. Par ce biais, elles ont pu réussir à « éliminer toutes les préoccupations dues aux problèmes de la faim et de la lutte de classes », et sont donc passées au communisme. Enfin, comme elles ne sont pas soumises à notre conception du temps – puisque « le temps a été et est une notion acquise par la société divisée en classes » –, traverser l’Univers jusqu’à nous ne leur a posé aucun problème, d’autant qu’elles maîtrisent toutes les technologies pour ce faire. Et voilà donc expliquées les apparitions d’ovnis dans de nombreux pays.
Posadas en tire des conclusions dont la naïveté amuse souvent : « Si des êtres d’autres planètes nous regardent, ils doivent dire avec étonnement : « Oh ! Ils se battent pour une auto, ils se tirent dessus, ils se tuent ! » » Mais d’autres commentaires, relevant de spéculations plus bizarres, contribuent à donner à son texte un style déroutant qui l’apparente à la tradition des « fous littéraires » recensés par Raymond Queneau et André Blavier.
Ainsi Posadas émet-il l’hypothèse que les extraterrestres soient en mesure de modifier la matière à volonté, par une sorte de télékinésie : « Ils peuvent le faire s’ils dominent la science, tout comme ici on peut déplacer des montagnes. Mao Tse Toung dit qu’il faut le faire avec une pelle et une pioche. Ces êtres-là le font en mettant en action l’énergie de la montagne […]. »
Lorsqu’on feuillette les écrits de Posadas datant des années 1960-1970, on se rend compte que ses spéculations portaient en fait bien au-delà de la question extraterrestre, dans des directions à vrai dire inattendues. Il défendait ainsi l’idée selon laquelle la troisième guerre mondiale et l’apocalypse nucléaire étaient inévitables – mais cet événement était à ses yeux un passage obligé vers le socialisme : en dépit de la destruction de la moitié de l’humanité, il signifierait aussi l’annihilation du capitalisme… Autre exemple, cette prophétie de 1978 : sous le socialisme, « l’humanité fera des expériences pour se gagner les animaux dits « sauvages » et ceux-ci cesseront de l’être. Certaines espèces animales disparaîtront encore comme d’autres dans le passé, comme ce fut le cas des mammouths. […] Les êtres humains se préoccuperont dans le futur d’avoir des relations harmonieuses avec les animaux. »
On n’est guère loin des rêveries de Charles Fourier, ce précurseur du socialisme qui annonçait que dans la société de l’avenir, les bêtes inutiles ou nuisibles seraient remplacées par leur « contre-moule », au lion se substituant par exemple « l’anti-lion », « superbe et docile quadrupède », permettant à un cavalier de faire le trajet Bruxelles-Marseille dans la journée.
À la toute fin de sa vie, Posadas s’intéressera également aux expériences du chercheur soviétique Igor Charkovsky sur l’accouchement dans l’eau : celui-ci avait observé le rôle apaisant des dauphins lorsque ceux-ci sont présents auprès des femmes enceintes au moment de la parturition. Posadas en tirera des conclusions optimistes sur la communication entre l’homme et l’animal, imaginant qu’à l’avenir les dauphins pourraient vivre dans des piscines à côté de chaque famille humaine, comme des sortes d’animaux domestiques. C’était tout à fait le genre d’idées qui allait contribuer à populariser le posadisme auprès des amateurs de bizarreries, à l’image de Matthew Salisbury, auteur de l’article aujourd’hui devenu culte qui fit connaître Posadas aux lecteurs de la revue Fortean Times, consacrée au paranormal et aux phénomènes étranges
Selon Gittlitz, le véritable responsable des extrapolations posadistes sur les ovnis comme artefacts d’un communisme extraterrestre n’était pas tant Posadas lui-même qu’un de ses plus proches camarades, Dante Minazzoli, cofondateur avec lui du GCI. Fasciné par la science-fiction et la question de la vie sur les autres planètes, celui-ci mit ce sujet sur la table dans les années 1960, lors d’une discussion interne au mouvement posadiste concernant l’application du marxisme aux sciences naturelles. On ne peut pas exclure que l’écrit de Posadas sur les soucoupes volantes ait été un moyen de contrer l’insistance de Minazzoli sur cette question, en mettant un point final à la discussion par un texte officiel. Posadas y affirme tout de même que « si les extraterrestres existent, il faut les appeler à intervenir pour aider à résoudre les problèmes de la Terre ».
Quoi qu’il en soit, les autres tendances trotskistes s’appuyèrent sur cela pour présenter les posadistes comme des fous. Et c’est ainsi que furent posées les bases de la légende présentant leur mouvement comme un « culte ufologique trotskiste », légende qui lui vaut aujourd’hui la sympathie de quantité de plaisantins sur le Web, au point d’être devenu une sorte de mème Internet. Pourtant, il y avait bien un élément religieux dans le posadisme. Dante Minazzoli écrivait encore au soir de sa vie, en 1996 : « Le processus qui mène au contact cosmique de l’humanité tout entière avec les extraterrestres est irréversible, même s’il prendra des décennies à s’accomplir. Aucune force ne peut l’arrêter. Ni les puissances qui règnent sur la Terre ni les extraterrestres agressifs, avec ou sans « pacte diabolique » entre eux, ne pourront empêcher l’humanité de devenir un jour membre à part entière de la Communauté intergalactique".
Dans son livre, Gittlitz prétend que le potentiel subversif du « communisme alien » de Posadas est son ouverture radicale à l’autre, perceptible dans son intérêt pour les extraterrestres et pour les animaux : cette « xénophilie » serait plus que jamais d’actualité à l’heure où les politiques d’émancipation doivent prendre en compte la question queer ou celle des migrants. De même, ses positions sur la guerre nucléaire et son « communisme de l’apocalypse », foncièrement optimistes, seraient un antidote au pessimisme démobilisateur engendré par le spectacle de la destruction des bases écologiques de la vie sur Terre.
On peut aussi voir les choses différemment. Le posadisme présente en effet l’intérêt de montrer jusqu’où peut conduire l’idéologie du progrès lorsqu’elle est poussée à son comble : le délire pur et simple. Soyons clairs : ce n’est pas forcément lorsqu’ils postulent l’existence d’êtres intelligents sur d’autres planètes que Posadas ou Minazzoli déraisonnent – après tout, pourquoi pas ? Ce qui apparaît comme délirant, c’est plutôt l’idée que le développement technoscientifique conduirait nécessairement, ici comme dans le reste de l’Univers, au plus haut degré d’égalité et d’harmonie entre les êtres vivants. Pour ce qu’on peut voir sur la Terre, l’histoire des deux derniers siècles suggère plutôt l’inverse…
Le 21 avril 1944, les Françaises se trouvaient parmi les dernières en Europe à obtenir le droit de vote. Cet acquis, vieux de 80 ans, est l’aboutissement de plus d’un siècle de lutte et de débats en faveur de l’égalité politique en France.
Des suffragettes françaises manifestent pour réclamer le droit de vote à Nantes le 27 octobre 1934, lors d'un congrès du Parti radical-socialiste. © AFP
En 1848, la France fait figure de pionnière en accordant le droit de vote à tous les hommes, devenant ainsi l’un des premiers pays au monde à instaurer le suffrage universel masculin. Les femmes, quant à elles, devront patienter jusqu’en 1944 pour obtenir le droit de se rendre aux urnes. Cantonnées aux rôles d’épouses et de gardiennes du foyer familial, elles restaient jusqu’alors exclues de la sphère politique, jugées inférieures, influençables et immatures.
À la même date, les Néo-Zélandaises jouissaient de ce droit depuis déjà quarante-sept ans, contre trente-huit pour les Finlandaises, vingt-six pour les femmes britanniques – âgées de plus de trente ans – et vingt et un ans pour les Turques. Face au retard français, le combat en faveur de l’égalité politique aura mis plus d’un siècle à trouver satisfaction.
Pourtant, dès la Révolution française, des voix telles que celles de Condorcet et Olympe de Gouges se lèvent en faveur du suffrage féminin. Leurs appels restent cependant lettre morte, les femmes étant officiellement exclues du droit de vote par l’Assemblée nationale le 22 décembre 1789, puis par la Constitution de 1791. « La femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit également avoir celui de monter à la tribune », écrit en réponse Olympe de Gouges dans son texte « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » dans lequel elle dénonce le mépris des droits de la femme, oubliés des textes de loi.
L’instauration du suffrage universel masculin en 1848 marque un tournant dans ce combat. « À partir du moment où on accorde le droit de vote à tous les citoyens et à tous les Français se pose réellement la question de toutes les citoyennes et de toutes les Françaises », explique l’historienne Anne-Sarah Bouglé-Moalic, auteure de Vote des Françaises : cent ans de débats, 1848-1944.
Plusieurs pointent du doigt un universalisme à demi-mesure, comme le club La Voix des femmes, qui encourage une candidature de George Sand aux élections législatives. Bien que cette dernière se désolidarise de cette initiative, Jeanne Deroin tente, quant à elle, de s’y présenter. « Elle candidate aux élections de manière sauvage pour demander un suffrage véritablement universel et l’éligibilité des femmes. Par la suite, cette méthode militante sera utilisée quasiment jusqu'au bout », précise Christine Bard, historienne spécialiste des féminismes et auteure de Femmes outsiders en politique.
La citoyenneté ne figure cependant pas en tête des préoccupations pour de nombreuses femmes, qui demeurent encore sous la tutelle maritale et sont privées d'accès à l'éducation, au divorce et à un salaire. « À cette époque, ce n’est pas la seule dimension de l’émancipation des femmes, il y a aussi celle des droits civils, pointe Anne-Sarah Bouglé-Moalic. Il est même difficile pour les femmes de se projeter sur ce droit de vote sachant que, dès 1852, il perd sa substance avec l’instauration du Second Empire. »
Il faut attendre la IIIe République, proclamée en 1870, pour que l’acquisition de ce droit devienne un objectif commun, notamment sous l'impulsion d’Hubertine Auclert, qui demande la révision du Code civil en faveur de l’éducation et de l’indépendance économique des femmes, mais aussi du droit de vote et du divorce. « Elle va réussir à convaincre l'ensemble du mouvement féministe d’y mettre toutes ses forces, avec cette idée que le droit de vote est la clé de voûte de tous les autres droits. Selon elle, une fois que les femmes seront citoyennes, elles seront en mesure d’œuvrer pour leur totale émancipation », résume Christine Bard.
Progressivement, le mouvement féministe français accorde alors la priorité à la conquête de la citoyenneté. En 1909 est créée l’Union française pour le suffrage des femmes puis, le 26 avril 1914, le quotidien Le Journal organise un référendum officieux auprès des femmes. À la question « Mesdames, Mesdemoiselles, désirez-vous voter un jour ? », environ 506 000 d’entre elles répondent « Je désire voter », contre seulement une centaine d’avis défavorables.
Après la Première Guerre mondiale, alors que le suffrage universel s’étend en Europe et que de nombreuses Françaises ont participé à l’effort de guerre, plusieurs propositions de loi en faveur d’un élargissement aux femmes sont adoptées par la Chambre des députés.
Mais l’idée que les femmes pourraient soutenir l’Église catholique dans les urnes ou qu’elles sont inaptes à voter fait de la résistance. « Plus que pour manier le bulletin de vote, les mains de femmes sont faites pour être baisées, baisées dévotement quand ce sont celles des mères, amoureusement quand ce sont celles des femmes et des fiancées. […] Séduire et être mère, c'est pour cela qu'est faite la femme », écrit le sénateur Alexandre Bérard dans un rapport parlementaire en 1919. Au sortir de la guerre, d’autres craignent aussi la supériorité numérique des femmes. « Donner le droit de vote aux femmes, c'est leur donner la majorité dans l’électorat », commente Christine Bard. Entre 1919 et 1936, le Sénat s’opposera à cinq reprises au suffrage féminin.
Bloqué par la frange conservatrice du Parlement, le mouvement en faveur du vote féminin, incarné par les « suffragettes », redouble d’efforts. En 1925, plusieurs candidates se présentent aux élections municipales sur la liste du Parti communiste, profitant du fait que rien dans la Constitution n’impose l’éligibilité des candidats.
« Dans toutes les communes où ils vont avoir des élus, il y aura forcément une femme élue, que ce soit à Douarnenez, à Saint-Pierre-des-Corps ou dans des villes de la banlieue rouge de Paris comme Arcueil », rappelle Anne-Sarah Bouglé-Moalic. Au total, sept femmes sont élues sur les listes communistes et siègent en attendant que leur élection soit invalidée.
Malgré leur incapacité à voter ou à se porter candidates, certaines femmes se voient même être nommées à des postes gouvernementaux dès 1936. Trois d'entre elles sont désignées pour occuper des sous-secrétariats d'État dans le gouvernement formé par Léon Blum à la victoire du Front populaire.
D’autres insistent sur le « droit naturel des femmes à être reconnues comme citoyennes » et sur « l’utilité sociale du droit de vote », comme l’explique Christine Bard. « Beaucoup de féministes mettent en avant l'intérêt pour la société d'avoir des femmes citoyennes pour mieux lutter contre les fléaux sociaux comme la prostitution, la tuberculose et la pauvreté en raison de leur fibre sociale », décrit l’experte.
C’est le 18 mars 1944 que le général de Gaulle, alors président du Comité français de libération nationale, déclare devant l’Assemblée consultative provisoire que « le régime nouveau doit comporter une représentation élue par tous les hommes et toutes les femmes de chez nous ». Trois jours après cette déclaration historique, l’ordonnance portant organisation des pouvoirs publics en France après la Libération dispose que « les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes » (article 17). Enfin, le 24 mars 1944, cette même assemblée adopte l’amendement du député communiste Fernand Grenier, établissant le droit de vote et d’éligibilité à toutes les femmes françaises.
Ce texte met un terme à plus d’un siècle de lutte pour les droits civiques des femmes. « Pour retrouver une place normale dans l'ensemble des pays démocratiques, la France ne pouvait plus tarder, c'était déjà une anomalie que les femmes ne puissent pas voter avant 1944 au pays dit des droits de l’homme », avance Christine Bard. « On prend soudain en compte le chemin que les femmes ont pu faire dans la société depuis la fin du XIXe siècle. Elles ont accès à l’école et à un monde du travail qui sort du travail domestique. Elles qui ont toujours été indispensables, on les remarque enfin », poursuit Anne-Sarah Bouglé-Moalic.
Les Françaises se rendent aux urnes pour la première fois le 29 avril 1945, aux élections municipales, soit près de cent soixante ans après la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » d’Olympe de Gouges, dans laquelle elle écrivait déjà « La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits ».
Les femmes votent pour la première fois en France lors des élections municipales à Paris, le 29 avril 1945. AFP
Cette loi existe depuis 1955 et a pour objectif de protéger la reproduction des mammifères et des oiseaux qui vivent dans les bois.
Par Graziella Polledri - 14 avril 2024
Cisco et Rascal en liberté ! Mais on est en février, tout est permis...
ANIMAUX - Un oubli qui pourrait vous coûter très cher. À partir de ce lundi 15 avril et jusqu’au 30 juin, promener votre chien sans laisse en forêt peut vous exposer à une amende de 750 euros. Cette disposition n’est pas nouvelle mais émane d’un arrêté du 16 mars 1955 qui permet de protéger la reproduction des oiseaux, laquelle a lieu en période printanière.
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Les oiseaux disparaissent d’abord à cause de l’agriculture intensive, selon cette nouvelle étude
« Pour prévenir la destruction des oiseaux et de toutes espèces de gibier et pour favoriser leur repeuplement, il est interdit de laisser divaguer les chiens dans les terres cultivées ou non, les prés, les vignes, les vergers, les bois, ainsi que dans les marais et sur le bord des cours d’eau, étangs et lacs » souligne cette loi.
L’arrêté du 16 mars 1955 précise aussi que « dans les bois et forêts, il est interdit de promener des chiens non tenus en laisse en dehors des allées forestières pendant la période du 15 avril au 30 juin ». Une allée forestière comprend notamment les routes, les chemins ou sentiers forestiers, avec par exemple les sentiers de grande randonnée mais aussi tous les chemins de promenade.
Protéger la période de reproduction
Les animaux de compagnie devront donc être tenus en laisse pendant deux mois et demi, afin de ne pas déranger la faune sauvage pendant ses moments d’intimité.
« Les chiens, au flair très affûté, peuvent repérer les nouveau-nés en forêt et les oiseaux qui nichent au sol dans les friches. Par leur simple présence, ils pourraient déranger et stresser les animaux forestiers particulièrement sensibles pendant cette période et ainsi, mettre en péril leurs reproductions » explique l’Office National des Forêts.
En parallèle de cette loi, il ne faut pas oublier que peu importe la saison, la laisse est obligatoire pour les chiens d’attaque, de garde et de défense, et ce, dans tous les espaces publics. De plus, le propriétaire doit toujours « garder son animal de compagnie à moins de 100 mètres » de lui et doit être sous son « contrôle direct » rappelle l’ONF.
Si vous ne respectez pas ces conditions, le préfet ou la mairie pourrait ordonner que votre animal soit placé dans un lieu de dépôt adapté à la garde de celui-ci.
By CLEA CAULCUTT in Paris - April 2, 2024 4:00 am CET
Trust the French to intellectualize the war on woke.
Roughly once a month, the crème of a very specific part of French society gathers at Le Laboratoire de la République, a think tank in central Paris, to warn against what it sees as a dangerous and divisive import.
The events hosted by the Laboratoire don’t just focus on so-called wokeness, but it’s a recurring theme. Speakers have included the French-Algerian novelist Kamel Daoud who has dismissed wokeism as “dangerous” and “boring,” the influential academic and Islam specialist Gilles Kepel who has denounced cancel culture in universities and Nathalie Heinich, a sociologist who described wokeism as a “new totalitarianism.”
“We didn’t wait for [the woke generations] to tackle racism and sexism,” Heinich said in an interview with POLITICO. “Do they think they’ve invented these fights? We don’t need to ban speeches that don’t suit us to advance the fight against discrimination.”
Set up in 2021 by Jean-Michel Blanquer, a former education minister under President Emmanuel Macron, the think tank was set up to defend a “republican ideal” that transcends race and religion. Woke ideology, Blanquer recently argued in an interview in an elegant restaurant in central Paris, is “pessimistic” because it reduces people to representatives of groups with fixed identities that eclipse the individual: woman, Black, Muslim, gay. “This hodgepodge just creates more conflict in our societies,” he said.
In the United States, the anti-woke banner has been primarily hoisted by figures on the cultural right like Florida Governor Ron DeSantis. In France, however, while the main thrust of hostility comes from populists and the far right — most notably Eric Zemmour, head of the far-right Reconquest party — opponents to so-called wokeness can also be found among the establishment and even the cultural left.
The term is mostly used pejoratively by critics to describe what they see as a U.S.-driven shift in progressive values leading to the repression of plurality of opinions on gender and race and the promotion of minority identities at the expense of French unity.
“Our defenses against wokeness should be strong,” said Brice Couturier, the host of the Laboratoire’s monthly debates and a self-described leftist who has been critical of “Islamo-leftism” and “transgender ideology.”
“The Republican ideal is egalitarian,” he said. “It doesn’t sit well with the idea that identity, even racial identity, should become an important cultural marker.”
To reach the French headquarters in the war on woke, cross the Seine with the Louvre at your back, walk past the Musée d’Orsay and wander through the 7th arrondissement until you get to La Maison de l’Amérique Latine on the posh Boulevard Saint-Germain.
On a recent evening in January, university professors, intellectuals, and students mingled in a wood-paneled reception room drinking warm white wine, chatting in the wake of the Laboratoire’s guest speaker who had answered a Q&A on immigration and France’s relations with its ex-colonies.
“At my university, everyone criticizes what they call the domination of the white male,” said Lila Nantara, a 23 year-old cultural studies student who had come to hear the debate. “I think it’s a good cause and comes with good intentions, but woke ideas are an intellectual confinement that are harmful to scientific studies,” she added.
French hostility to so-called woke ideas arguably dates to the upheaval of the 18th century, when the revolutionaries didn’t just decapitate the king but set out to remake society from the ground up. In the place of the Ancien Régime dominated by clerics and noblemen, the Republic erected ideals of secularism and equality, in which ethnic, regional and religious identities were subsumed into universalized Frenchness.
Even today, the French government declines to keep statistics on the country’s ethnic and religious makeup, arguing that doing so would be divisive and reminiscent of the data collection during World War II that was used to round up Jews. And much of the debate about immigration, particularly from predominantly Muslim countries, has centered around objections to overt religiosity in the public sphere.
In recent years, concern about wokeness has reached the highest echelons of French politics. In 2022, Macron declared himself “against woke culture,” announcing his opposition to the removal of controversial historic statues. “We need to face our history,” he added. His wife Brigitte has expressed her opposition to gender-neutral pronouns. And the recently appointed conservative Culture Minister Rachida Dati pledged to fight wokeism, “a policy of censorship.”
“Wokeism is the idea to be ‘awake’ to fight discrimination,” said Ilana Cicurel, a member of the Laboratoire and a member of the European Parliament with Macron’s Renaissance party. “It’s hard not to share that objective. But we see a drift, the temptation to reduce people to their identities in the name of the fight against discrimination.”
Blanquer, who also comes from the right, says his participation in the battle was inspired at least in part by his time at Harvard University. “It’s there that I discovered political correctness, which is the premise of wokeism on U.S. campuses,” he said. “I become very concerned about the communitarian outlook, where everything is seen through the prism of belonging to one group or another.”
He cautioned that wokeness could serve as a thin wedge for totalitarian regimes looking to foster division in Western society. “Look at how the Chinese use TikTok or the way Qatar uses [Al Jazeera’s social media channels] AJ+, and how they exploit woke themes,” he said.
“In the name of wokeism, they encourage Islamism,” he added. “We need to be lucid about this.”
What’s distinctive about French anti-wokeness is that it’s by no means confined to the center or the right. It also has adherents on the left, with traditionalists facing off against new generations influenced by the conversation in the U.S.
The topic is so toxic that most politicians try to avoid it altogether, but there are many on the left who see identity politics as a renunciation of the battle for the working classes or a fore rider of American prudishness.
“Big business is playing with [wokeism], giving symbolic advantages to minorities, installing unisex toilets so trans people don’t feel discriminated against,” said Couturier, the leftist anti-woker. But “behind identity politics, the reality is that salaries aren’t going up.”
France is, after all, a country where Woody Allen, the film director accused by his adopted daughter of sex abuse, is still making movies; where Roman Polanski, who was convicted of statutory rape, gets film awards; and where Johnny Depp made his first film with a female film director after winning his defamation case against Amber Heard.
France “simply respects justice much more,” said Heinich, the sociologist. “Polanski is not facing charges here, unlike the U.S. The case is very old, and his victim has requested that the lawsuits stop. And Woody Allen has been totally cleared. So enough is enough.”
In France, the #MeToo movement was met with ambivalence, with the film star Catherine Deneuve defending “the right to seduce” and “the freedom to bother” women as part of sexual freedom in France. While some women have spoken out against abusive directors or actors, recent allegations of sexual misconduct against France’s best-known actor Gérard Depardieu have devolved into a brawl, with rival factions lining up on either side.
When it comes to race and religion, the left can sometimes be less concerned with intolerance than the right to offend, most famously embodied in the weekly Charlie Hebdo magazine. In 2015, Islamist gunmen incensed by lewd cartoons depicting the Prophet Muhammad attacked its offices, killing 12 people and sparking an outcry of support under the slogan “Je suis Charlie.”
“It is mostly the left that is very resistant to racial questions in France,” said Rokhaya Diallo, a commentator and anti-racist activist. “Universalism was first and foremost a value of the left, and then it was adopted by the right.”
French culture is “resistant to wokeism”, said Mathieu Bock-Côté, a conservative essayist and political commentator. “There’s a culture of irreverence here. If you tell a Frenchman that a man can be pregnant, he’ll burst out laughing.”
Sensitivities about race and religion, argue some on the left, are an American phenomenon, born out of a history of race relations that France — despite its history of colonialism — doesn’t share. “French culture resists wokeism because of an instinctive distrust of the U.S., either because they see it as U.S. imperialism or because they don’t think it’s part of their culture,” said Bock-Côté.
The irony for France’s anti-woke warriors is that the ideas behind it are, well, very French. It emerged from the writings and teachings of a group of colorful French intellectuals — including Jacques Derrida, Michel Foucault, René Girard and Jean Baudrillard — who argued that truth is subjective and often determined by power relations.
Known as post-structuralism, or French Theory, their ideas gained popularity in the U.S. in the 1960s and 1970s through a series of writings and lectures, eventually giving rise to gender and decolonial studies. Later, Girard joked that he and his fellow French academics had brought “the plague” to America.
The left can be less concerned with intolerance than the right to offend, famously embodied by the Charlie Hebdo magazine | Joel Saget/AFP via Getty Images
“Our problem is that French Theory, which has become crazy on U.S. campuses, is heading back to us like a boomerang in the form of postcolonial studies, gender studies, intersectionality,” Couturier wrote in his book “Ok Millennials!”
It’s rare these days for a week to go by without another French episode in the woke wars. In December, the winner of the Miss France beauty pageant was accused of having “woke hair” (a pixie cut). Last June, a prominent politician on the left was forced to quickly backtrack after suggesting 16-year-olds should receive parental consent before changing their gender. The values in French filmmaking also appear to be changing, with the prestigious César film awards announcing that directors and actors facing charges of sexual violence will no longer be allowed to speak or appear onstage during the ceremony.
As woke issues dominate the cultural debate, its opponents are worried they’re starting to lose the fight. While only 4 percent of the French support wokeness, according to the polling led by politics specialist Chloé Morin, some of its ideas are quietly taking root. Some 24 percent think people “should stop making caricatures of religions,” a 5 percent increase on 2015, and 41 percent think every level of society is affected by racism.
“I’m worried [France] will follow in the footsteps of the U.S. where wokeism is the dominant ideology on campus, in elite universities,” said Couturier. He added that students graduating have “soaked up this ideology.”
“It’s a bit like my experience growing up with Marxism,” he said “I really struggled to get rid of it, and often I’m still thinking in terms of class struggle. So I’m not that optimistic.”
Le canton inhabité d’Entremont, de forme rectangulaire, se situe dans la réserve faunique La Vérendrye, en Abitibi-Témiscamingue, un peu au nord du lac Cocôwan, une des composantes du réservoir Dozoi, et à environ 20 km à l’est de la baie Kawastaguta du Grand lac Victoria. Son territoire, au relief plutôt accidenté, contient bon nombre de petits plans d’eau, dont le lac Tesserie. Il est également irrigué par deux rivières importantes, la Canimiti et la Chochoucouane, qui créent un confluent au centre du territoire. Depuis le 20 décembre 1955, il porte le nom d’un gentilhomme normand, Philippe Moius d’Entremont, dont les origines se trouveraient toutefois en Savoie. Les titres de noblesse de la famille d’Entremont, ayant émigré en Normandie au XVIe siècle, remonteraient, selon certains, au XIe siècle. D’autres affirment cependant que c’est Louis XIV (1638-1715) qui fit de Philippe Mius le sieur d’Entremont. Quoi qu’il en soit, il existe aujourd’hui en France deux communes appelées Entremont, et toutes deux se trouvent dans l’ancienne province de Savoie, définitivement incorporée à la France en 1860 ; les deux tiennent leur nom de leur situation géographique entre de hautes montagnes. L’une d’entre elles, à 791 m d’altitude au cœur des Alpe françaises, s’étend sur le Borne, dans le département de la Haute-Savoie, à quelque 25 km au nord-est d’Annecy, et à environ 40 km au sud-est de Genève, en Suisse. Les touristes y découvriront notamment les ruines d’un monastère du XIIe siècle, érigé en Abbaye en 1154 mais supprimé en 1772, ainsi qu’une église, construite également au XIIe siècle, mais profondément modifiée jusqu’au XIXe siècle.
L’autre commune, Entremont-le-Vieux, sise à 840 mètres d’altitude, se situe sur le Cozon, dans la partie ouest de la Savoie, à une quinzaine de kilomètres au sud de Chambéry, préfecture de département. Là, on peut y voir les ruines d’un château. Le sieur d’Entremont naquit vers 1609, probablement à Cherbourg, en Normandie. En 1650 ou 1651, il fut amené en Acadie par son ami, le nouveau gouverneur Charles de Saint-Étienne de La Tour, comme lieutenant-major et commandant des troupes du roi. Deux ou trois ans plus tard, Entremont reçut, en récompense pour ses services, le fief Pobomcoup (aujourd’hui Pubnico, en Nouvelle-Écosse) à titre de baronnie.
Il assuma plusieurs fonctions dans la colonie, devenant même, vers 1670, procureur du roi, puis il s’occupa du développement des terres qui lui avaient été attribuées. Il mourut en Acadie au début du XVIIIe siècle. Sa descendance demeure nombreuse en Nouvelle-Écosse, et tout particulièrement, à Pubnico.
Au Québec, en plus d’un canton, le toponyme Entremont désigne un lac, situé précisément dans le canton d’Entremont, sur le cours de la rivière Canimiti, et des voies de circulation, à Sainte-Foy, Saint-Marc-des-Carrières et Amos.
Proclamé en 1966, le canton d’Entremont est situé au nord du réservoir Dozois, dans la réserve faunique La Vérendrye. Ce canton de présente comme un ensemble hydrographique compliqué où l’on distingue à peine la rivière Chochoucouane et la rivière Canimiti, au sein de très nombreuses étendues d’eau. Son relief, accidenté et brisé, varie entre 350 et 537 mètres d’altitude. En dénommant ainsi cette unité géographique en 1955, on a voulu honorer la mémoire du Normand Philippe Mius ou Muis (né vers 1609 et mort vers 1700). En 1650 ou 1651, il est amené en Acadie par le nouveau gouverneur Charles de Saint-Étienne de La Tour comme lieutenant-major et commandant des troupes du roi. Deux ou trois ans plus tard, il reçoit en récompense le fief Pobomcoup (Pubnico, Nouvelle-Écosse), à titre de baronnie, et y construit son château. Cette baronnie est demeurée un bien familial jusqu’à la dispersion des Acadiens, en 1755. Les descendants qui portent ce nom d’Entremont sont encore nombreux.
Noms et lieux du Québec, ouvrage de la Commission de toponymie paru en 1994 et 1996 sous la forme d’un dictionnaire illustré imprimé, et sous celle d’un cédérom réalisé par la société Micro-Intel, en 1997, à partir de ce dictionnaire.
(Source : La France et le Québec. Des noms de lieux en partage. Commission de toponymie du Québec, les Publications du Québec, l’Association française pour l’information géographique, 1999).
Première édition du jeu, avec le portrait de Magie. | Auteur inconnu via Wikimedia Commons
En 1903, l'intrépide Lizzie brevetait un jeu anticapitaliste à but éducatif. Trente ans plus tard, Parker sortait le «Monopoly» de Charles Darrow et tentait de la museler.
par Elodie Palasse-Leroux 17 mars 2024
Dans la boîte du Monopoly, on a longtemps pu lire la formidable histoire de l'invention du jeu. En pleine Dépression, un certain Charles Darrow, sans emploi et désespéré, inventait sur un coin de table un jeu qu'il vendait en 1933 à Parker Brothers, renversant la situation. Le véritable American Dream… Bien entendu, on sait désormais que le jeu en question avait été imaginé par une femme, trente ans plus tôt. Et quelle femme!
Elizabeth Magie est née dans l'Illinois en 1866, l'année où le Congrès américain approuve le Civil Rights Act, premier pas vers la reconnaissance des droits des Afro-Américains.
Pour son père James, fervent abolitionniste et défenseur des droits des femmes, c'est un moment clé. Proche d'Abraham Lincoln, James Magie est l'un des premiers Américains à adhérer au Parti républicain. Il diffuse ses idées à travers le journal dont il est propriétaire à Macomb et transmet à sa fille ses valeurs antimonopolistes. C'est un adepte des théories de l'économiste Henry George.
Ce dernier, auteur de Progrès et pauvreté (1879), estimait que la valeur d'un terrain ne devait pas être déterminée par ce qui est construit dessus, mais par son emplacement. Il prônait le paiement d'un impôt unique calculé sur le sol et la suppression de la rente foncière des propriétaires terriens, afin de niveler les inégalités. Elizabeth grandit avec l'idée que les individus devraient être les seuls possesseurs des biens qu'ils ont créés.
La jeune fille est encouragée par son père à vivre librement. Elle étudie la théorie de l'économie et puis devient sténographe, comédienne de stand-up et de théâtre, inventrice d'un brevet pour les machines à écrire, puis journaliste à Washington… Elle n'a clairement aucune envie de jouer les femmes au foyer.
Elle se rend cependant compte qu'elle peine à subvenir à ses propres besoins avec le maigre revenu de 10 dollars hebdomadaires que son activité lui rapporte. Pour attirer l'attention sur la précarité des femmes célibataires, elle achète un encart publicitaire dans un journal et se présente comme «jeune femme esclave américaine […] pas belle, mais très attirante» disponible au plus offrant.
Les femmes n'utilisent pas leur cerveau autant que les hommes
Le coup d'éclat fait la une des journaux. Elizabeth explique avoir voulu dénoncer la situation lamentable des femmes: «Nous ne sommes pas des machines, les filles ont un esprit, des désirs, des espoirs et de l'ambition.» À la même époque, la future journaliste Nellie Bly fait publier dans la même optique une lettre pleine de sarcasme: «Qu'allons-nous faire de ces filles, celles dépourvues de talent, de beauté, de fortune?» Contrairement à Bly, qui fera le tour du monde en soixante-douze jours, Elizabeth décide de propager ses convictions politiques par le biais d'un jeu de société de sa création.
En 1903, Elizabeth «Lizzie» Magie dépose le brevet du Landlord's Game. Ce «jeu du propriétaire foncier» tente de démontrer le danger du monopole (à l'époque représenté par des figures comme Andrew Carnegie et John D. Rockefeller). On n'enseigne pas l'économie à l'école: à travers ce jeu, Lizzie espère faire comprendre aux enfants comme à leurs parents qu'il est possible de s'opposer à ce système qui enrichit les propriétaires tout en appauvrissant les locataires.
Avec les lecteurs du magazine The Single Tax Review, elle partage le concept du jeu en 1902 (un an avant de faire protéger son idée, dix ans avant qu'un autre journal apprenne à ses lecteurs que les femmes «n'utilisent pas leur cerveau autant que les hommes»). Il est titré: «Une intéressante invention d'une jeune femme à Washington par lequel les enfants en jouant peuvent apprendre les véritables lois de l'économie».
Interrogée, Elizabeth déclare que le Landlord's Game «est une démonstration pratique du système actuel d'accaparement des terres avec tous ses résultats et conséquences habituels», qui aurait pu s'appeler le «Jeu de la vie», car «il contient tous les éléments de réussite et d'échec dans le monde réel, et le but est le même que celui que semble avoir la race humaine en général, c'est-à-dire: l'accumulation de richesses».
Mais Elizabeth Magie y confesse aussi être pleine d'espoir: «Laissez les enfants voir clairement l'injustice flagrante de notre système foncier actuel et quand ils grandiront, s'ils sont autorisés à se développer naturellement, le mal sera bientôt réparé.»
Plateau du jeu en 1906. | Thomas Forsyth via Wikimedia Commons
Le jeu devient populaire auprès des intellectuels de gauche. Il est adopté par les étudiants de la Wharton School of Finance and Economy, d'Harvard et de Columbia. Il circule jusqu'à Atlantic City, où une importante communauté de Quakers le personnalise. Chacun réalise sa propre version du jeu en y ajoutant sa touche personnelle. C'est ainsi que Charles Darrow découvre le Landlord's Game chez des amis. Il a tôt fait de se concentrer sur l'approche monopoliste et de la vendre à Parker Brothers.
La suite est connue: Parker Brothers achète à Lizzie Magie-Phillips (elle s'est finalement mariée, à l'âge de 44 ans, en 1910), peu après avoir conclu son accord avec Darrow, le brevet du Landlord's Game et deux autres de ses jeux, Bargain's Day et King's Men, dans le but de garder la mainmise sur les différentes versions.
Le Monopoly devient l'un des jeux les plus plébiscités au monde. Darrow emporte largement la partie sur Magie, qui meurt sans descendance en 1948.
Il faut attendre 1973 pour que les faits soient reconstitués par Ralph Anspach, professeur d'économie. Créateur d'un jeu antimonopole que Parker Brothers veut faire interdire, il découvre les brevets du Landlord's Game et remonte la piste. Anspach dépose à son tour plainte contre Parker et dévoile «le mensonge du Monopoly». La justice lui donne raison.
Le film de Jean-Pierre Cottet, Georges Pompidou, la cruauté du pouvoir, passé mercredi dernier sur France 3 aura sans doute été pour beaucoup une découverte, celle d’un homme d’Etat français, mort il y a cinquante ans au milieu de son mandat présidentiel, et dont la mémoire se trouve quelque peu obscurcie par l’ombre portée du général de Gaulle, auquel il a succédé. Le héros avait fait place à un anti-héros : Sancho Panza après Don Quichotte. Le documentaire, étoffé par la connaissance d’Éric Roussel, par ailleurs biographe de Pompidou, a remis les mémoires en place, corrigé les caricatures et marqué l’importance d’une personnalité somme toute exceptionnelle.
Un aspect de cette histoire m’a paru insuffisamment mis en lumière : la pensée du Premier ministre Pompidou dans les journées de Mai 68. Les réalisateurs ont bien montré le rôle politique joué par lui dans ces semaines brûlantes ; comment, par ses décisions, la souplesse de son esprit, son intelligence de renard, contrastant à ce moment-là avec la grogne du lion élyséen dépassé par les événements, a su calmer le jeu, mettre un terme au grand chambard, notamment en préconisant au président de la République la dissolution de l’Assemblée suivie d’élections générales. Pompidou, le sauveur, avait signé par ce rôle même sa rupture avec l’officiel sauveur suprême. Tout cela est bien vu, au moyen d’images souvent saisissantes.
Cependant, quelque chose manque dans ce récit : l’analyse même de l’événement par ce Premier ministre qui affrontait la tempête. Dès le 14 mai, il livrait sa pensée devant l’Assemblée nationale en dépassant l’événementiel auquel il était confronté pour tenter de comprendre en profondeur ce qui se passait. Ce discours qu’il a retranscrit en partie dans son ouvrage posthume, Le Nœud gordien, met en lumière la lucidité d’un philosophe politique dont le propos dépasse de loin les habituels échanges de l’hémicycle.
Pour lui, les convulsions de Mai 68 avaient une apparence : les masques de la révolution marxiste, Marx, Engels, Lénine, Mao, alignés dans la cour de la Sorbonne ; elles avaient leur théâtre : les palabres de l’Odéon ; elles avaient leur chorégraphie, les grandes manifs ; mais derrière tout cela, on devait comprendre la signification de la crise, qui était plus qu’une crise politique, plus qu’une crise sociale, une crise de civilisation.
La société moderne, disait-il, est devenue « matérialiste et sans âme ». Le déclin inexorable de deux grandes religions, la religion divine et la religion séculière, la religion chrétienne et la religion révolutionnaire, cette double espérance qui donnait un sens à la vie de ceux qui croyaient au Ciel et de ceux qui n’y croyaient pas était en train de se décomposer. La société de consommation (l’expression était devenue courante depuis quelques années) était offerte comme substitut. Mais le « toujours plus » de choses ne pouvait combler la perte de sens dont souffrait l’âme publique.
« Redonner le goût d’un idéal au-delà de l’intérêt national ou personnel »
L’intuition de Pompidou a été sans doute négligée par ses auditeurs, hantés par les désordres de la rue, la grève générale, la menace pesant sur leur destinée politique personnelle. La prémonition de l’Auvergnat n’a cessé de se confirmer. Dépourvus d’idéal collectif, les modernes se sont engouffrés dans l’« ère du vide » et un individualisme exacerbé : « Jamais la notion de’’chacun pour soi’’ n’a été plus fortement enracinée dans les esprits. »
1968 ? « À qui y réfléchit, il apparaît qu’il s’est produit une sorte d’ébranlement intérieur ». Les barricades et la grève générale n’étaient que l’expression d’un mal que seules certaines affiches de Mai avaient perçu, le fameux « métro, boulot, dodo », une existence d’individus robotisés auxquels l’État devait servir « le pain et les jeux », le salaire minimum et la télévision. Julien Gracq a eu cette formule, qu’il n’y avait pas de société possible « sans point de fuite », et c’était justement ce que l’homme occidental, après la mort de Dieu et la fin des lendemains qui chantent, était en train de perdre.
Dans la conclusion de son livre, Pompidou écrivait : « Il reste à redonner le goût d’un idéal au-delà de l’intérêt national ou personnel. Ici, l’État peut jouer son rôle, mais c’est avant tout à ceux qui prétendent à une magistrature morale qu’il appartient d’agir : instituteurs, professeurs, écrivains, journalistes doivent retrouver le sens de leur métier et de leurs responsabilités… »
On n’est pas sûr aujourd’hui que ce vœu ait été exaucé.
À force de vouloir tout remplacer par la machine, nous risquons de nous perdre nous-mêmes.
Que restera-t-il de nous si nous nous soumettons à la machine?
par Laurent Sagalovitsch - 1er avril 2024
À un moment donné, il va quand même falloir se demander où collectivement nous désirons aller. J'entends qu'il apparaît de manière de plus en plus transparente que plus nous avançons dans le temps, et plus la technique tend à nous imposer un nouvel ordre, celui de l'extrême rapidité, de l'efficacité tous azimuts, où sous couvert d'une promesse de progrès, notre sort dépendra de plus en plus de la machine et de ses performances.
Plus nous laissons la machine dans toutes ses déclinaisons possibles envahir notre quotidien, et plus nous nous éloignons de nous-mêmes. Qui a envie de vivre dans un monde où toute tâche sera déléguée à une machine sans que nous ayons notre mot à dire? Qui voudra vivre dans un monde désincarné, tributaire de toute une série d'algorithmes qui, mis bout à bout, décideront de la manière dont il faut nous comporter dans l'existence?
Nous sommes précisément des êtres humains, pas des machines. Nous avons une âme, un cœur; nous sommes traversés de tourments qui sont la racine même de notre condition, cette étrangeté à habiter un monde dont nous ne savons à peu près rien, si ce n'est qu'il cessera d'exister le jour où la mort nous en arrachera.
Désespérément, nous recherchons des réponses qui jamais ne viennent. Mais si précisément nous cessons d'être des individus pensants pour s'aliéner corps et âme à la machine, à la technique, que restera-t-il de nous au juste? Ce n'est pas que la machine nous aura remplacés, c'est qu'elle aura transformé l'individu en une sorte de caisse enregistreuse dont le seul souci dans l'existence sera de se divertir, d'abandonner la métaphysique pour la seule satisfaction de ses besoins matériels.
Tous autant que nous sommes, nous sommes chétifs, perdus à nous-mêmes, en prise avec un monde qui depuis l'aube de la création nous dépasse, nous écrase, condition qui fait évidemment notre grandeur et notre courage. L'homme n'est grand que parce qu'il ne cesse de chercher des réponses, de s'interroger sur ses origines mêmes, de tenter de trouver un compromis entre son angoisse existentielle et la nécessité faite de vivre malgré tout sa vie. Par la robotisation de la pensée, enlevez-lui ses capacités réflexives, et il finira par devenir une coquille vide, l'image même du néant.
Si d'un coup d'un seul, la pensée disparaît au profit de la machine, si l'écrit s'efface, remplacé par des traitements de texte, si l'intelligence s'intéresse seulement à rendre ce monde encore plus productif, si nous détricotons étape après étape ce qui constitue le fondement de nos âmes, que nous restera-t-il à nous autres, si ce n'est d'assister, impuissants et résignés, à notre propre disparition?
Voyez comment l'intelligence artificielle s'impose à nous. Nous n'en sommes qu'à ses balbutiements et déjà nous sentons combien en de nombreux domaines, elle sera notre tombeau. Partout, elle envahit notre quotidien, nous forçant à l'utiliser quand bien même nous rechignons à le faire. Elle ne nous laisse d'autres choix que de se plier à ses diktats.
Elle nous emprisonne dans tout un système de croyances qui voudrait nous convaincre qu'elle sera notre salut alors que par bien des aspects, elle contribue à propager une uniformité de la pensée, une paresse de l'esprit si universellement répandue que bientôt, nous ne serons même plus en mesure de réaliser à quel point elle nous aura rendu imbéciles à nous-mêmes.
L'intelligence artificielle, c'est le principe de la télévision, l'avachissement de l'homme, multiplié à la puissance dix mille. Si nous laissons la machine nous supplanter dans tout ce qui relève de la créativité, si nous abandonnons peu à peu le domaine de l'intellect à la seule volonté de la technique, alors nous perdons ce qui fait notre essence même, notre besoin de nous confronter, de nous questionner, de sans relâche, interroger notre condition d'êtres pensants.
Si nous faisons le deuil de la culture, c'est-à-dire de notre capacité à nous remettre en cause, alors nous cessons d'être au monde. Nous n'aurons même pas la grâce de l'animal pour nous sauver, non, nous deviendrons des estomacs qui goberont des milliards d'informations sans jamais être en capacité de les questionner. Dans cette béatitude de la bêtise qui peu à peu consacrera notre avilissement, nous deviendrons les champions de notre propre défaite.
Il est évidemment déjà trop tard. On ne peut pas, on ne sait pas arrêter la marche du monde. Il nous faut la subir, la plupart du temps, malgré nous. Non, la seule chose que nous pouvons faire, c'est de ralentir sa progression, de collectivement nous ressaisir pour résister à sa volonté de nous écraser. De cesser de nous comporter comme des moutons pour tâcher de lui tenir tête, quand bien même nous saurons notre défaite inéluctable.
Lisez, instruisez-vous, manifestez votre besoin de musique et de poésie, étonnez-vous, questionnez-vous, remettez-vous en cause, montrez-vous à la hauteur de votre condition de mortel, soyez fiers de vos tourments, chérissez vos peurs, n'ayez pas honte de vos fragilités, elles sont la condition de votre salut.
Ce sera notre chant du cygne.
Notre symphonie des adieux.
Kat préfère organiser le plan de ses sites sans h1 sur le titre du site,
mais utilise la boîte titre dans le header, pour avoir un titre de site en texte et lui affecter une balise Title.
Pour obtenir une hiérarchie de ses sites logique en fonction de ce pré-requis, elle forke donc le CMS à chaque mise-à-jour ou nouvelle installation.
Voilà l'histoire de cette grande aventure.
Du moment que ça lui fait plaisir, on peut bien la laisser s'amuser, non ? Elle démontre ainsi la souplesse du code d'adHoc qui autorise toutes les fantaisies.
Les modifications
Impérativement dans cet ordre
modules/_core/mod_head_title.inc : supprimer les h1
pages/index.php : passer les h3 en h2, puis les h4 en h3, impérativement dans cet ordre
admin/_core/configskin.inc : passer les h3 en h2
include/hpage.inc : éventuellement passer les h2 en h1
modules/pages/inc/pages_menu.inc : pour tous les .catitem ou les .rubr : changer le p en h2
À l’occasion de la Semaine de la langue française, nous nous interrogeons sur la manière dont évolue la langue et comment les nouveaux mots trouvent leur chemin vers le dictionnaire.Le français est « une langue vivante, on a beaucoup de mots qui apparaissent, parfois qui disparaissent », explique Géraldine Moinard, lexicographe et directrice de rédaction des éditions Le Robert. Entretien.
RFI : En quoi consiste le travail d’un lexicographe ?
Géraldine Moinard : Le travail d'un lexicographe est de concevoir, de rédiger et surtout de mettre à jour les dictionnaires. Mettre à jour un dictionnaire, c'est à la fois faire entrer des nouveaux mots, puisque la langue française est une langue vivante, donc on a beaucoup de mots qui apparaissent, parfois qui disparaissent. Beaucoup de mots apparaissent et restent dans la langue et on a besoin de les comprendre. Notre travail est de repérer ces mots et d'ajouter les plus représentatifs et les plus pérennes dans le dictionnaire pour décrire leur sens évidemment, mais aussi leur orthographe et leur prononciation. Ensuite, on explique comment ils sont employés et on donne leurs synonymes. On pense à ces mots nouveaux, mais il y a aussi tous les mots qui existent déjà dans le dictionnaire, qui ont déjà des articles et qu'il va falloir actualiser, parce qu'on a aussi des mots qui existent déjà, qui vont prendre de nouveaux sens. Par exemple, « hybride ». On va pouvoir le définir plutôt comme un moteur, mais aussi dans le sens plus varié qui va s’appliquer aussi dans le domaine du travail et aux réunions depuis la Covid. Des nouvelles expressions apparaissent aussi comme « être en PLS », qui a intégré le dictionnaire l'année dernière. « PLS », c'était une position latérale de sécurité dans le domaine médical. Et puis, d'un coup, les jeunes vont employer cette expression pour désigner : être en PLS, en gros, je suis au bout de ma vie ! Il y a aussi des choses qui existent et qu'il va falloir mettre à jour. C'est un travail un peu invisible, mais très important.
Comment choisissez-vous les mots qui entrent dans le dictionnaire ?
Nous avons trois critères principaux qui sont la fréquence, la diffusion et la pérennité. Pour la fréquence, il faut que le mot apparaisse, qu’il soit suffisamment utilisé, pas seulement par deux ou trois personnes, puis le voir apparaître beaucoup. En ce qui concerne la diffusion, on voit le mot apparaître dans différentes sources, pas uniquement dans le vocabulaire purement scientifique. Par exemple, le mot « microplastique ». C’est un mot qui apparaît en 2004. On découvre qu’il désigne un petit volume de plastique, des micro-morceaux de plastique qui vont pouvoir se retrouver ensuite chez les poissons ou chez les hommes. Au début de la recherche, le terme reste cantonné au domaine scientifique avec une fréquence basse de diffusion. Puis, au fur et à mesure des avancées de la recherche, on va en parler dans la presse, donc cela va être diffusé. Les gens vont entendre parler de « microplastique », on va le trouver dans la presse scientifique, mais aussi dans la presse plus générale de vulgarisation. Là, tout le monde va avoir besoin de comprendre ce mot-là et on voit qu'il reste dans l’usage. Cela prend quelques années et ce n'est pas un mot qui va disparaître, parce que c’est la réalité et le problème existe. Donc, nous remplissons aussi le troisième critère qui est la pérennité. On constate que « microplastique » répond à trois critères : fréquence, on en entend souvent parler et pas seulement dans la presse scientifique très spécialisée, et finalement la pérennité, le mot est bien installé et il va durer.
Comment les réseaux sociaux jouent dans la création des nouveaux mots qui vont entrer dans le dictionnaire ?
Je ne suis pas sûre que les réseaux sociaux jouent tellement dans la création, parce qu'on a toujours créé beaucoup de mots. La langue française est très vivante depuis toujours et les mots il y en a. Il y en a beaucoup qui se créent. En revanche, je pense que ça joue un rôle très important dans la diffusion par les réseaux, par le fait qu'on se parle beaucoup, que l'information circule extrêmement vite par les réseaux. Donc, le mot qui se crée, s’il fonctionne bien et s’il s’avère utile, il va pouvoir être repris très vite. Mais avant les réseaux sociaux, on avait la diffusion qui se faisait principalement par les médias plus traditionnels : la presse, la télévision, la radio. Aujourd'hui, c'est le quatrième canal qui permet une diffusion très rapide.
De nombreux anglicismes sont utilisés dans le langage courant depuis des années. Comment expliquez-vous l’influence de l’anglais et d’autres langues sur le français ?
Oui, depuis de nombreuses années ! On voyait des anglicismes déjà dans la littérature du milieu du XXe siècle. Il y a toujours eu des anglicismes, ce n’étaient pas les mêmes. On disait un drink pour un verre ou un attaché-case pour désigner une petite valise. Il y a toujours eu des anglicismes, mais ils n'ont pas une durée de vie très importante. Les anglicismes du XXe siècle, nous en avons plein dans nos dictionnaires et qui sont aujourd'hui uniquement dans Le Grand Robert, parce qu'on ne les emploie plus tellement. Donc, ce n'est pas nouveau ce phénomène de l'emprunt. C'est un phénomène qui a lieu dans toutes les langues. On emprunte plus à l'anglais qu'à d'autres langues du fait de la place de l'anglais dans le monde. C’est une langue qui est très présente dans les médias, très présente à la fois sur des concepts scientifiques souvent écrits en anglais ou dans les séries américaines qui ont beaucoup de place. Alors, évidemment, il y a beaucoup d'anglicismes, mais ils ne sont pas toujours très pérennes. On fait entrer effectivement tous les ans dans Le Petit Robert quelques anglicismes tout simplement parce qu'ils finissent par s'implanter dans la langue française et qu'il n’y a pas forcément d'autres mots pour désigner la réalité en question. On l'a vu avec le mot crush, par exemple, pour désigner un petit coup de cœur, un béguin. Aujourd'hui, les jeunes emploient énormément ce mot. C'est vrai aussi pour les mots scientifiques. En général, comme ils viennent de l'anglais, mais qui parfois sont traduits, comme le mot metavers en anglais qui va être traduit par « métavers ». Il y a aussi des anglicismes dans le domaine des séries comme spoiler et c'est un peu incontournable. Même s'il y a des propositions comme divulgâcher, c'est spoiler qui est majoritairement employé. Donc à un moment, on va avoir besoin de le comprendre et de le mettre dans le dictionnaire.
Mais il n’y a pas que des anglicismes. Nous remarquons des mots dans le domaine de la gastronomie qui viennent un peu du monde entier. Des spécialités qui vont se développer, comme le poke bowl, par exemple, qui vient de l'hawaïen et la cuisine libanaise, par exemple, avec le taboulé. Et puis, il y a aussi des mots qui viennent d'Afrique, qui vont se diffuser un peu plus par la chanson et par les échanges culturels. Je pense par exemple à la go, mot qui désigne une petite amie qui est entré dans Le Petit Robert il y a deux ans. C'est un mot venu de Côte d'Ivoire et qui a fini par être employé aussi en France et dans les pays de la francophonie en Europe. Donc, au bout d'un moment, il rentre aussi dans le dictionnaire.
Quelle est l’influence de l’Afrique dans l’évolution de la langue française ?
Il y a beaucoup de mots qui restent employés presque essentiellement en Afrique. C’est tellement vaste et on est tellement loin, mais il y a quand même des échanges. Je pense aux exemples comme « ambiancer » ou « brouteur », qui sont entrés dans Le Petit Robert. Nous avons tous les ans au moins un mot qui est né en Afrique.
Combien de nouveaux mots entrent par an dans le dictionnaire ?
Il y a entre 100 et 150 nouveaux mots ou expressions nouvelles chaque année. Il y a aussi des sens, comme le mot « hybride » qui va prendre un sens différent de celui qui existait déjà ou encore le mot « cryptomonnaie » qui évolue.
Comment évolue la langue française ?
Il y a énormément de mots qui apparaissent. À partir du moment où la langue est toujours capable de créer de nouveaux mots, elle évolue. Ce ne sont pas uniquement des entrées de l'anglais, on peut voir aussi les mots se créer avec des préfixes, même sur des préfixes grecs. Je parlais de « microplastique » ou de la « réparabilité » : les mots qu'on arrive à former en français, qui prennent et qui diffusent. Donc, la langue est capable de s'adapter à la société actuelle. Cela étant, on peut toujours entendre des discours des gens qui disent que les jeunes ne savent plus parler. Mais c’est un discours qu’on a toujours entendu. Il y a déjà des ouvrages sur le sujet au début du XXe siècle. Je crois que, dans le fond, il faut faire attention, il faut continuer à entretenir son langage, à consulter les dictionnaires.
Vous avez mis à disposition des internautes un outil gratuit, Le Petit Robert en ligne.
Dans ce dictionnaire en ligne, nous avons toute la référence du Robert, un dictionnaire qui est déjà assez complet, certes pas tout à fait aussi complexe que Le Petit Robert ou Le Grand Robert qu'on va pouvoir trouver sur abonnement. Mais, le dictionnaire en ligne est quand même riche, gratuit, accessible à tous dans le monde entier à condition d’avoir une connexion internet. Ce n’est pas toujours évident d’avoir accès à un dictionnaire imprimé ou de l’avoir sur soi. Quel que soit l'endroit, avec cet outil, on a accès à une source de référence. Entre autres, on peut consulter le sens des mots, la définition, on peut écouter la prononciation, trouver des synonymes, évidemment l'orthographe, des combinaisons de mots, c'est-à-dire quels mots s'emploient fréquemment avec ce mot, des conjugaisons, de la grammaire, etc. Il y a aussi tout un tas d'articles de fond autour de la langue française qui décodent certains mots et présentent la langue de manière vivante et sympathique. Et puis des exercices pour s'entraîner, pour jouer avec la langue. C’est un outil formidable pour enrichir son vocabulaire.
Quarante, cinquante, soixante et puis… soixante-dix ! D’où vient cette curieuse façon de compter en France ? Ce quotidien allemand répond à la question d’un jeune lecteur de 8 ans surpris par cette particularité hexagonale.
Merci et merci pour ta curiosité, cher Philipp. En effet, pourquoi le nombre 70 se dit-il soixante-dix, c’est-à-dire 60 + 10, en français ? Et pourquoi 80, c’est 4 x 20, quatre-vingts en français, et pourquoi 90 se dit quatre-vingt-dix*, c’est-à-dire (4 x 20) + 10 ? Allez, spoiler : c’est à cause de la base 20, qu’on appelle le système vigésimal… Mais commençons par le commencement.
Le français est une langue latine très ancienne – il vient du latin de l’Antiquité. Cependant, le système de numérotation français mélange deux façons de compter : le système décimal des Romains, que nous utilisons aussi dans tous les pays germanophones et qui est le plus utilisé dans le monde. Ce mot contient le mot latin decem qui signifie “dix”.
Certains voient dans ce système un rapport avec les cinq doigts de nos deux mains. Ce qui veut dire qu’on compte en s’aidant de ses doigts. Le scientifique allemand Harald Haarmann a découvert qu’il existait dans le monde de petits groupes linguistiques chez lesquels le chiffre 5 se dit “main” et le chiffre 10 “deux mains”. Mais revenons aux nombres français.
Ils reposent sur le système décimal et le système vigésimal. Qui a bien pu inventer ce mélange ? Est-ce Panoramix qui a concocté cette mixture délirante dans son chaudron ?
Non, les parents celtes d’Astérix, que les Romains appelaient “Gaulois”, vivaient vers 50 avant Jésus-Christ. Selon l’historien des mathématiques Karl Menninger, ce sont d’abord les Normands – qui vivaient bien plus tard, au Moyen-Âge, mais à partir de 911 après Jésus-Christ, dans la région qui s’appelle aujourd’hui la Normandie – qui ont adopté la nouvelle façon de compter. Le système vigésimal (du mot latin vicesimus, “vingtième”) repose sur le nombre 20 : on compte par tranche de 20. On suppose qu’à l’époque les gens utilisaient leurs doigts et leurs orteils pour compter ou qu’ils retournaient leurs mains après la première dizaine.
Nous n’avons pas encore parlé de Claude Favre de Vaugelas ni de Gilles Ménage, cher Philipp. Ce sont ces deux chercheurs qui ont fait en sorte qu’on emploie le système décimal jusqu’à 60 au XVIIe siècle, mais le système vigésimal est resté pour 70, 80 et 90. En Belgique et en Suisse francophone, on dit en général “septante”, “huitante” et “nonante” !
C'est très simple: ils ne le savaient pas, car les frontières n'existaient pas encore.
Jusqu'à l'année 1500, les frontières n'existaient pas, ni l'idée de frontières. Le concept moderne de la frontière a été créé pendant le traité de Tordesillas entre l'Espagne et le Portugal qui a défini scientifiquement les zones d'influence entre ces deux pouvoirs. Avant cela, cette idée n'avait jamais existé. Pourtant, il y avait des «limes». Le mot vient du latin et signifiait «bord».
Prenons l'une des cartes que l'on voit dans les livres d'histoire, avec toutes les belles couleurs, et des royaumes et empires soigneusement dessinés. Ce sont des mystifications. Vous les regardez avec votre cerveau du XXIe siècle et vous pensez: «La Hongrie s'arrête ici, voici la Pologne.» Non, cela ne fonctionnait pas comme cela. Il y avait des limes, des zones (qui pouvaient être plus larges ou plus étroites) de no man's land, où l'autorité des deux royaumes avait disparu et où ils se mêlaient l'un et l'autre. Sur parfois des centaines de kilomètres, personne n'avait le pouvoir.
Généralement, ce limes coïncidait avec des frontières physiques: une mer, un fleuve majeur, une chaîne de montagnes, un désert, une zone si infertile que l'on ne pouvait pas l'utiliser pour l'agriculture. Parfois, il s'agissait juste d'une zone sur laquelle deux États se faisaient la guerre. Pendant le Xe siècle, l'Empire byzantin s'est divisé entre différents empires à cause d'une guerre civile (il sera bientôt réuni), et il faisait aussi la guerre avec la Bulgarie concernant le contrôle des territoires sains et fertiles qui constituaient le limes et que voulaient les deux États.
Là où la population était plus dense, le limes était plus étroit. Le limes se déplaçait aussi en fonction des alliances et des petites guerres. La ville de Canossa, en Italie, était officiellement dans le Grand-duché de Toscane, mais si un seigneur de Canossa (à l'époque une forteresse majeure) venait à changer de côté et former une nouvelle alliance avec le royaume de Lombardie, le limes entier était par conséquent modifié. Le limes était un concept bien plus liquide qu'une frontière.
Alors, comment un Romain savait-il s'il se trouvait toujours à l'intérieur de l'Empire? Il ne le savait pas, tout simplement. L'Empire lui-même n'était pas ce que montre la carte. Si vous regardez une carte moderne du Brésil par exemple, vous saurez que la zone entière qui se trouve dans la frontière s'agit du Brésil, et c'est aussi simple que cela. Mais ce n'était pas si facile pendant l'Antiquité.
L'Empire romain habituellement représenté était en fait un territoire composite constitué du Pomerium, qui appartenait en quelque sorte officiellement aux villes et aux colonies de Rome, dont les habitants (y compris les paysans qui vivaient à la campagne) étaient des citoyens romains, ainsi que des territoires qui étaient influencés par Rome en conservant leur propre structure du pouvoir local (comme c'était le cas pour la Palestine par exemple). Même au sein du limes, on ne savait pas si on se trouvait dans les domaines romains, ou dans une zone sur laquelle Rome avait une forte influence.
Une fois que l'on s'approche du limes, tout ce que l'on savait, c'est que l'on se trouvait sur le limes: la protection romaine n'était donc pas garantie. En revanche, le limes était souvent si négligeable que personne n'y allait, sauf quelques bergers, ou des commerçants allant vendre des marchandises romaines aux bandits et aux «tribus» (qui n'en étaient pas vraiment, mais tenons-nous en au mythe pour l'instant).
Après l’explosion de la poudrière de Lagoubran en mars 1899, un mausolée avait été érigé à Toulon en mémoire des 65 victimes. Celui-ci est désormais introuvable.
Mathieu Dalaine Publié le 07/03/2024
Le mausolée en mémoire des victimes de l’explosion de Lagoubran a disparu du cimetière central de Toulon, où il avait été implanté en 1911. Passionné d’histoire, Michel Augier cherche sa trace. Photo Ma. D
Le fracas, l’effroi et un immense panache de fumée noire qui s’élève, à l’ouest de Toulon. Le 5 mars 1899, à 2h20 du matin, l’explosion d’une poudrière à canon de la pyrotechnie tue 65 civils et militaires. Le hameau de Lagoubran, à proximité immédiate de la base navale, est rayé de la carte. À l’origine de cette épouvantable catastrophe: l’instabilité de la poudre B.
Le traumatisme est gigantesque sur les bords de rade. Le ministre de la Marine évoque "un deuil national". Des souscriptions sont ouvertes dans toute la France pour venir en aide aux familles. Un crédit considérable est débloqué au niveau de l’État. Le conseil municipal, lui, décide d’ériger un mausolée. D’un coût de 3.760 francs, il est inauguré le 5 mars 1911 par le maire Joseph Gasquet. Devant la stèle et la longue liste des victimes, l’élu l’assure: "Nous garderons fidèlement votre souvenir…"
La photo du monument diffusée dans le Petit Var en 1911.
Voilà pour l’histoire. Une coupure de presse de l’époque précise que le monument funéraire est destiné à "perpétuer parmi les générations futures l’effrayant tribut que paya à la mort la population toulonnaise". La photo jaunie du Petit Var représente l’œuvre du sculpteur François Rossi: un mausolée en marbre blanc de Carrare enrichi d’ornements, dont le caveau renferme les ossements des malheureux, implanté au cœur du cimetière central de Toulon.
Sauf qu’on a beau arpenter aujourd’hui l’allée Célestin Senes, dit La Sinse, au milieu de magnifiques sépultures: rien. Aucune trace de la fameuse stèle de quatre mètres de haut. "Le monument n’existe plus à l’endroit où les descriptions le situaient", pose Michel Augier, un Toulonnais qui se passionne depuis des années pour l’objet. "Il a tout bonnement disparu."
À chaque énigme, ses hypothèses. La plus crédible d’entre elles nous ramène quatre-vingts ans en arrière, lors du bombardement allié du 4 février 1944. Les forteresses volantes américaines B-17 déversent ce jour-là un demi-millier de bombes de 250kg sur Toulon. Si l’arsenal est la cible, le cimetière des Lices est lui aussi touché (1).
"On voit encore les sépultures abîmées par des éclats ici. Ou recouvertes là d’une plaque de béton coulée à la hâte en guise de réparation, montre Michel Augier. On peut imaginer que le mémorial a été détruit à ce moment-là, même s’il n’y a pas de preuve."
Côté mairie, la question reste en suspens. La théorie d’une destruction venue du ciel est toutefois connue et validée par le service des cimetières – "de nombreuses concessions sur l’allée La Sinse et à proximité portent encore les stigmates des bombardements".
Les archives municipales situent même précisément l’endroit où se trouvait le mausolée: "Un caveau privé (concession Giraud) a été édifié en 1957 à sa place".
Existe-t-il encore, quelque part, des morceaux de la stèle endommagée? Mystère. Et un regret toujours vivace pour Michel Augier. "La plupart des victimes de la tragédie étaient des familles modestes. Elles habitaient à Lagoubran car le mari était employé à la pyrotechnie pour fabriquer des munitions, explique notre historien local. Ces classes laborieuses n’ont pas eu droit aux honneurs militaires. Et il n’y a plus rien pour faire vivre leur souvenir ou commémorer un drame qui a marqué Toulon."
Seule une toute petite plaque en bronze, à proximité immédiate de l’épicentre de l’explosion, sert de lieu de mémoire. À l’intérieur du port militaire, interdit aux recueillements et aux regards de la population...
1. Explosions à Toulon, par Albert Meuvret, aux éditions Les Presses du midi (2007).
Par Matthieu Balu
Le règlement sur les marchés numériques entre en application ce mercredi. Google, Facebook, Apple, Microsoft, Amazon, TikTok... et leurs utilisateurs sont concernés.
INTERNET - Google Maps ne s’affiche plus en tête des résultats Google ! Un bug ? Non, une révolution. Ce mercredi 6 mars, le Digital Markets Act (en français, règlement sur les marchés numériques) européen entre en application, et malgré son nom peu engageant, il vous concerne de près. Discuté depuis 2000, voté par le Parlement européen en 2022, ce texte a pris son temps, mais les résultats attendus sont à ce prix. Peut-être, grâce au DMA, l’internet des années 2010 pourra enfin faire sa mue… Et avec lui, un certain capitalisme, pas moins.
Le DMA, qu’est-ce que c’est ? Un coup porté aux écosystèmes fermés qui constituent, aujourd’hui, notre expérience en ligne. Autrement dit, « on veut ouvrir les grands de la “big tech” pour permettre à de plus petit d’arriver sur le marché », résume au HuffPost Alexandre de Streel, professeur de droit européen à l’université de Namur (Belgique). Et les moyens choisis ne font pas dans la dentelle. Voilà comment cela fonctionne.
Le DMA identifie des « Gatekeepers » (contrôleurs d’accès en français), c’est-à-dire des sociétés dont le pouvoir est vu comme quasi monopolistique sur certains réseaux ou certains usages. Pensez à Google pour les moteurs de recherche, à Amazon pour l’e-commerce, à l’iOS d’Apple dans les iPhones... En tout, il y en a six pour l’instant : Alphabet (Google), Amazon, Apple, Meta (Facebook), Microsoft, et ByteDance, la maison mère de TikTok.
Ces contrôleurs d’accès sont soumis à une série, assez drastique, d’obligations nouvelles :
Interdiction de croiser les données personnelles des utilisateurs sans leur consentement (votre profil Facebook n’ira plus automatiquement nourrir vos préférences Instagram, par exemple).
Obligation, en cas de demande d’un utilisateur, de supprimer des données liées à son activité ou à son profil, ou de les transférer vers un autre service (d’un réseau social à un autre, par exemple).
Interdiction de forcer les sociétés passant par les plateformes des contrôleurs d’accès à utiliser des services payants créés aussi par les contrôleurs d’accès. Par exemple : Apple ne pourra plus obliger les applications présentes sur l’Appstore à forcément passer par les systèmes de paiement développés par Apple (la liste complète des changements concernant Apple peut se lire sur le site Frandroid).
Interdiction de mettre en avant des services déclinés par leur marque au détriment de services concurrents.
Et si les entreprises concernées ne jouent pas le jeu, dire que l’addition sera salée relève du doux euphémisme. « C’est la commission européenne qui exerce le pouvoir de sanction », décrypte pour le HuffPost Ariane Mole, avocate associée chez Bird&Bird, spécialisée en protection des données personnelles, « et les sanctions sont énormes ! ». Les amendes prévues en cas de manquements aux règles du DMA se montent ainsi à 10 % du chiffre d'affaires mondial des sociétés qui ne joueraient pas le jeu, « et 20 % en cas de récidive », ajoute l’avocate. Pour référence, le chiffre d’affaires de Google s’élevait en 2021 à 236 milliards d’euros... Alors chez les GAFAM en question, on est un peu nerveux.
Quitte à grincer des dents devant ce nouveau cadre européen, tous n’ont pas adopté la même stratégie. De guerre lasse, Microsoft, Google et Meta ont accepté leur désignation comme « contrôleur » et annoncé qu’ils travailleraient pour s’adapter à ce statut. ByteDance, le géant chinois propriétaire de TikTok, a tenté (en vain) de gagner du temps jusqu’à la dernière minute pour rester en dehors de ces obligations.
Mais le plus nerveux, ou le plus transparent dans sa fébrilité, c’est sans aucun doute Apple, le pape des systèmes fermés. Et il a beaucoup à dire contre la législation européenne, tellement que la firme a publié un étrange pamphlet de 32 pages à destination des développeurs utilisant ses services. Tout commence « bien », avec des pages entières faisant l’apologie de la protection des données version Apple… Avant d’exposer des e-mails envoyés par des utilisateurs inquiets à Tim Cook, le PDG de la société. La cause de leur angoisse ? Le DMA, bien sûr.
Et c’est bien parce qu’à travers le DMA, « on porte atteinte au modèle économique des entreprises », reconnaît Ariane Mole, notamment pour le ciblage publicitaire, au cœur de la machine. Mais cette bataille est désormais perdue : une fois identifié comme contrôleur, l’entreprise a six mois pour se mettre en conformité. C’est pourquoi, bon gré mal gré, les géants du net ont déjà beaucoup changé.
C’est ainsi que rechercher un hôtel ou un vol sur Google ne vous renvoie plus en premier vers les services de Google, qu’il est désormais possible de désinstaller de nombreux programmes dans Windows (comme son IA Cortana ou l’application de la webcam), ou même que l’on peut payer pour Instagram.
En effet, depuis novembre, les Européens peuvent payer un abonnement mensuel pour leur réseau social préféré en échange de l’absence totale de publicité. Une mesure explicitement mise en place pour préparer le DMA. Et qui pourrait bien présager d’un changement de fond.
« L’Union Européenne a pris une posture historiquement agressive contre la “big tech” et globalement, c’est très bien » : le satisfecit ne vient pas de n’importe qui, mais d’un observateur avisé du net, du journaliste spécialisé Cory Doctorow. Interrogé par le HuffPost, ce critique rigoureux des GAFA qualifie l’évolution des services en ligne depuis une dizaine d’années du terme à succès d’ « enshittification » - en français, « merdification ».
C’est suivant ce principe bien nommé que Facebook, après avoir attiré des centaines de millions d’utilisateurs dans une plateforme simple à utiliser, s’est mis à collecter les données sans leur accord. Pour les vendre aux plus offrants dans un premier temps, puis pour enfermer les internautes dans une bulle où le contenu de qualité n’est plus du tout mis en avant.
Le journaliste américain voit dans le DMA une lutte frontale contre cette « merdification » par des entreprises qui, de par leur position et leur taille, empêchent l’émergence de nouveaux acteurs. « Les mêmes patrons qui ont créé de bons services à l’époque où ils avaient des contraintes, sont les mêmes patrons qui agissent d’une manière atroce quand ces contraintes leur sont enlevées », dénonce Cory Doctorow.
Le DMA permettrait donc de remettre de la contrainte sur des plateformes devenues trop à l’aise avec leur statut de géant incontournable. Avec un sacré paradoxe à la clef : avec ces règles, « on veut redonner plus de place au marché, on veut libéraliser la tech » , estime Alexandre de Streel. La concurrence s’appliquant à nouveau, la « merdification » va-t-elle s’arrêter ? Ce qui est certain, c’est que de nombreux pays, du Canada au Japon, en passant par la Corée du Sud et le Brésil, regarde l’expérience européenne avec intérêt.
Le Toulonnais Michel Augier revient sur l’attaque britannique dans le port militaire de Mers el-Kébir, en Algérie et qui causa la mort de 1 297 marins français.
Publié le 05/03/2024
Un monument national en souvenir des 1.297 victimes du drame de Mers el-Kebir doit prochainement être érigé en Bretagne. Photo DR
Deux après-midi (6 et 7 mars 2024 ?) sur la thématique de l’attaque de Mers el-Kébir (du 3 au 6 juillet 1940) sont organisés aujourd’hui et demain au Service historique de la Défense (SHD). À l’initiative de ce rendez-vous, hommage aux 1 297 victimes du drame: le Toulonnais Michel Augier.
"Mon objectif, n’est pas d’évoquer l’Algérie française, la vengeance ou la trahison des Anglais, mais de passer de la mémoire à l’histoire", explique-t-il. En substance, l’idée est ainsi de dépassionner l’événement; ce, en l’auscultant depuis plusieurs perspectives.
La première journée sera notamment consacrée à l’aspect géographique et stratégique du lieu, le port algérien de Mers el-Kébir, situé dans la rade d’Oran. La seconde s’intéressera davantage à l’attaque, mais aussi à la manière de faire vivre le souvenir de cet événement tragique.
Parmi les intervenants, on retrouve Michel Colas, un ingénieur des travaux maritimes. Sera aussi présent Jean-Aristide Brument, président de l’association des Anciens marins et familles de victimes de Mers el-Kébir, structure qui porte un ambitieux projet de mémorial en Bretagne.
Rappelons que l’attaque de Mers el-Kébir a été menée par la Royal Navy contre une escadre de la Marine nationale, une semaine avant la remise des pleins pouvoirs à Philippe Pétain. La France et le Royaume-Uni n’étant pas en guerre au moment des faits, cela a marqué une rupture entre les deux pays.
La crise sanitaire du Covid-19 a fait ressortir certaines carences profondes au sein de la société française, mettant particulièrement en avant deux enjeux critiques : les défaillances de notre système de santé et l’exclusion numérique touchant une partie de la population. L’essor sans précédent du télétravail, de l’éducation en ligne et des procédures administratives dématérialisées a mis en évidence l’incapacité de nombreux individus à s’équiper ou à maîtriser les outils numériques nécessaires.
Ce déficit de compétences et d’accès numériques a engendré des disparités dans l’utilisation de services éducatifs, professionnels et essentiels. Certaines familles, en particulier celles issues de milieux défavorisés, ont rencontré des difficultés significatives pour accéder aux ressources éducatives et juridiques en ligne, mettant en lumière l’impératif d’adopter une politique nationale visant à assurer l’inclusion numérique universelle et à pallier cette vulnérabilité spécifique. Cette forme de précarité est connue sous le nom d’illectronisme.
Ce concept trouve ses racines dans une notion plus ancienne, celle de fracture numérique. Née au début des années 1990, elle se concentrait initialement sur la disparité d’accès aux technologies, soulignant une fragmentation principalement basée sur des critères matériels et géographiques. Toutefois, avec le temps, cette notion s’est enrichie pour englober non seulement l’accès aux outils numériques, mais aussi la capacité à les utiliser efficacement : prendre en main le clavier et la souris, naviguer sur Internet, etc. Cette dimension est devenue centrale dans la compréhension de l’illectronisme.
Aujourd’hui, l’illectronisme englobe un ensemble complexe de difficultés et de carences dans le domaine numérique. Il concerne les situations où les individus font face à des obstacles, non seulement dans l’utilisation des technologies, mais aussi dans leur compréhension de l’architecture globale du système. Cela inclut des défis liés à la manipulation d’interfaces numériques, comme la maîtrise du bureau ou du navigateur.
Au-delà des compétences techniques, ce concept révèle également un manque d’acculturation au référentiel numérique. Cela se traduit par une méconnaissance et une incompréhension des symboles, des codes et des éléments de langage – comme l’icône wifi, le symbole hashtags ou les émoticônes – qui constituent le tissu de la culture numérique. Cette dimension est tout aussi importante, car elle influence la manière dont les individus perçoivent et interagissent avec le monde numérique.
Cependant, définir l’illectronisme dans sa globalité est complexe. Au vu de la grande diversité des compétences numériques et des inégalités en œuvre dans les usages, cette notion souffre d’un déficit théorique. Le Robert définit l’illectronisme comme l’« état d’une personne qui ne maîtrise pas l’usage des ressources électroniques ». Résumer ce concept en une non-maîtrise des usages électroniques revient à considérer ce problème comme binaire et stipule que les personnes sont, ou ne sont pas, en situation d’illectronisme.
Dans un contexte de numérisation croissante où les démarches administratives, la recherche d’emploi et l’accès au soin se font de plus en plus en ligne, l’illectronisme soulève des questions cruciales d’inclusion sociale et économique. Son émergence en tant que problème public reflète une prise de conscience collective de son impact sur l’équité et l’accessibilité dans une société toujours plus connectée.
Vous vous sentez un peu plus bête qu'avant? Ça va passer.
Cela fait déjà plusieurs années que la question se posait: le Covid-19 rend-il idiot? De nombreuses personnes atteintes du virus ont fait part d'une sensation de fatigue cérébrale, d'un déclin cognitif marqué, bien résumé par les anglophones sous le nom de «brain fog», ou «brouillard cérébral».
Une étude au long cours vient confirmer et chiffrer concrètement ce ressenti observé scientifiquement depuis le début de la pandémie en mars 2020. Le Covid, même sous ses formes les moins graves, peut faire perdre entre trois et six points de quotient intellectuel (QI) pendant près d'un an après la contamination, nous apprend New Atlas.
«Les effets potentiels à long terme du Covid-19 sur la fonction cognitive ont été une préoccupation pour le public, pour les professionnels de santé et pour les décideurs politiques. Mais jusqu'à présent, il était difficile de les mesurer de manière objective dans un échantillon de population important», explique Adam Hampshire, neuroscientifique à l'Imperial College London et auteur principal de l'étude publiée dans le New England Journal of Medicine.
Hampshire et son équipe ont mené une des plus grandes et longues études sur le Covid au monde. Lancée en avril 2020, elle a suivi près de 3 millions de personnes en Angleterre pour mieux étudier et comprendre les symptômes du virus à long terme.
Baptisée «REACT» pour «Real-Time Assessment of Community Transmission» (que l'on pourrait traduire par «Évaluation en temps réel de la transmission communautaire» en français), l'étude s'est focalisée sur 112.000 personnes et les différentes manifestations cognitives qu'elles auraient pu ressentir. Entre 3% et 4% de ce groupe souffraient de ce qu'on appelle un «Covid long», avec des symptômes persistant pendant plus de douze semaines. La majorité de ces patients affirmaient souffrir encore de certains effets un an après la contamination.
Les chercheurs ont quantifié ces derniers: il s'agirait d'une baisse d'environ six points de QI, notamment dans les domaines de la mémoire, de la planification ou du raisonnement verbal. Plus les personnes touchées se rétablissaient vite, moins elles étaient atteintes durement par ces déficits cognitifs.
«Même si les déficits cognitifs après le Covid-19 sont de faible magnitude en moyenne, une minorité substantielle de personnes ont des déficits plus importants qui sont susceptibles d'affecter leur capacité à travailler et à fonctionner, déclare Maxime Taquet, psychiatre à l'université d'Oxford, et qui n'a pas pris part à cette nouvelle étude. Étant donné l'ampleur de la pandémie et le nombre de personnes affectées, cela est particulièrement inquiétant.»
Si vous êtes fatigué, que vous avez du mal à trouver certains mots, ou tout simplement que vos proches vous font remarquer lourdement que vous êtes bête, blâmez le Covid et parlez-en à votre médecin.